Full text of "Romania"
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ROMANIA
ROMANIA
RECUEIL TRIMESTRIEL
CONSACRÉ A L'ÉTUDE
DES LANGUES ET DES LITTÉRATURES ROMANES
PUBLIÉ PAR
Pauz MEYER ET Gaston PARIS
Pur remenbrer des ancessurs
Les diz e les faiz e les murs.
Was.
21e ANNÉE. — 1892.
PARIS
ÉMILE BOUILLON, LIBRAIRE- ÉDITEUR
67: RUE RICHELIEU, 67
A5 LA.
JA“ 81 ‘808
A NOS LECTEURS
La Romania entre aujourd’hui dans sa vingt et unième année.
C'est en 1872, en effet, que parut nôtre premier numéro.
Les deux directeurs y tenaient beaucôup. de place. Pendant
les vingt années qui se sont écoulées depuis lors, ils ont consacré
à leur œuvre de prédilection le meilleur de leur temps. A eux
deux ils ont rédigé plus du quart de ces vingt volumes.
Puissent les lecteurs n’avairpas été trop fatigués par la répétition
constante de leurs noms! à
Il y a vingt ans, la France occupait dans le monde une posi-
tion bien modeste, pour la science comme pour le reste, et elle
en avait le sentiment peut-être exagéré. Les études romanes
notamment, prises dans leur généralité, y intéressaient peu de
personnes. L'étude plus spéciale de notre langue ct de notre
littérature était poursuivie par un petit nombre d’érudits dont
les travaux avaient peu d’action sur le grand public et n’en
avaient aucune sur l’enseignement officiel. Trois chaires seu-
lement, réparties entre le Collège de France, l'École des Chartes
etl’École des Hautes Études, toutes trois, par conséquent, placées
à Paris et en dehors de l'Université, représentaient en France
certaines branches de la philologie romane. Au mème temps
Y'Allemagne était considérablement en avance sur nous, tant par
{la place qu'elle accerdait à l’enseignement historique des langues
et des littératures neo-latines que par le nombre et l'importance
des travaux qu'elle leur consacrait. Nous avons voulu que notre
pays devint à son tour un centre d’étude et de production pour
Romania, XXL 1
A NOS LECTEURS $
poésies offriraient un rapport bien établi avec la littérature du
moyen-âge.
Notre domaine, restreint de plus en plus à la période ancienne
de ka philologie romane et spécialement de la philologie française,
s’est, par certains côtés, singulièrement agrandi depuis vingt ans.
A mesure que les découvertes vont se multipliant, l'horizon
s’élargit et l'on voit mieux combien il reste encore à trouver.
Des rapports imprévus s’établissent entre des œuvres qui sem-
blaient isolées. L'analyse linguistique est parvenue à un point de
perfection que l’on entrevoyait à peine lorsque nous avons com-
mencé la Romania. On arrive peu à peu à dater de temps et de
lieu, au moins approximativement, les compositions anonymes
qui abondent dans notre ancienne littérature. On a pu récem-
ment tenter, avec chance de succès, de dresser le tableau
chronologique de la littérature française jusqu'au xiv* siècle :
on n'y eût pas songé il y a vingt ans. Bientôt, à mesure que la
langue de chaque auteur ou de chaque ouvrage sera en quelque
sorte condensée en des glossaires spéciaux, on parviendra à
grouper ensemble les écrits anonymes d’un même auteur. Notre
champ d’études reste donc, pour ainsi dire, illimité. Mais, à côté
des recherches originales, nous devons réserver une place suff-
sante à l'examen des travaux d’autrui. Nous le disions dans notre
programme de 1871 : « La critique des ouvrages qui paraïtront
« dans le domaine de nos études sera une partie importante du
« recueil. » Et cette partie devient de plus en plus considérable,
à mesure que la philologie romane va se développant en tous
les sens. Nous sommes inondés de livres, de périodiques, de dis-
sertations pour le doctorat allemand (dont beaucoup pourraient
sans dommage être présentées en manuscrit), de contributions
à telle étude, de suppléments à telles recherches. C’est une
marée montante qui menace de restreindre la part consacrée
dans notre recueil aux études originales. On voudra bien nous
excuser si trop souvent de bons livres n’ont pas le compte rendu
qu'ils méritent, et si l'analyse de tel ou tel périodique est en
6 A NOS LECTEURS
retard. C’est que ce genre de travail ne peut être confié au
premier venu. La critique exige une expérience et, s’il est
permis de le dire, un tour de main, qui ne sont pas com-
muns. Et puis les jeunes érudits de notre temps ne semblent
pas avoir pour cet exercice salutaire le goût que nous mani-
festions, lorsqu'en 1865 nous fondions la Revwe critique, De
sorte que la partie bibliographique de la Romania reste en
une grande mesure à notre charge. Depuis 1877 (VI, 316)
nous avons donné, à la fin de la chronique, les titres des
publications récentes, avec quelques mots d'appréciation. Peu
à peu ces courtes annonces ont pris l'extension de brefs
comptes rendus, contenant en certains cas, non pas seule-
ment une appréciation sommaire, mais des critiques et des
rectifications. C’est tout ce que nous pouvons faire pour suivre
et résumer un mouvement scientifique qui croît sans cesse. Les
conditions matérielles dans lesquelles se publie la Romania et
nos occupations ne nous permettent pas d'augmenter l'étendue
de nos volumes annuels. Nos lecteurs voudront bien nous
savoir gré de nos efforts et nous excuser de ne point faire
davantage.
LA LOI DE DARMESTETER EN PROVENÇAL 17
« action de partager » (qui n’est pas attesté en latin), est repre-
senté par fartixo; 2° *cosetura, qui a donné, d’une part, cos-
tura, cosdura, couture ; de l’autre, cosedura, action de coudre.
Enfin, un mot particulièrement intéressant est debitorem,
anquel nous nous arrèrerons quelques instants avant de terminer.
Il a pour représentant phonétique, conformément à la loi de Dar-
mesteter, deutor ou deptor. Le nominatif correspondant “deutre,
“detre ne se trouve pas; ses fonctions sont remplies par deveire
(qui suppose un accusatif non attesté drcudor) et par deuteire,
combinaison singulière de deutr et de dzvire. Ce nominatif
dexire demande à étre expliqué : il est le type d’une série relati-
vement sombreuse, où l'on peut signaler kcvire, creseire, enten-
déire, fatcire, exc. Tous ces mots correspondent à des types en
“it, 2 par suite soulèvent une difficulté phonétique : où le latin
ne nous offre que débetor, le provençal réclame debétor.
L'existence de cette forme s'explique non par un déplacement
direct de l'accent, mais bien plutôt par une action règres-
se du c2s règime. J'ai montré comment -émentum,
étorem, etc., faisaient compagnie à imentum, ämen:um,
itorem, itorem, etc. Les nominatifs -itor, -ätor, corres-
pondant aux accusatifs -itorem, -ätorem, appelaient forcé
men: la créaticn d'En nominatif -étor pour correspondre à
Taccusatif -étorem:.
A. Tnowas.
Bu ms
NOTES
POUR SERVIR A L'HISTOIRE DE LA LÉGENDE DE TROIE
EN ITALIE ET EN ESPAGNE
I. GUIDO DELLE COLONNE ET -DARÈS
Guido, qui, dans son Historia destructionis Troie, cite toujours
Darès et ne cite jamais Benoît, a-t-il connu l’Historia de excidio
Troiz du Pseudo-Darès ? Dunger!, Joly?, Meister : l’affirment.
Barth+ le nie. M. Gorra, dans son récent ouvrages, se range
du côté des premiers. On peut être surpris qu’il n'ait pas vu
que Greif 5 défend la même opinion, et par les mêmes raisons,
c'est-à-dire en sc fondant sur deux passages, l’un du prologue
et l’autre de l’épilogue du récit de Guido. Ces raisons ne sont
pas irréfutables.
Ce qui est très caractéristique d’abord, c’est que ce récit
en lui-même n'offre, par rapport à Benoît, aucune diver-
gence où l’on puisse «econnaître l'influence directe de Darès7,
dont le texte aurait pourtant souvent fourni à Guido l’occasion
de contredire et de corriger les données du roman français.
1. Die Sage vom trojan. Krige, 1869, p. 63.
2. Benoit de Sainte-More et le Roman de Troie, 1870, Il, 477.
3. Dans l'introduction de son édition de Darès, p. XLIV.
4. Guido de Columna, Leipzig, 1877, P. 19.
. Testi inediti di storia trojana precduti da uno studio sulla leggenda trojana
in ltalia, Torino, 1887, p. 137-142.
6. Die mittelalterlichen Bearbeitungen der Trojanersage, Marburg, 1886,
P- 59-64.
7. Greif (p. 59) croit pouvoir en citer une; mais elle n'est qu'apparente.
Après avoir parlé de Podalirius et de Machaon, Darès, chap. xuit dépeint le roi
grec Merionem , rufum , mediocri slatura, corpore rotundo, virosum , pertinacem ,
crudelem, impatientem. Benoit le suit en faisant le portrait de Polidarius,
NOTES SUR L'HISTOIRE DE LA LÉGENDE DE TROIE 21
procédé suivi par Guido dans l’arrangement de son récit, et qui
aussi n’a pas la même étendue dans les différentes éditions. Il
n’y a nul doute que nous avons affaire À une glose qui du
xxxi livre de Guido, où elle était À'sa place, a été transposée,
par erreur, à la fin de l’Historia". C’est évidemment mal rai-
sonner que de déduire de ce passage, visiblement interpolé, que
Guido a connu le texte de Darès (il faudrait en dire autant alors
de celui de Dictys), hypothèse qui est de tout point contredite
par ce que nous avons de plus authentique de Guido : son récit
même.
Il. UNE NOUVELLE VERSION ITALIENNE
(Version F)
Le manuscrit 44-D-24 de la bibliothèque Corsini* est un
volume du xv* siècle, en demi-reliure, contenant 137 feuillets
écrits, in-folio, en papier, plus trois feuillets de garde, dont le
second porte, au v°, les mots : Questo libro e di Giovanni dant e
chontiene la storia di Troia. Che llachatta, lo renda. Questo lo
[domando] in charita di Dio. La page est de 36 lignes en moyenne.
Les rubriques sont en noir et se trouvent ajoutées à la marge
gauche, plus large que la marge droite.
(Fol. 1) Qui chominca il libro della veragie storia di Troia.
Chome de ongni di le chose antiche chomunalmente siano messe in
dementichanza per le chose nuove, perche paiano naturalmente piu diletrevole
2 udire, nondimeno alchune chose passate sono e furono di si grande isce-
lenza € si notabile a richordare che per vechieza ne per morte non si possono
dimentichare ne disfare, ne anchora per lungho spazio di tenpo nolle
potrebe l'uomo al tutto dimentichare.
1. Par suite de ce déplacement, la souscription a dté augmentée de
quelques paroles d'introduction , où il est dit que Guido a suivi en tou l'ou-
vrage de Ditys, pro co quod ipse Dites perfectum et completums fecit, — paroles
qui, pour le fond et pour la forme, ne sont certainement pas de Guido, ce
qui n'empêche pourtant pas de regarder comme authentique le reste de
la souscription.
2. Il est mentionné dans le Catalogus selectissime bibliothece À Rossii, cui
premissum est commentariolum de cius vilu, Romæ, 1786, p. $, où il est dit :
Hicc historia alia est ab ea Guidonis Judisis.
NOTES SUR L'HISTOIRE DE LA LÉGENDE DE TROIE 27
phrases E chome— si partiva sont un abrégé du texte de l'Historia
(Ceffi, p. 54, 8—55, 9). Le monologue qui vient ensuite (Ai
lassa !.…) manque dans Guido; il rappelle, malgré les différences,
celui que Benoit prête à Médée (Roman, 1482-87), et ce qui
suit est certainement emprunté à Benoit :
1496 Vient a son lit, si s'est assise.
Mes gie quit, au mien escient,
Que n'i serra pas longuement.
Relieve s'en, n'i puet plus estre (f).
Avec la mention du gallo, notre texte rejoint l’Historia et la
suit * en détaillant quelque peu le récit (y), mais sans se servir
de celui de Benoît, jusqu’au moment où il parle des due grandi
torchieti, qui, ne se trouvant pas dans Guido, proviennent de
Benoi
1567 bien i voicient,
Car dui cirge grant i ardoient (8).
Le passage de l’Historia, correspondant aux lignes suivantes,
est (Ceffi, 56, 4 ss.) :
‘Tantosto si parti la vecchia. lasone e Medea, rimasi soli nella camera e fer-
mate le porte, soli sederono in sul mirabile letto. Medea, aperti l5 suoï tresori,
rase fuori una immmagine..…
Notre texte s’écarte donc beaucoup de l’Historia. Il est bien
plus long, parce qu'il emprunte des détails au récit de Benoit
(. 1586-1607) :
La mestre ensemble les lessa,
En altre chanbre s’en entra.
Jason parole tor premiers :
« Dame, gié sui li chevaliers
Qui vostre quites sans partie
1590 Serra toz les jorz de sa vie.
Vos prie & requier dolcement
1. Id le récit de Guido diffère de celui de Benoit, surtout dans les points
suivants : 1° Médée ne cherche pas des yeux le lit où Jason se couche, puisque
Jason a une chambre à part; 2° la servante ne dit pas à Médée de se coucher ;
aussi celle-ci ne se couche-t-lle pas; 3° Médée reçoit Jason sous la porte de
sa chambre et lui rend son salut aflectueux.
32 H. MORF
IT. LE ROMAN DE LANDOMATA
Le Roman de Landomata est compris dans le roman de Troie
en prose : c’en est la dernière partie, ajoutée immédiatement au
récit de la mort d'Ulysse. Il en a été question ici même
(XIV, 66 s. et 73), et M. Gorra en parle pp. 244-48 de ses
Testi inediti.
. On sait que Benoit connaît Landomata, fils d'Hector et
d’Andromaque. Il le mentionne aux vers 15194 ss.; il en parle
plus longuement vv. 29584 ss., où il dit que Achillidès, fils de
Pirrus et d’Andromaque, aimait beaucoup son frère utérin :
29597 Au fil Hector ot tel amor
Onc hons a autre n'ot greignor.
Tous deux étaient des chevaliers sans peur et sans reproche :
Par els refut puis lor ligniée
Tote alevée et essauciée ,
Et li cheitif, li exillié,
Hors de servaige et conseillié :
29615 Par ces dos lor vint li secors,
Dont il orent puis granz hanors,
Et les granz terres desertées,
Qui puis refurent d'els puplées.
29625 D'els nos porrions molt retreire,
Mes des or voldrai a chief treire
M'oeuvre : ne vos en.merveilliez ;
Car molt sui las et traveilliez.
Il est évident que Benoit connaissait un récit selon lequel les
deux fils d’Andromaque rétablissaient l'honneur de leur maison
et lui rendaient le pays de Troie, qui devenait de nouveau floris-
sant. Ce récit remonte à une tradition connue déjà par l’anti-
quité (cf. Joly, Il, 415; Gorra, 247, n.)
Dans les six vers (29619-24) que j'ai omis ci-dessus, Benoit
donne d’autres détails sur le récit auquel il entend faire allusion :
Par le fl Pyrrus solement,
29620 Achillides, le prou, le gent,
MAÎÏTRE PIERRE CUDRIFIN, HORLOGER,
ET LA VILLE DE ROMANS"
Ga22-1431)
Par un acte en date du 10 novembre 1422, les syndics de
Romans chargèrent un certain Pierre Cudrifin, bourgeois de
Fribourg qualifié de « magister horologiorum », de construire à
Romans une horloge, à prix fait; le dit Cudrefin s’engageant à
séjourner une année dans la ville, à partir du 6 janvier suivant,
pour vaquer à ce travail. Cudrefin est le nom d’un village situé
sur le lac de Neuchâtel, en une partie du canton de Vaud
qui se trouve enclavée dans le canton de Fribourg. Je ne sais si
notre horloger en était originaire. Ce qui est sûr, c'est que
Cudrefin ou Cudrifin est le nom d’une famil e fribourgeoise dont
plusieurs membres sont mentionnés en des documents du
xv* siècle 2. Il ne parait pas que le délai d’un an ait sf à l’exé-
1. Les pièces d'après lesquelles cet article a été rédigé sont conservées aux
archives de la Drôme dans la liasse cotée E 3652. Elles ont certainement été
distraites des archives municipales de Romans, où il subsiste peut-être d'autres
documents relatifs à la même affaire. L'auteur d'une très courte « note sur
les cloches et l'horloge de Jaquemart, à Romans », publiée dans le Bulletin
de la Socitté d'archéologie de la Drôme, IX (1875), 353 , ne les a pas connues.
2. Peterman Cudrefin, chancelier, de 1410 à 1415 et memore du Conseil
de justice, fit écrire, en 1426, un manuscrit du Roman de vraye amour, poème
en quatrains de vers alexandrins dont le début a été cité dans le Bulletin de
Tinstitut national genevois, 1 (1853), 55. On peut voir sur Peterman
Cudrefin, Berchtold, Histoire du canton de Fribourg, Il (1841), 250, 265;
Daguet, Archives de la Société d'hisloire du canton de Fribourg, 11 (1856), 196-
201. — On connait aussi un Jacques Cudrifin, voir Berchtold, Hist. du cant.
de Fribourg, 1, 291.
52 P. MEYER
Il Or esmaginés quelle chiere
Font ceulx qui vous ont soustenus
Depuis vostre emprisse premiere *.
20 Je croy qu’i sont mort ou perdus,
Car je ne voys nulle ne nus
Qui de present de vous se mesle,
Si non chetis et maletrus,
24 Dont c'est pour vous dure nouvelle.
IV Pour vous gages, il est conclus,
Aiés la goute et La gravelle
Et le coul taillé rasibus,
Dont c’est pour vous dure nouvelle.
Paul Mever.
1. Les Bourguignons.
2. Le plus ancien exemple de ce mot, dans Littré, est tiré de Commines,
mais il y en a dans Raynouard (Lex. rom., V, 36) un ex. tiré du traité
d'arpentage de B. Boysset, par conséquent de 1405. On le trouve aussi dans
l'un des mystères rouergats récemment décrits par M. Thomas (Ann. du
Midi, IL, 415).
GASTER, Chrestomathie roumaine 119
développée ; mais, jusqu'ici, bien peu d'auteurs se sont appliqués à recueillir
les formes du parler populaire dans les divers pays roumains. Le choix de
l'Opincar de Jipescu pour la Valachie est excellent ; mais les textes macédo-
niens, par exemple, ne nous inspirent qu'une confiance restreinte. Boiagi,
qui écrivait en 1816, s'appliquait déjà à latiniser sa langue. Quant aux
Mostre de Vangeliu Petrescu, nous avons déjà dit qu'elles ont été arrangées
par Obédénare*. C'est également Obédénare qui a eu la part principale
À la traduction macédonienne de L'Escriveta, et ce texte ne peut absolument
pas être cité comme populaire.
Le glossaire qui termine l'ouvrage témoigne d’une patience éprouvée et
rendra les plus grands services au lecteur étranger. On pourra seulement
regretter que M. G. n'ait pas unifié l'orthographe en s'en tenant, comme le
font aujourd'hui les auteurs moldaves, aux signes 4 et { pour représenter
les deux voyelles de l'alphabet slavon qui manquent à l'alphabet latin. Il a
fait sans doute un grand pas dans cette voie ; mais il admet encore, nous ne
savons pourquoi, le signe d qui, en réalité, se confond avec f.
Si nous ajoutons que l'exécution matérielle de la Chrestomathie ne laisse
rien à désirer et que le prix des deux volumes (22 fr. jo) est relativement
modique, nous en aurons assez dit pour recommander l'œuvre de M. G. et
témoigner de la haute estime que nous inspire son travail.
Émile Picor.
1. Remenie, XVIII, 1889, p. 168, note 5.
CHRONIQUE 129
— Nous avons reçu les prospectus de deux dictionnaires qui nous parais-
sent de nature à être annoncés ici. L'un est un dictionnaire français-occitanien
par M. L. Piat (en souscription chez MM. Hamelin frères, à Montpellier).
L'ouvrage doit former deux volumes gr. in-8° d'environ 500 pages chacun.
Le prix en est fixé à 24 francs. Si nous en jugeons par le prospectus, ce
dictionnaire sera conçu selon une bonne méthode. — L'autre dictionnaire
«st un Glossaire du pavs blaisois, « contenant les vocables, locutions, dictons
« et proverbes de pays blaisois, même ceux des temps passés, qui ne sont
« plus en usage aujourd'hui, précédé d'une étude sur l'orthographe et la pro-
“ nonciation blaïsoises, et suivi d’un appendice donnant plusieurs spécimens
« du langage blaisois », par Adrien Thibaut. (Prix 8 fr.)
— L'Armana prouvençau, parvenu actuellement à sa trente-huitième année,
a eu une nombreuse progéniture. Il a paru en plusieurs villes du midi de la
France des almanachs plus ou moins populaires rédigés en patois local, dont
les uns n'ont eu qu'une existence éphémère, tandis que d'autres font preuve
d'une réelle vitalité, Nous signalerons particulièrement l'un des plus récents,
l'Almanuc patouës de l'Ariejo, publié à Foix chez Gadrat aîné, qui nous paraît
mériter d'être signalé non seulement aux personnes qui s'occupent de nos
patois, mais surtout à celles qui s'intéressent aux chants et aux contes popu-
laires. C'est par excellence un almanach fait pour le peuple, car il ne coûte
que 15 centimes, mais, comme il est dirigé par le savant et zlé archiviste de
l'Ariège, que rien de ce qui touche son pays d'adoption ne laisse indifférent,
il ne faut pas s'étonner s’il est de nature à plaire aux érudits. L'almanach
de 1891 contenait des chansons déjà publiées dans le Bulletin de la Société
arigæise, notamment dans le mémoire sur Massa, chansons, danses, ete.,
que nous avons annoncé en son temps (Rom., XVIII, 647), et quelques contes
populaires ; celui de 1892, que nous venons de recevoir, contient plusieurs
morceaux dignes d'attention. Nous citerons la chanson de noce et « la femme
trop pressée de se marier », chants recucillis dans la haute vallée de l’Arièg
de nouvelles versions de la mal maridado (tout à fait différentes de la pièce
publiée sous le même titre dans D. Arbaud, Ch. pop. de Pro. 1, 148, et de
toutes les maumariées que renferme le recueil de M. Rolland, 1, 79; II, 7
V. 3), des noces de l'alouctte et du pinson (ef. D. Arbaud, II, 189; Montel
at Lambert, Chunts pop. du Langudor, 490 et 91, etc). Parmi les contes,
notons (p. 51) celui de la souris qui se métamorphose en fille, veut épouser
le soleil et finit par épouser un rat. C'est un conte qui a été très répandu de
Inde à l'Occident, et sur lequel voy. Contes de Boon, pp. 259-60.
— Nous avons reçu de M. Nizier du Puitspelu les observations qui suivent ,
en réponse au compte rendu publié daus notre t. XX de son dictionnaire du
patois Ivonnais. Nous les publions en y joignant en note les remarques que
M. Philipon, auteur du compte rendu, nous a adressées À ce suj
« La Romania (XX, 306) contient, sur mon D) lu Pulois Ironnais.
an travail de M. Philipon, suivi de remarques de M. P. Méver. Je
“iens tout d'abord à remercier ces messieurs d'une courtoisie à laquelle j'ai
Roms. NX. 9
130 CHRONIQUE
&të très sensible. Je désire ensuite rectifier quelques inexactitudes qui se sont
glissées dans l'article d'ailleurs si compétent de M. Philipon.
« Bien entendu, je ne discute pas les idées générales. Je laisse de côté tout
ce qui est du domaine des opinions pour m'en tenir exclusivement à la dis-
cussion de quelques points de fait.
« Page 309, M. Ph. me reproche d'avoir vu le suffixe airo arius dans un
certain nombre de noms de métiers, tels que amolairo, sefairo sectarium, et
il y voit de préférence le correspondant du suffixe prov. aire ator, itor. Je
crois qu'il a raison, mais lui-même a longtemps partagé mon erreur et n'a été
éclairé que tout récemment. Dans la Revue des patois, 1, 280, il lisait beere
bibarium, pinyro pectinarium, et, par la même formation, amokero de
mola, marrero de marra, etc. etc. et dans la Revue de philologie, I, 38,
saumer salinarios!. Qu'il ne me jette donc qu'une pierre légère !
« M. Ph. n'admet pas que, dans les verbes de la première conjugaison, la
sifflante dure ait pu exercer une action sur le remplacement de a (ou de 6)
par . Je ne puis que renvoyer aux exemples cités dans le Dictionnaire,
p- xxx1. Ils sont assez nombreux pour ne pouvoir être tous expliqués par des
types en iare, qu'il est toujours facile de supposer. Plusieurs d'entre eux,
tout modernes, sont formés par apposition de suffixe : tracassf sur fracas,
dehors sur borsa, cabossi sur bosse. Qu'est-ce à dire, sinon que, lorsque la
voyelle finale était précédée de ss, elle s'est trouvée naturellement être { sur
les lèvres du paysan?
« P. 310, M. Ph. conteste que, en vieux lyonn., « bref, au moins dans la
majorité des exemples, ne se soit pas diphtongué en ie comme en français.
J'avoue que cette anomalie m'a paru au moins aussi surprenante qu'à
M. Ph., je dirais presque renversante, mais je ne puis cependant pas changer
les exemples. Je ne puis pas faire que l'on n'ait pas Deu, ben, cel, fera, secho
seclium, leve levat, pe, Pero Petrum, nebles nebulas, so seculum.
Je laisse à M. Ph, le soin d'expliquer ces formes, faisant remarquer qu'après
tout on peut voir dans pies (pedes), pieri, piera, liere (leger), qu'on trouve
à côté, des influences françaises , tandis qu'on ne peut voir dans les autres
formes des influences étrangères d'aucune sorte». M. Ph., négligeant son
principe de ne pas sortir d'une seule commune, cite des textes de Mionnay
1. [En effet, j'ai eu le tort d'adopter, trop légèrement, la dérivation proposée par
MN. du P. dans la première édition de son Trés bumble esai de phonétique lyonnaise,
Les formes du vieux lyonnais m'ont éclairé, par la suite, sur la véritable étymologie
des noms de métiers en éro. Quant à sun, il n'est pas à sa place ici; c'est Le latin
salinarium, franç. saunier. — E. P.]
2. (Comment, d'aucune sorte? M. N. du P. aurait-il oublié qu'en provençal le main-
tien de l'é sous sa forme latine est de régle : fél, selge, sgle, peïa, ete. ? Les formes
diphtonguées étant de beaucoup les plus nombreuses dans les anciens textes lyonnais,
#1 semble naturel de les considérer comme autochtones et d'attribuer les autres à une
Hnfloence provençale. — E. P.]
CHRONIQUE 131
et de Miribel, mais il s'agit ic1 de textes lyonnais et non de textes bressans.
— P. ji, sur o breflibre, je fais la même observation, laissant à mon cri-
tique le soin d'expliquer les exemples où o ne s'est pas diphtongué».—P. 511,
dernière ligne, M. Ph. me reproche de n'avoir pas « distingué entre le cas
où le groupe cons. + c existait déjà en latin et celui où il n'est qu'un pro-
duit roman ». Il remarque que, « dans le premier cas, € est traité comme
initial et prend devant a le son chuintant sourd, tandis que, dans le second
cas, il passe très régulièrement à la chuintante sonore : v. lyonn. empiment,
pregier, erragivet, patois dyemengi, manjo, mangi. » M. Ph. n'a pas fait attention
que l'auteur ayant considéré séparément le cas de chaque consonne devant c,
il ne pouvait faire raisonnablement la distinction demandée que lorsqu'il
avait des exemples à fournir dans les deux cas. Pour le groupe TC, DC, il
ne possédait que des exemples de «en position romane : ablagi ablaticare,
d'ablatum, ji judicare, fougi fodicare, ravi, radica. Encore y a-t-i
un exemple qui dément la règle, praichi predicare, à moins que l'on
suppose praichi refait sur précher. Pour le groupe RC, au contraire, l'auteur
n'avait des exemples qu'en position latine : marchi mercatum, charchl
circare, orchi arca. Comment aurait-on voulu qu'il fit la distinction ?
— P. 312, M. Ph. écrit : « N. du P. dérive le parfait chanté cantavi d'un
hypothétique cantivi : c'est bien invraisemblable en présence du v. lyonn.
achitay, donnay. » Je ne sais si c'est invraisemblable, mais je crois bien que
c'est certain. Je pensais avoir expliqué surabondamment qu’à Craponne à est
exprimé par 4 : wnd venire, fit finitum. Donc chanté répond non au
chantay des vieux textes de Lyon, mais au chanti (ime, ile, iron) de toutes nos
communes rurales. Ce passé chanté se retrouve dans quantité de patois, et
ne s'explique que par l'application à la première conjugaison du prétérit de
laquatrimes. — P. 313, M. Ph. voit dans chuchi (Lyon), gouchi (Mormant),
1. [M faut que M. N. du P. m'ait bien mal compris pour me prêter l'étrange principe (à)
qu'il me reproche d'avoir méconnu. Quoi qu'il en soit, M. N. du P. ne doit pas ignorer
que la Bresse se prolongeait jusqu'aux portes mêmes de Lyon; dès lors, je ne m'explique
pas qu'il me conteste le droit de comparer aux textes écrits dans cette ville, des textes
appartenant à La partie du territoire bressan qui avoisinait immédiatement le Lyonnais,
comme &’est précisément le cas pour les terriers de Miribel et de Mionnay. M. N. du P.
considérerait-l la frontière bressanne comme une frontière linguistique ? — E. P.]
2. [Je pourrai me borner à demunder à M. N. du P. l'explication des exemples bien
plus nombreux où 4 s'est diphtongué ; j'aime mieux lui faire remarquer que nous nous
trouvons tout simplement en présence du phénomène bien conuu de la fusion des dia
lectes Les uns dans les autres : le lyonnais tient le milieu entre le provençal où la
diphrongaison n'est que l'exception et le français où cette diphtongaison est génê-
male. —E. P.]
3. [L'hypothèse d'un type en iv n'est guère soutenable en présence des formes du
+. Içonnais telles que dunict, maliel, parliet, lesquelles remontent visiblement à un type
formé sur dedit; par la suite des temps ir (2 e) s'est réduit à i, suivant La règle, et
l'on a eu des parfaits en . — Ce qui lève tous les doutes en faveur du type en ded
é'est qu'il explique et La forme du vieux lyonnais ct celle du lyonnais moderne, tandis
que le type en ivi ne convient qu'à cette d EP]
132 CHRONIQUE
goussi (Craponne) le même calcare, au lieu de calcare dans le premier
cas, et de walkan dans les deux autres. M. Ph. a oublié que initial devant
a devient bien cb dans le Lyonnais, mais jamais g *.
« Abenô, élever des oiseaux (ou des poussins) paraît à M. Ph. formé sur
benna, mais le sens est absolument rebelle. Benna en lyonnais signifie un
vaisseau de bois servant à recevoir de la vendange et non une cage à élever
des poussins. Ce dernier objet se nomme créneau. En bas limousin beno n'a
pas même le sens de cage en osier que lui donne M. Ph., mais celui de cor-
beille pour le blé (Béronie). Abenô représente tout simplement « mener à
bien » et non pas « élever sous une benne ». — Acuhi, mettre en monceau,
est tiré par M. Ph. de collocare. Ce n'est pas possible. Collocare a,
dans toutes les langues romanes, le sens de coucher, étendre, c'est-à-dire pré-
cisément l'inverse d'amonceler. Le v. fr. euh signifiant monceau, quoi
de plus naturel que de lire dans euchon, petit monceau, un diminutif
de cuche* ? — Afard, faire sa toilette, caresser le pelage d'un animal, est
relié par M. Ph. au prov. fra, torche. Cela semble trop subtil. 11 n'est
pas vraisemblable qu'afara, brillant, lumineux, et ufaré, faire sa toilerte,
aient la même origine. — Aivajo, race, est tiré par M. Ph. de habitati-
cum, Impossible : habitaticum donne aitajo. M. Ph. aurait pu trouver
dans le Dictionnaire, à l'errata, s. v. aiva, l'étymol. plus plausible de Thur-
neysen (Keltoromanisches, p. 88), qui identifie le prov. aib, « Sitte, Benehmen, »
avec le celt, aoibh, « a courteous, civil look; a cheerful countenance. » De
qualité, disposition, mœurs, caractère, le mot a passé à qualité d'une espèce,
puis à espèce 1. — Ambre, osier. M. Ph. a raison en ce qui concerne l'existence
de La forme ambro. C'est même celle de la plupart de nos communes. J'avais eu
le tort de me laisser abuser par là forme francisée, M. Ph. conteste donc avec
a « au point de vue phonétique », mais il a tort de la
contester « au point de vue historique ». Ambro vient d'amerium, qui est à
1. [Cette dualité de dérivation, à deux lieues de distance, est a priori bien surpre-
nante. Pour ce qui est du passage de c initial à y devant a, M. N. du P. en cite 1
même divers exemples (85), dont il faut, ilest vrai, retrancher gl, rattaché à tort
4 calla, Aussi bien cette permutation n'est pas plus étonnante que le passage de
qu'à g dans gas. — E. P.]
2. [Le v. franc, cuche, au sens de fur, ne se trouve, à ma con
Rojuefort, qui le donne sans indication d'origine et en le faisant
celche, eulehe, lesquelles supposent bien certainement un type formé sur collocare
pris dans le sens primitif de disposer ensemble, réunir. Je ne fais donc pas de doute que
le s. franc. eucke, si tant est qu'il existe bien réellement avec le sens qu'on lui donne,
ne doive être rattaché à collocare, de même que le lyonnais uenchi, euchom, ete.
n de me parait pas démontrée,
sens, Le rapprochement entre «a courteous, civil
semble bien forcé, Je préfère m'en tenir à habita-
CHRONIQUE 133
Ameria comme Asius à Asia (voy. Geomgs s. we), Burgundius à
Burgundia, Bavarius à Bavaria, ét même parius à Paros. Cf. encore
pat. férsi, pêche, de persia (pour persica) ‘. — P. 214, bider, mesurer la
distance du but à une boule, est identifié par M. Ph. avec but, fait sur but.
IL faudrait expliquer : 19 comment # s'est changé en À (on n'a nulle part bité
pour buté) ; 2° comment, contrairement à toutes les régles, le # nal de Ant est
devenu d. D'ailleurs, comment ne pas identifier hider avec pider, qui a exacte
ment le même sens dans la Suisse occidentale, et celui-ci avec le normand
péter, mesurer ? — Bossi, que j'ai tiré de l'allem. busse, est tiré par M. Ph.
du bas lat. bustea; mais Pusleu à donné hoiste ct non bosse», — Embaissi,
ambaissi, certain nombre de fagots. Je vois avec satisfaction que M. Ph. a
abandonné la traduction d'ambuissi par « vases », qu'il avait donnée dans la
Romania (XII, 588) et qu'il accepte la mienne. Je n'ai pas le loisir de
vérifier si, comme il le dit, la confusion entre am et em ne s'est vraiment
jamais produite en lyonnais, ce qui rendrait en effet impossible une étymol.
tirée de in-bastum. Je m'en rapporte pleinement à son érudition et, puis-
qu'il paraît approuver l'étymol. ambactia, que j'avais d'abord proposée, je
n'ai aucune raison de le contredire. — P. 315, l. $, M. Ph. pense que j'ai
fait confusion avec indorses. Non pas. Imbiorses s'emploie dans la montagne,
région de Riverie. — Fuiua. M. Ph. proteste contre l'étymol. fagina, ct
veut qu'on s'en tienne à fâgina. Je ne puis que lui répondre ce que j'ai
déjà répondu à M. Horning dans l’errata; que je n'ai proposé fagina que
par l'impossibilité (du moins pour moi) d'expliquer le néo-prov. faguina. —
Larmisa, ézard des cailloux, serait, d'après M. Ph. lacryma-+usia. Si
personne n'y contredit, moi je veux bien. La forme s'adapte parfaitement.
Mais quelle force d'imagination expliquera le rapprochement entre une larme
ct un lérard? — Suivant M. Ph. picou serait le même que le vr. fr. frcol,
undis que je le tirerais à tort de pedem coli. M. Ph. m'a mallu ou je me
suis bien mal fait comprendre : j'ai précisément identifié picon avec fl, et
di tiré ce dernier de pedem coli, ce qui convient comme forme, et ce que
ï expliqué comme sens. — P. 516, pete! v. lyonn., matras, paraît à M. Ph.
répondre à pistillum. Je l'ai dit tout au long et ne comprend pas l'obse
vation 1.
« Ptongi, L'exemple donné par M. Ph. n'infirme nullement l'étymol.
« naturaliste » que j'ai donnée. Pelougi, c'est d'abord là maladie (prtougi,
médicamenter) ; puis l'ennui, la misère causée par la maladie : puis la misère,
2. (Le rattachement de umbro à l'hypothétique amerfum est insoutenable : amë-
rium eût donné umier comme ministerium a donné mélier. —- E. P.]
2. [Non pas : bustea à donné bi comme * brustias a donné Le Brun, lieu-dit sur
le turritoire de Saint-Genis-les-Ollières, comme ambactia à donné umbaisi, ete.
— E. P.]
3: [M N: du P. ne m'a pas compris : j'ai dit et je maintiens que le v. lyonnais pete
pur matras. CÉ. piston dans
même ses. EP
pistillum signifie pilon ct qu'on à eu tort de le
À patois de Saint-Genis-les-Ollie
134 CHRONIQUE
l'embarras en général. Quand j'étais petit et que je faisais des imprudences,
ma mère ne faillait jamais à me dire : « Va, va, sois malade, puis c'est moi
qui aurai la petougel »
« Poya, suivant M. Ph., « suppose un type podiatam. » Eh non! on
aurait peyd ; or la forme est péya. C'est le même que le limousin poujo, nom de
lieu et de personne, ct dont l'étym. podia est absolument sûre. Ne pas con-
fondre péya avec la Poyat, nom de lieu, cette fois de podiata *.
« Vai, dit M. Ph., ne peut-être le latin vicus. » Je n'ai pas repoussé
versus. J'ai exposé les deux hypothèses et les raisons qui militent en faveur
de chacune d'elles. Le témoignage de mon absence de parti pris, c'est que
j'ai moi-même cité le texte rappelé par M. Ph. Quant à sa preuve, tirée de
sa prononciation de vé à Saint-Genis, elle n'est pas concluante, car dans
presque tout le Lyonnais on dit vè et même ré (Dargoire). Mais comme
vieus a donné Vieux (Ain), il y a lieu en effet de rapporter vai à versus.
« Je ne vois pas figurer, dans la liste des corrections de M. Ph., l'étymol.
Trion Triguntium, qu'il repoussait pour la remplacer par Trivium, sans
songer que v ne pouvait tomber devant j, et que, d'ailleurs, trivium a donné
treyro, que M. Ph. expliquait bien à tort par trebiumi. J'en conclus qu'il a
renoncé à son explication pour se rallier à la mienne +.
« Quant aux mots tirés par M. Ph. du patois de Saint-Genis et donnés
comme manquants à mon Dictionnaire, je ferai observer : 1° que la commune
de Saint-Genis n'est pas comprise dans le périmètre que je m'étais assigné;
29 qu'une grande partie des mots donnés par M. Ph. sont simplement des
variantes de ceux que renferme le Dictionnaire, où même quelquefois les
mêmes mots sous des orthographes différentes. S'acaforné est se cuforné ; alyan
st aillar issu est aciver ; barbot est hérbot ; bartassada est bartasserie ; belôda
est bas bicot est biro: byjola est bongeola ; sond le cage est soné lo carcot ; can-
1. [II n'y à pas eu confusion : à Saint-Claude et dans le Haut-Bugeÿ fou, écrit pare
dois part, Sign montée, et se prononce aves l'accent sur lu. Je tiens de mon
collègue, M. Blanc. déput en Savoie. Je persiste
done à croire que le Iyonnai du P., dérive bien de podiata.
Dodia aurait donné soit pure, Ari (limousin Jojo), soit fre,
3. Res. de philologie francaise, tome IL, page 40, ligne 1°* et par
3. Ree. des Patois, tome Îl, page 26.
42 rien ne se trouvant pas au L ais as à Le faire figurer dans la
liste de mes observations. Quant à l'étymologie Trigancius, que M. N. du P. donne
d'après le Paron Raverat, m2 discussion nous entrainerait trop loin. Je me Rornerat à
<onstater que, contrairement à ce qu'on avance, La forme Trier, sans 5 finale, est fré-
quente dans les teates lyonnais du xiv* siècle. D'autre part, le rapprochement avec
Saint-Pons n'est pas conchunt, Poncium ayant donné en v. Ivonnais Poncef et non
. Pour ce Là chute du : devant , outre qu'on en pourrait citer plusieurs
exempte, elle ke. plus surprenants que celle de à devant j. que
MX dans fout. Auv en, il me suffit de le
d'Enveet-Leir sil pourra Bitte, entre le Treo de
uirs Hpproch,ments qui ne manquent pus
Rerap
Se départeme: “ iyouna
d'interèt, — E. P.]
CHRONIQUE 135
quiborlé est caquiborlé ; corjon est corgeon; cortacornilli est coustacornilli. Je ne
continuerai pas cette énumération sans intérêt.
Sur les remarques de M. P. Meyer, je ne me permettrai qu'une ou deux
observations. Je suis aux regrets de n'avoir pas connu son livre sur la légende
d'Alexandre. Je ne l'ai pas consulté par ce qu'il m'avait été affirmé à tort que
cet ouvrage concernait exclusivement l’Alexandre de l'Arsenal et du Museo
civico de Venise. Il m'eût été en effet plus commode de me procurer l'ouvrage
de M. P. M. que ceux de MM. Conrad Müller et Hermann Flechtner, Toute-
fois je tiens à faire remarquer que j'ai cité les opinions de ces messieurs sans
me les approprier, et que la seule affirmation que j'aie prise sous ma responsa-
bilité est celle-ci : « Il est certain, en tous cas, que l'Alexandre appartient à
une langue intermédiaire, comme notre dialecte, entre le provençal ct le
français, » affirmation banale, mais, en définitive, exacte".
Relativement au reproche de ne pas avoir fait figurer au Dictionnaire tous
les mots cités dans la Phonétique, tels que chis, chin, etc., je répondrai que
j'ai cru devoir élaguer tous les mots qui se rapprochaient beaucoup du fran-
ais et dont le sens ne pouvait faire doute. Mon ouvrage était déjà énorme.
Sur la question relative à chivra, chura, je dirai que le premier appartient
aux environs de Lyon, et le second à Mornant et à toute la région monta-
gneuse.
En somme, il me semble que M. P. Meyer ne me reproche guère, avec des
inexactitudes de détail, que quelques défectuosités de classement ct de n'avoir
pas indiqué suffisamment l'habitat de chaque forme, ce qui eût été bien
facile, si j'avais pensé qu'il eût fallu y attacher autant d'importance. Je suis
heureux encore de ne mériter que ces reproches, et j'ajoute que ces défec-
tuosités disparaîtront facilement dans une seconde édition... que malkeu-
reusement je ne ferai pas.
PUITSPELU,
— Livres annoncés sommairement :
Le cronache di Galvano Fiamma e li fonti della Galeugnana, par L.-A. FeRRAt.
Roma, 1890, in-4°, 40 p. (extrait du Bulletino dello Istituto Storico Italiano,
num. 10), — Travail bien fait sur un sujet intéressant.
Fom Gebrauche des Imperfecqun Futur im Romanischen, von A. Tonuer, Berlin,
in-40, 12 p. (Situngsberichte de l'Académie de Berlin, 22 janv. 1890). —
L'auteur, avec sa pénétration habituelle, distingue deux modes différents,
en français littéraire moderne, de l'emploi du conditionnel (futur imparfait)
dans le cas où il s'agit d'énoncer un évènement futur par rapport à un
temps passé (le second de ces modes, qui avait été révoqué en doute, est
établi par des exemples d'écrivains tout à fait contemporains, mais il est
3. [e Exacte » est beaucoup dire. La langue du fragment d'Alexumdre de Florence
est, fe crois l'avoir démontré, celle du Dauphiné méridional, C'est uue Langue beaucoup
plas provençale que française. — P. M.]
136 CHRONIQUE
certain que beaucoup s'en garderaient). 11 étudie ensuite de curieux emplois
du conditionnel, notamment en espagnol et en portugais.
Passio sanctae Catherinae Alexandrinae metrica ; ce duobus libris manuscriptis
edidit Hermannus VaRNHAGEN. Erlangen, 1891, in-49, 75 p. (invitation
à une fête anniversaire d'Erlangen). — Poème en distiques, déjà imprimé
d'après un manuscrit, et dont un second 2 permis d'améliorer le texte. 11
paraît être du xne siècle et suit la « vulgate » de la légende.
Un poëte inconnu de la société de François Villon. Le grant garde derrière, poème
du xve siècle, publié avec Introduction, Glose et Index, suivi d'une ballade
inédite de François Villon à sa dame, par W.-G.-G.-C. Bijvanck. Pari
Champion, 1891, in-129, 61 p. — Dans sa spirituelle préface, M. B. avoue
de bonne grâce qu'il n'a eu d'autre raison pour assigner son poète inconnu
à la « société de François Villon » que le désir d'attirer l'attention sur le
poëme qu'il public. En fait, ce poème, fort curieux et même remarquable,
malgré son obscurité d'ensemble et de détails, paraît assez postérieur à
Villon et non exempt de l'influence de Coquillart. La « glose » consiste
en rapprochements avec des œuvres contemporaines. L'index explique ceux
des mots ou des locutions difficiles que Le très savant éditeur a pu éclaircir.
Il se trompe sur le sens de danger dans le Roman de la Rose, qui est préci-
sément celui de « refus » que ce mot a dans le Grantgarde derrière. Allepez
moy (1, 3) est, comme Haut le bois, le début et Le titre d'une danse et d'une
chanson (Allegrz moy, douce plaisant brunette), ce qui modifie la ponctuation
etle sens de la strophe. Ælle viendra, se Dieu plaist, au lendit (VII, 7) se
rapporte à La erolte dont le poète prétend faire des reliques : on exposait en
grande pompe, au lendit, les célèbres reliques de saint Denis (M. B.
paraît rapporter ce vers à « la dame de Cliques » et note simplement
« dicton populaire »).— En appendice M. B. imprime une jolie ballade
dite, qu'il croit être en droit d'attribuer à Villon : il donnera les preuves à
l'appui de cette opinion dans un prochain article de la Romama.
Das Martinsleben des Pean Gatineau. Bemerkungen über Quellen und Sprache,
von Dr Werner SéDERHJELM. Helsingfors, 1491, in-4e, 48 p. (extrait des
Commentationes variac in memoriam actorum CCL aunorum publiées par
l'université de Helsingfors). — M. Sôderhjclm publicra prochainement
dans son intégrité le long poème de Paien Gastinel sur la vie et les
miracles de saint Martin dont l'abbé Bourassè n'a imprimé (et fort mal)
que là première partie. Il nous donne ici par avance d'intéressantes
remarques sur les sources et Là langue de cette œuvre remarquable, et
l'édition de 330 vers du livre II, accompagnés du texte de Sulpice Sévère
qui en est la source et de la rédaction en prose du xve siècle. Tout ce
travail est fort satisfaisant, La légende relative à un marquis de Montferrant
(2 9139-9290) à certainement trait au Montferrat. comme l'indique le
nom de Boniface. La légende sur Dagobert (10096-10129) est empruntée
au récit de l'évêque Ansoald de Poitiers (voy. Hist. pat. de Charlemagne,
P 445). M. S. remarque que les rimes masculines sont à peu près toujours
CHRONIQUE 137
riches, les rimes féminines le sont rarement; mais dans la théorie du
moyen âge la rime était riche (leonine) par le seul fait qu'elle était féminine,
comprenant dès lors deux syllabes, Chrtau n'estal pas capitale (fr. chetel)
plutôt que castellum ? (Dans ce cas la remarque sur ellum >> au est à
rayer.) L'hypothèse d'une forme lee .< librum est ingénicuse, mais inac-
ceptable : beire «2 beivre est dû à l'analogie verbale, et veritau répond non
à veritabilem, mais à veritalem (a. fr. serilel), comme M. S. l'a
supposé plus loin. La rime departie: demie ne prouve pas la réduction de
iee à ie. Voil (veclum) : rewil (revolio) doit être compris vil : revueil.
La remarque sur ñ et » est errone ; poinne est pugna, rivné est un mot
savant où gu est purement graphique. On regrette de ne rien trouver sur
la flexion.
Glossaire de la langue d'oil (xue-xive siècles), contenant les mots vieux-fran-
çais hors d'usage, leur explication, leur étymologie et leur concordance
avec le provençal ct l'italien. Ouvrage à l'usage des classes d'humanités et
des étudiants, par le Dr A. Bos. Paris, Maisonneuve, 1891, in-Be, xvi-
466 pages. — Ce glossaire n'a pas un caractère rigoureusement scienti-
fique, mais il rendra certainement des services. Le dépouillement est riche
et repose sur une lecture personnelle : on s'en convainc en comparant aux
derniers fascicules du Dictionnaire de M. Godefroy la partie correspon-
dant, qui a été rédigée avant l'apparition de ces fascicules et qui ne leur
cède guère par l'abondance des mots vraiment importants (lle en a même
qui ne sont pas dans Godefrov). Les interprétations sont très sommaires et
l'on pourrait souvent en contester la précision ou leur ajouter des exten-
sions et des nuances; mais elles sont exactes dans leur majorité, Ce qui
prête le plus à la critique, ce sont les étymologies que l'auteur a cru
devoir joindre à sa nomenclature et à sa traduction. I fallait pour réussir,
dans un domaine où il y a encore tant à faire, un outillage dont l'auteur
ne disposait pas ; aussi aurait-il mieux fait, 4 notre avis, de s'abstenir d’une
täche pour laquelle son érudition réelle et son intelligence remarquable-
ment lucide n'étaient pas suffisantes. Nous aurions voulu qu'il remplaçät
cette partie étymologique, qui tient une très grande place dans son volume
Cet où il y a d'ailleurs quelques bonnes remarques ou suggestions), par un
choix des locutions où figurent les mots enregistrés, ct que l'on ne com-
prend pas encore quand on a le sens de chaque mot isolé. À défaut des
exemples, qui sont systématiquement exclus, cela aurait beaucoup
augmenté l'intérét comme l'utilité de ce glossaire, qui n’en reste pas moins
méritoire et qui aura toujours l'honneur d'avoir ouvert une voie où il sera
certainement suivi
Ucker die Sage von Ogier dem Dénen und die Entstchung der Clkvalerie Ogicr.
Ein Beitrag qur Entwickelune des alffransésischen Helenipes, von Carl
Vorerzscu. Halle, Niemeyer, 1891, in-8e, 127 p. — Excellent travail,
riche en résultats nouveaux et certains. Il reste des doutes sur quelques
points, et notamment sur le plus important de tous, l'origine du nom de
138 CHRONIQUE
Danois (ou de Danemarce) donné à Oger : M. V. n'y voit qu'une invention
de jongleur, sans aucune base historique, et le suppose introduit par
l'auteur d’une version perdue des Enfances Ogier, lequel avait imité une
version perdue d'Aspremont; tout cela est très contestable, surtout si l'on
considère qu'Oger figure avec son surnom classique dans le Roland et le
Plerinage. La confusion d'Oger avec le prince lombard Adelchis et la collo-
cation de Castelfort en Toscane ne sont pas aussi bien établies que d'autres
hypothèses. On peut encore se demander si le combat d'Oger contre
Brehier est imité de celui d'Olivier contre Fierabras ou si ce n'est pas
l'inverse, etc. Il y aurait aussi quelques données de fait à ajouter à celles
qu'a rassemblées l'auteur, bien que son information soit en général aussi
complète qu'exacte. On ne peut que souhaiter qu'il étende aux suites du
poème publié par Barrois, comme il semble disposé à le faire, son investi-
gation pénétrante et circonspecte,
Ricerche sulla leggenda di Uggeri il Danese in Francia, dal professore Rodolfo
Revier. Torino, 1891, in-4, 73 p. (extrait des Memorie della R. Accademia
di Torino, ser, 11, t. XLI). — Ce mémoire ne fait pas double emploi
avec celui de M. Voretzch dont il vient d'être parlé. Passant rapide-
ment sur les origines et le substratum historique de la légende d'Oger,
M. R. s'attache surtout à étudier les divers poëmes français (ct franco”
italiens} dans leur contenu et leurs rapports. Il a ainsi appelé l'attention sur
plusieurs points qui n'avaient pas été encore regardés d'aussi près; il
repousse d'ailleurs avec modestie la prétention de vouloir apporter « de
grandes nouveautés » ; les matériaux dont il disposait étaient trop incom-
plers. Nous signalerons surtout ce qu'il dit du poème décasyllabique rimé,
autre que celui d'Adenet, qui a servi de base au poème en alexandrins du
xive siècle, source du roman en prose, ct son analÿse de ces deux derniers.
Les remarques sur la source des romances espagnoles sont aussi dignes de
toute attention. P. 33, M. R. relève une inexactitude que j'aurais commise
en disant qu'Alori était de Mayence, mais je ne parlais à l'endroit cité (Hist.
., p. 167) que du poème franco-italien. Il aurait dû faire remarquer
. 71)que le poème néerlandais ne contient pas encore les aventures d'Oger
en fucrie. Le passage du roman en prose cité (p. 62, n. 3) comme une interpo-
lation du prosateur est emprunté textuellement à Huon de Bordeaux. Le valet
de pique est encore aujourd'hui appelé Oger dans nos jeux de cartes (p. 2).
Dans les textes français que M. Renier a imprimés d'après les mss., on
peut faire quelques légères corrections ; ainsi p. 45, I, 5 (et 46, II, 6),
anierissoit, 1. amerrissoit; 46, 11, 7, et plusieurs autres fois ensui, L. eusin;
9, licoit, 1. Ioît, — G. P.
Lieutenant Gaëtan Hgco, La Ballade et ses dérivés : chant royal, chanson
royale, serventois, pastourelle et sotte-chanson. Bruxelles, 1891, in-Bo,
41 p. (extrait des Annales de la Savisté d'archéologie de Bruxelles, vol. V). —
Écrit d'amateur.
Le Dit de la Rose von Christine von Pisan… (von) Ferdinand HEUCKEUKAMP.
CHRONIQUE 139
Halle, 189, in-8e, 20 p. (cette brochure est une Finladungsschrift de
M. H. à son Aniritis-Vorlesung sur « le refrain dans l'ancienne chanson
populaire française », faite à Halle, le 22 octobre 1891). — L'édition du
Dit de la Rose est faite d'après le ms. fr. 604, que M. H. croit unique; il
en existe un second, le ms. fr. 12779, et M. Roy les a utilisés tous deux
pour l'édition de ce petit poème qui fait partie du second volume des
Œuvres poitiques de Christine (Societé des anciens texkes), qui va incessamment
paraître : on ne voit pas bien l'utilité d'imprimer à part un ouvrage dont la
publication prochaine était assurée dans un recueil général. L'édition est
d'ailleurs bien faite, et les remarques qui précèdent le texte sont judicicuses.
Une représentation fgurée du lai d'Aristole, pat A. Héron. Rouen, Lestrit
gant, in-4e, 14 p. et une planche. — Jolie sculpture sur bois du xve siècle,
qui s'ajoute aux représentations du même sujet dont M. H. a donné
ailleurs l'énumération (voy. Rom., XI, 139).
Untersuchung über deu Verfasser der alifranésischn Dichtung Willem von
England. Von Rudolf MüLLER. Bonn, 1891, in-8e, 121 p. (diss. de docteur).
— Ce travail, d'un élève de M. Forster, aboutit, comme le faisait prévoir
ce que le maltre avait écrit sur ce sujet, à présenter comme indubitable
l'identité du Chrestien, auteur de Guillaume d'Angleterre, et de Crestien de
Troies. La démonstration s'étend à la phonétique, à la rime et au style;
elle doit être complétée par une étude du vocabulaire ct de la phraséologie
proprement dite. Elle parait faite avec soin ; toutefois, avant d'en regarder
le résultat comme acquis, il convient d'attendre un examen contradictoire.
Ucher Consonanten-Assimilation im Franzësischen…. von Ferdinand GUTHEIM.
Heidelberg, Siebert, 1891, in-8, 98 p. (thèse de docteur de Berne). —
L'auteur de cette dissertation a choisi un sujet trop étendu pour ses forces
et pour les éléments dont il disposait ; aussi n'a-t-il pu le traiter que super-
ficiellement, malgré une intelligence incontestable et une connaissance assez
étendue des travaux antérieurs. Il ne s'agissait, en ctfet, de rien de moins
que de l'histoire phonétique de toutes les combinaisons de consonnes en
français, M. G. aurait avec plus de profit approfondi un chapitre de cette
histoire. 11 nous donne, en guise d'introduction, quelques idées générales
sur l'assimilation, dont plusieurs sont assez contestables, et traite ensuite
les différents groupes de consonnes, sans distinguer les dialectes ni même
toujours (quoiqu'il y tâche) les mots héréditaires des mots empruntés :
c'est ainsi qu'il veut nous prouver (p. 91) que mn donne mn avant la
toniqueen citant dame, indemniser et solemnel (plus danz, dont l'a s'explique
naturellement tout autrement). Son information n’est pas toujours suffi-
sante ; ainsi, pour s devant une consonni n'a nullement étudié l'article
de la Romania sur le livre de Kritz. 11 commet même des erreurs surpre-
nantes, comme quand il tire directement (p. 83) frcindre de fremere,
sans paraître soupçonner l'existence de friembre. Il tombe dans des confu-
sions non moins singulières, comme à la p. 34, où il cite pêle-méle, pour
prouver que sf donne 55, ostium uis, angustus (!) ungoissos et besta
140 CHRONIQUE
bisse (lequel n'a pu venir, et encore, que de bestia); à la p. 69, où il
range dpre parmi les mots savants à cause de la conservation de pr; à la
p. 62, où l'histoire de -1gnum (et non -ignum) est faite sans aucun dis-
cernemnt ; à la p. 74, où les conditions de la production de 3 après » ou /
sont complètement méconnues (qu'est-ce que le lambda donné à la p. 49
pour étymologie à lande ?). Malgré ces graves défauts, le mémoire de M. G.
n'est pas sans mérite; il groupe beaucoup de faits et les met parfois
en bonne lumière ; il sera utile, et le serait encore plus si l’auteur y avait
joint un index ou au moins une table,
Le Mystère de la Passion, texte du manuscrit de la bibliothèque d'Arras, publié
par Jules-Marie RicaRD. Arras, imprimerie de la Société du Pas-de-
Calais, gr. in-8, xxxvI-296 p. — Le mystère de la Passion d'Arras,
signalé depuis longtemps, méritait d'être imprimé, comme étant sans doute
antérieur à celui d'Arnoul Greban et ayant par conséquent une réelle
importance dans l'histoire du drame religieux. Il comprend près de
25000 vers, et se fait remarquer, en général, par un style simple et une
allure grave. M. Richard, en s'imposant le travail de cette longue publica-
tion, s'est acquis la reconnaissance des savants, qui lui pardonneront sans
peine les quelques preuves d'inexpérience pour lesquelles il demande lui-
même l'indulgence avec beaucoup de bonne grâce. Une judicieuse intro-
duction et un glossaire suffisant complètent ce volume vraiment méritoire.
Ucber die frangsischen Gralromane, von Richard Heizer. Wien, 1891, in-4°.
196 p. (Denkschr. der Kaïserl. Akademie, B. x, 111). — Nous nous bornons
pour le moment à mentionner ce long et très important mémoire, où
l'auteur applique à tous les romans français concernant le Graal sa critique
à la fois hardie et minutieuse. Il renouvelle, sur tous les points qu'il aborde,
l'état de la question ; c'est aux recherches futures de décider si les résultats
qu'il obtient doivent tous être considérés comme acquis à la science.
Étude linguistique sur Jacques de Hemricourt et son époque, par Georges
Dourreroxr. Bruxelles, in-8, 92 p. (extrait du tome XLV des Mémoires
couronnés et autres Mémoires publiés par l'Académie royale de Belgique). —
Les deux ouvrages de J. de Hemricourt (fin du xive s.) sont conservés dans
un ms. du xve siècle qui présente un tel mélange de graphies françaises et
locales que M. Doutrepont ne pouvait y trouver la base d’une étude vrai-
ment complète du parler de Liège à cette époque. Il en a tiré tous les ren-
scignements qu'ils pouvaient fournir et Les a complétés par l'étude de textes
contemporains et du patois moderne. Il y a beaucoup de détails contes-
tbles dans son travail, mais l'ensemble est louable et utile. On appréciera
particulièrement l'esquisse des traits caractéristiques du wallon par laquelle
il se termine.
Zur Geschichte der Hergmäre. Von Hermann Para, Berlin, Gaeriner, 1891,
in-49, 22 p. (programme de Pâques du Friddrichs-Grmnasium). — M. Patig
étudie les formes occidentales du conte du Cœur mangé, en le rapprochant
des versions récemment recueillies dans l'Inde (voy. Romania, XVII, 456).
CHRONIQUE 141
Il pense, avec raison suivant moi, que cette histoire est venue d'Orient en
Europe. Son classement des versions européennes, appuyé sur cette ide, dif-
fère assez de celui que j'ai autrefois essayé (Hist. li. de la France, XXII,
377) ; il serait à examiner de près. L'auteur montre dans cetravail du savoir
et de la pénétration; mais il se livre à des rapprochements étymologiques
fort aventureux. — G. P.
Quietus in Romanischen, von Hermann Sucmier, 1891, in-8o, $ p. (pp. 71-
75 des Commentation?s Waælffinianue). — M. Suchier, frappé du double sort
si différent de quietus quietare en roman (d'une part quetus quetare
avec d caduc en français, d'autre part quitus quitare avec { stable en
français), explique Les formes v. it. quito, hisp. quito, prov. quiti, fr. quite,
it. quitare, hisp. quitar, prov. quitar, fr. quitier, par l'hypothèse que le
mot, qui n'a cette forme que comme terme de droit, aurait passé par
la bouche des Germains, d'où les Gallo-Romans du Nord l'auraient
repris (les mots provençaux, italiens et hispaniques viendraient du fran-
çais). Cette explication est fort ingénieuse, mais elle n'est pas sans
difficultés et elle ne paraît pas nécessaire. D'une part, en effet, on ne voit
pas comment le { de l'allemand quit n'aurait pas, étant isolé à la finale,
été amolli plus tard, et il paraît peu vraisemblable que les Romans, ayant
fourni aux Francs le terme de droit quetus, l'aient aussitôt repris avec la
forme que lui donnaient ceux-ci; d'autre part, quoi qu'en dise M. S., il
est difficile de séparer le traitement de quietare >> quitier de celui de
pietatem >> pitié, et les deux cas doivent recevoir la même explication
(quite avec son « final se dénonce comme un adjectif verbal tiré de quitier,
voy. Rom., VIII, 448), et enfin regarder enquitume .: inquietudinem
comme ayant subi l'influence de quite, qui a, comme M. S. le constate, un
sens tout particulier, est un expédient peu satisfaisant, Pour moi, quietare
comme terme de droit a gardé une forme différente de celle qu'avait
prise quetus dans La langue courante, et quitier (comme d'ailleurs pitié)
est entré plus récemment dans le parler vulgaire. Notons encore que
M. S. reconnait le latin qu(i)escere dans le v. fr. queissir, dont il trouve
un exemple dans la vie inédite de sainte Modwenne; mais je ne connais
pas de cas analogues, et je regarderais plus volontiers queissir comme
refait sur queï, d'après le même type (encore assez mal expliqué) que nous
avons dans wercir, chancir, etc. I] ÿ a encore dans ces quelques pages plus
d'une remarque neuve et pénétrante. G.P.
Le roman en prose de Tristan, le roman de Palamède ét la compilation de Rusticien
de Pise. Analyse critique d'après les manuscrits de Paris par E. Loseri.
Paris, Bouillon, 1891, in-$e xxvI-534 p. — Après avoir donné de l'im-
mense roman de Tristan, qui avait jusqu'à présent rebuté les patiences les
plus endurcies, une analyse admirablement consciencieuse, dans laquelle il
suit les ambages souvent incohérentes et communique les variantes des
diverses rédactions et sous-rédactions, M. Lôseth n'a pas trouvé qu'il en
eût fait assez : il a donné en appendice l'analyse, d'après les manuscrits, du
142 CHRONIQUE
roman de Palamède, il est vrai dans des proportions plus raccourcies, et
celle de la compilation de Rusticien de Pise. Il a joint à cet énorme travail
une courte et modeste introduction, et une table analytique des noms
propres qui ne remplit pas moins de 96 colonnes et sur l'utilité de laquelle
il n'est pas besoin d'insister. Il n'est pas possible d'imaginer un travail plus
méritoire, plus désintéressé, qui profite plus à ceux qui s'en servent et qui
récompense moins celui qui l'exécute : il ne lui permet même jamais de
mettre en relief son intelligence et son jugement, et'il exige qu'il les exerce
perpétuellement avec une attention toujours présente. La reconnaissance
que tous les savants qui s'occupent de ces questions voueront certainement
4 M. Loseth sera due surtout à l'ennui dont il les dispense et qu'il a tout
entier assumé. Grâce à lui, on va pouvoir se rendre compte de la place du
‘Tristan dans l'histoire des romans en prose et en soumettre à la critique
qu'ils appellent les passages vraiment caractéristiques; c'est un véritable
service rendu à un des chapitres les plus obscurs de notre histoire littéraire.
Le style de la Iprique courtoise en France aux XIIe et XII siècles, par Hyacinthe
Biner. Paris, Bouillon, 1891, in-8, 108 fr. — Ce travail quelque peu
mécanique peut avoir une certaine utilité, et les « conclusions » par
lesquelles l'auteur termine ses dépouillements montrent qu'il est capable
de réflexions judicieuses. Mais ce qui manque à son ouvrage pour avoir
une véritable valeur, c'est d'une part la délimitation de ce qui est propre
au style de la « lyrique courtoise » et à celui de la poésie française en
général, et d'autre part la recherche des origines de ce style, notimment
dans la lyrique provençale.
Philologische Abhandlungen Heinrich Schuvizer-Sidller qur Feier des fünfsigjäbrigen
Jubiliums séiner Docententhätigkeit an der Zürcher Universität, geridmet von
der L. Section der philosopbischen Facultät der Hochschule Zürich, Zürich, 1891,
in-49, 79 p. — Des six mémoires que contient cette Fistschrifl, trois inté-
ressent la philologie romane. P. 1-14, À. Tobler, Alrine Beitrâge qur fran-
xésischen Grammatik ; ce sont deux études, faites avec la finesse d'analyse
qu'on connait, sur des façons de parler familières du français moderne
Gone, ans), un recueil d'exemples d' « association asyndétique de
us dessous, etc.), et un complément au
mémoire indiqué plus haut sur l'emploi du conditionnel. — P. 13-24,
W. Meyer-Lübke, Uéher à und à im Lateinischen. L'auteur cherche à trouver
les lois de la distribution en latin d'une même voyelle originaire entre à et
ü: il s'appuie souvent sur le roman ou y renvoie (où se trouve l'anc. fr.
busne :büccina?). P. 24-26. mamphur. Ce mot qu'on ne connaît que par
l'abréviateur de Festus a été assigné par M. Bugge (Rom. III, 154) comme
smologie au fr. mandrin, M. M.-L, pense qu'il faut 1h
termes opposés » (de ci de là, de
mamphar, équivalant à manfar, et retrouve ce mot dans différents dia-
lectes italiens: mais manfar n°
mandar, dont un dérivé
qu'on ne trouve aucune trace de manda
ait que la forme osque d'un latin
se continue dans le fr. mundrin. IL est ficheux
num dans le bas-latin ni de
CHRONIQUE 143
manderin (au moins à notre connaissance) en ancien français ; mandrin
n'apparaît qu'au xvie siècle. — P. 71-79, H. Morf, Tulti etre. M. Morf
montre, de la façon la plus convaincante, que la forme originaire est futta
re, où futta est un pluriel neutre, et présente des observations très intéres-
santes sur l'emploi en roman du neutre sing. ou plur. d'adjectifs avec
fonction « adnominale ».
Dictionnaire topographique du département de la Marne, comprenant les noms de
lieux anciens et modernes, rédigé par M. Auguste LoNGxON. Paris, impr.
nat. 1891. In-4, Lxxxvi-380 pages, — La collection des dictionnaires
topographiques, inaugurée il y a trente ans par le dictionnaire d'Eure-et-
Loir, et formant actuellement vingt et un volumes : vient de s'enrichir de
deux dictionnaires parus presque en même temps, celui de la Drôme et
celui de la Mare. Du premier, nous n'avons rien à dire : les observations
qu'il pourrait nous suggérer nous feraient sortir du cadre des études propres
à la Romania. jous signalons le second à l'attention de nos lecteurs,
c'est parce que l'auteur a consacré la première partie de son introduction à
un sujet qu'il possède à fond et qui intéresse de près la linguistique
romane : l'étude des noms de lieux du département de la Marne considérés
dans leurs origines. M. L. passe en revue: 1e les noms de lieux d'origine
gauloise ; 26 ceux d'origine « gauloise ou gallo-romaine » (cetintitulé estun
peu vague); 3° ceux d'origine romaine ; 4° ceux d'origine germanique ou
gallo-franque ; 5° et 6° ceux d'origine romane (ordre civil et ordre ccclé-
siastique) ; 7° ceux d'origine française. Dans cette très intéressante étude
de la nomenclature toponymique du département de la Marne, M. L. (qui
a sans doute ses raisons pour limiter ainsi ses recherches) ne prend en
considération que les noms de communes. Il laisse de côté les localités qui
n'ont pas leur maire et leur conseil municipal. Il est superflu de dire que
l'étude de M. Longnon a une portée générale, puisque un grand nombre
des noms de lieux qu'il étudie se retrouvent en d’autres départements.
Chronique d'Arthur de Richemont, connétable de France, duc de Bretagne (1393-
1458), par Guillaume GRuEz, publiée par la Société ‘de l'histoire de
France, par Ach. LE VAVASSEUR. Paris, Renouard, 1890, in-8v, xc-313
pages. — Cette chronique, en très grande partie originale, a plus de valeur
historigne que de mérite littéraire. Les diverses éditions qu’on en possé-
dait sont des reproductions plus ou moins altérées de l'édition princeps
donnée en 1622 par Th. Godefroy, ou même de la seconde édition, où le
txte est arbitrairement modifié, donnée par le fils de celui-ci, Denys
Godefroy. L'édition de M. Le Vavasseur présente un texte beaucoup plus
correct, qui a été fourni essentiellement par un ms. de Nantes jusqu'ici
non utilisé, L'éditeur établit d'une manière satisfaisante le classement des
r. Aisne, H.-Alpes, Aube, Calvados, Dordogne, Drôme, Eure,
Hérault, Marne, Mayenne, Meurthe, Meuse, Morbihan, Moselle,
H.-Rhin, Vienne, Yonne,
ureret-Loir, Gard,
èvre, B.-Pyrénées,
144 CHRONIQUE
divers mss.; il joint au texte un commentaire historique qui nous a paru
bien conçu, et publie en appendice quelques documents qui complètent
la chronique sur certains points. La préface est intéressante et traîte avec
compétence de la vie de l'auteur et des questions diverses que soulève la
chronique. Nous aurions voulu que l'éditeur eût donné plus de variantes
et eût réparti entre deux séries de notes l'appareil critique et le commen-
taire historique.
Beatrice nella vita e nella poesia del sæcolo XIII, studio di Isidoro DEL LUXGo,
con appendice di documenti ed altre illustrazioni. Milano, Hoepfi, 1891.
pet. in-Bo, 174 pages. — Cet élégant petit livre renferme d'abord une
nouvelle édition revue ct corrigée d'un essai sur la Béatrice de Dante
publié dans la Nuova Antolagia à l'occasion du sixième ‘centenaire de la
mort de Béatrice (19 juin 1290), et un riche appendice de documents se
rapportant à Folco Portinari ct en général au temps de la jeunesse de
Dante. M. del L. n'émet point de théorie nouvelle au sujet de Béatrice ;
il se borne à confirmer les idées admises par les gens de bon sens
depuis Boceace, Il faut espérer que désormais on ne doutra plus
de la réalité de la Béatrice de la Vita nuvru et de son identité avec la fille
de Folco Portinari. Le premier des documents publié est précisément le
testament de ce dernier (15 janv. 1287 anc. st.) où on lit cet article
Cp 113): « em domine Bici etiam filie sue, et uxori domini Simonis de
« Bardis, legavit de bonis suis libras .L. ad florenos. » A noter encore,
parmi les documents, ceux qui se rapportent à la chevauchée de 1285, poi
vant servir à faciliter l'intelligence d'un passage de la Pita nuora, et aussi
les extraits des livres commerciaux des Bardi (1336-1337) d’où il résulte que
ceux-ci étaient en relations d'affaires avec le père de Boccace.
Manet de paléxraphie. Recueil de fac: d'écriture du XIe au XVI siècle,
mannerits latins et français accompagnés de transcriptions par Maurice
Picard, 1892 (nov. 1891), in-4e. — Ce recueil, qui forme un
utile supplément au Manuel du mème auteur, se compose de doure
planches phototypiques avec transcription en regard. Elles ont été fournies
par des mss. à date certaine ou supposée telle, appartenant à peu près tous
à la Bibliothèque nationale. Il n'y a, à proprement parker, qu'un fac-similé
de ms. français (pl. V, n° 2, d'après le ms. Biblioth. nat. fr. 2092, de l'an
1317) 3 les autres spécimens français sont des chartes. Ce qui concerne la
pl. IL est à rec ilé de la dernière page du recueil des
sermons d'Eude de € final, qui à été publié ici-mêème
NIV, 390. se rapporte, non pas comme l'a cru M. P. au ms., mais à l'ou-
vrage. C'est le recueil de sermons qui à n 1219. et non le ms. qui
est postérieur.
+ BOUILLON
1 Protie frers, imprimeur.
LA CHASTELAINE DE VERGI
La Chastelaine de Vergi, poème charmant et délicat, un des
joyaux de la littérature française du moyen âge, compost dans
la seconde moitié du xu° siècle, a jusqu’à la fin du xvin siècle
conservé sa vogue en France et à l'étranger, sous des formes
multiples et souvent renouvelées. Aussi les manüscrits qui
contiennent dans sa forme originale ce petit roman en vers,
d’un auteur inconnu, sont-ils nombreux. Nous en connaissons
15, mais tous n’ont pas été utilisés pour cette édition", car
tous sont loin d’avoir la même valeur au point de vue de
l'établissement du texte primitif. Les manuscrits du xv* et du
xvr siècle présentent en effet une rédaction souvent remaniée
et rajeunie par les copistes qui, désireux d'offrir au public une
lecture facilement compréhensible, remplacent des expressions
anciennes par des mots nouveaux, et sont amenés par un
premier changement de rime À modifier aussi un second vers.
C'est ainsi que dans presque tous les manuscrits de cette
époque, la dame de Vergi devient la dume du Vergier sous la plume
de gens qui n’avaient jamais entendu parler de la châtellenie de
Vergi en Bourgogne.
Nous avons donc systématiquement laissé de côté pour cette
édition les manuscrits des xv° et xvi* siècles, ayant acquis la
certitude, après les avoir étudiés et comparés aux autres, qu’ils
ne pouvaient nous être d'aucune utilité, et nous n'avons
conservé pour établir notre texte que les manuscrits du x et
du xiv* siècle.
1. La première édition de la Chastelaine de Vergi a été donnée, en 1808,
par Méon (Fabliaux et Conkes, t. IV, p. 296-326), d'après trois mss. de la
Bibliothèque nationale : fr. 375 (anc. 6987), 837 (anc. 7218) et 25545 (anc.
Notre-Dame 274 bis, antérieurement N. 2).
Bari, XXL. : 10
146 G. RAYNAUD
Ces manuscrits, au nombre de huit, qui ne sont pas
susceptibles d’un classement rigoureux, sont désignés par les
lettres suivantes :
A. — Paris, Bibl. nat. fr. 375 (anc. 6987), vélin, dessins coloriés, 1288,
fol. 331 vo à 333 ve. — Incipit : De le castdaine de Vergi. — Explicit de la
castelaine de Vergi. — Ce ms. utilisé par Méon à été décrit par Paulin Paris:
et par d'autres; il est le seul qui soit daté d’une façon exacte. Il se rapproche
parfois du ms. C, base de notre édition (vv. 517-518); mais il s'en éloigne
souvent aussi (vv. 639-640, 859-860, etc.) et ne peut régulièrement consti-
tuer avec lui une famille.
B. — Berlin, Bibliothèque royale, Hamilton 257, vélin, fin du xmme siècle,
fol. 37e à 42 b. — L'incipit manque. — Explicit. — Ce ms. décrit par nous ?,
offre des ressemblances intermittentes avec le ms. D et surtout le ms. G
(uv. 517-520, 865-866); par contre, il s'en écarte aux vers 639-640 et
859-860. Nous en devons la copie à l'obligeance de M. Eugène Wolter, de
Berlin.
C.— Paris, Bibl. nat. fr. 837 (anc. 7218), vélin, fin du xure siècle,
fol. 65 à 11 a. — L'incipit manque. — A la fin : Explicit la chastelaine de
Vergi. — Ce ms., utilisé par Méon et décrit par P. Paris 1, a servi de base
à notre nouvelle édition. Voy. plus haut A.
D. — Paris, Bibl. nat. fr. 155$ (anc. 7595 +), vélin, xive siècle, fol. 82 vo
à 96 vo. — Incipit : Cy commenche la chastellaine du Vergier. — Explicit
Cy fine là chastellaine du Vergier. — Ce ms., que nous aurions négligé
d'employer s'il n'appartenait au xive siècle, offre un texte rajeuni et très
souvent fautif. Voy. plus haut B.
Æ. -- Paris, Bibl. nat. fr. 2136 (anc. 7973), vélin, miniatures, xive siècle,
fol. 139 r° à 152 ve. — L'incipit manque. — Explicit la chastelaine de Vergi.
— On remarque dans ce ms , qui a des airs de parenté assez étroite avec 4
et F (wv. 639-640, 765-766, 865-866), une lacune de 60 vers (vv. 415-474)
de l'arrachement d'un feuillet.
— Paris, Bibl. nat. nouv. acq. fr. 4531, vélin, miniatures, com-
mencement du xive siècle, fol. 88 b à 94 d. — Incipit: De la chastelainne
de Vergy. — Explicit la chastelainne de Vergy. — Ce ms., nouvellement acquis
par la Bibliothèque nationale, a été signalé par M. G. Paris +; il se rattache à
plusieurs mss, du xvie siècle que nous avons laissés de côté, ‘et présente une
particularité graphique intéressante : le e place en effet à la tonique
aprés i ou oi un € adventice : lie pour li, article féminin (vv. 36, 290, 329,
1. Les manuscrits françois de la Bibliothèque du Roi, NT (1840), 188-238.
2. Romania, XII (1883), 209-229.
3 Les mss. fr, VI (1815), 404-416.
4. Romania, XIX (1890), 106, et Histoire littéraire, KXXI, 518;
L. Delisle, Manuscrits latins et français ajoutés aux fonds des nouvelles ac
LA CHASTELAINE DE VERGI 147
569, 741), avoier pour avoir (v. 79), giese pour gise (v. 93), voier pour voir
Ce: 252), giest pour gist (v. 838), liet pour lit (uv. 728, 730, 864, 874).
G.— Paris, Bibl. nat. Moreau 1719, copie du xvine siècle, fol. 221-250. —
Incipit : Ci commence le conte de la chasteleine de Vergi. — L'explicit manque.
— Cette copie d'un ms. de la fin du xure siècle ou du commencement
du xive, appartenant au marquis de La Clayette !, a été faite pour Sainte-
Palaye; elle représente un texte assez mauvais. Voy. plus haut B.
H. — Paris, Bibl. nat. fr. 25545 (anc. Notre Dame 274 bis, antérieure
ment N. 2), vélin, xmne siècle, fol. 84 a à 89 c. — Incipit : Ci commence de la
chastelaine de Vergi qui moru pour loialement amer son ami. — Explicit de la
chustelaine, etc, (comme à l'incipit). — Ce ms. a servi de base principale au
texte de Méon ; ses leçons sont généralement bonnes et ont quelques points
communs avec E (wv. 399-400, 5 17-520).
Les manuscrits des xv* et xvie siècles que nous n’avons pas
employés pour notre édition sont au nombre de sept : trois
appartiennent à la Bibliothèque nationale, un à la bibliothèque
de Valenciennes, un autre se trouve À Genève, un autre à
Hambourg, un dernier à Oxford.
10, — Paris, Bibl. nat. fr. 780 (anc. 71883), papier, lin du xve siècle, fol.
97 re à 110 ve. — L'incipit manque. — Explicit le romant de la chastelaine du
Vergier. — Ce ms., décrit par P. Paris*, mal relié autrefois, a d'assez
nombreuses lacunes, une entre autres de 64 vers au commencement; il se
rapproche d’une part.du ms. Æ et de l’autre du ms. fr. 2236 de la Bibl. nat.
(ci-après 20), du ms. F (voy. plus haut) et du ms. de Genève (voyez plus
bas 5e), avec lesquels il a une fin commune (4 vers ajoutés) ; il a aussi des
points de contact avec le ms. d'Oxford (voy. plus bas 70).
20, — Paris, Bibl. nt. fr 2236 (anc. 8011 1), papier, xve siècle, fol. 71 ro
à g2 re. — L'incipit manque. — Explicit : Ci finist le romans de la chatelaine
de Vergi. — Ce ms., très proche parent du ms. de Hambourg (voyez plus
bas 6), se rattache aussi aux mss. Æ, F'et au ms. fr. 780. Au vers 292, on
lit La leçon :
Com le chevalier de Cousi.
30.— Paris, Bibl. nat. fr. 15219 (anc. supplément fr. 738), papier,
xvre siècle, fol. 77 r° à 93 re. — L'incipit manque. — Explicit la belle dame
du Vergier chastellaine. — Ce ms., qui présente de mauvaises leçons et des
te La Bibliothèque nationale] pendant les années 1875-1891, inventaire alphabétique
(891), partie I, p. 13-14.
1. Voy. P. Meyer, Notice sur deux anciens manuscrits français ayant appar-
tenu au marquis de La Clawette, Noticss et extraits des manuscrits, XXNIIL,
15e partie, (1890), 9-87.
2. Les mis. fr, NI, 152-157.
LA CHASTELAINE DE VERGI 149
les wv. 930-938, ont une rédaction toute différente de celle des autres mss.
La fin manque à partir du vers 942.
— Oxford, Bibliothèque Bodlcienne, ms. 445 (anc. F. 3. 19), papier,
milieu ou fin du xve siècle, fol. 142 re à 158. — Incipit : Cy commence le rom-
mant de la chastelaine du Vergy. — Explicit en vers :
Cy fine ung precieux rommans
Qui est de deux loyaulx amans,
C'est de la dame du Vergier
Et d'un beau gentily chevalier.
Nous avons découvert ce ms. caché sous une faute de lecture au n° 2386
du catalogue de la Bodleienne de Bernard ! : « Romance de la chaste dame du
Vergier. » Grâce à l'obligeance de MM. W. Macray ct Paul Meyer, nous pouvons
le comparer aux autres manuscrits de la Chastelaine de Vergi et constater qu'il
a quelques rapports avec le ms. D et surtout avec le ms. fr. 780 (vv. 953-954
passés). Ce ms. ajoute à la fin ces 4 vers :
Or prions pour les deux amans
Et pour les autres bonnes gens,
Que Dieu nous vueille tous aidier
Et nous garde tous d'encombrier,
qu'il fait suivre des 4 vers d'explicit transcrits plus haut.
Il
L'analyse? de la Chastelaine de Vergi ne peut donner qu’une
faible idée du charme de ce petit poème ; elle est toutefois néces-
saire pour permettre de comparer avec l'original les imitations
nombreuses qui en sont nées. La scène se passe en Bourgogne,
alternativement au château de Vergi?, demeure de l’héroïne,
et dans un château du duc de Bourgogne, très voisin du
premier, sans doute le château d’Argilly+. Les personnages sont
le duc et la duchesse de Bourgogne qui ne sont pas nommés, la
1. Catalogi lbrorum manuscripiorum Angliæ et Hiberne in unum collecti
(Oxford, 1697).
2. Une analyse en a déjà été faite dans l'Histoire littéraire, XVIII (1835),
779-786.
3- Aujourd'hui Vergy, Côte d'Or, commune de Reulle, canton de Gevrey.
— Sur le château de Vergy, voy. E. Petit, Histoire das ducs de Bourgogne de la
race capétienne, 111 (1889), 2-4.
4. Aujourd’hui Côte-d'Or, canton de Nuits.
LA CHASTELAINE DE VERGI 151
qu’elle aimait et qui, connaissant seul leur secret, a seul pu le
révéler. Elle se laisse aller ainsi à exhaler ses plaintes touchantes
et meurt en croyant son amant coupable.
Le chevalier, inquiet de ne plus la voir, la cherche, la trouve
enfin, et, devant le corps de sa maitresse, apprenant les propos
perfides de la duchesse, il se tue, se punissant d’un crime qu'il
n'avait pu empêcher. Le duc est prévenu de ce qui s’est passé : il
accourt furieux de la conduite infime de la duchesse et la tuc.
Bientôt, tourmenté par le remords, il se croise et part pour la
Terre Sainte, où il prend l’habit de Templier : depuis on ne
l'a plus revu.
Ainsi finit le roman de la Chastelaine de Vergi, « qui mourut
pour loyaulment aimer son ami ». On peut s’en rendre compte
par ce rapide résumé, l'intrigue de ce petit roman est des plus
simples ; le style en est sobre et d’une langue facile. Mais ce dont
il faut surtout louer le poète inconnu, c’est d’avoir su nuancer
les caractères de ses personnages et exprimer excellemment
leurs diverses passions, l’amour si profond, si tendre et si délicat
de la châtelaine, l'attitude loyale et chevaleresque de son amant,
la droiture, la noblesse et aussi, on peut bien le dire, la faiblesse
du duc, enfin la jalousie féroce et vive, la haine implacable de
la duchesse. Avec quel art cette femme obtient du duc le secret
des deux amants! Comme elle varie ses moyens d'attaque en
protestant de son amour pour son mari! Et dans les regrets de
la châtelaine mourante, quelle finesse de pensée, quel sacrifice
complet de sa personne, quelle ardeur de sentiments! Les
auteurs modernes n’offrent rien de supérieur à ce délicieux
roman, comme analyse du cœur humain et comme étude de
psychologie amoureuse.
ll
Le côté littéraire n’est pas le seul intéressant dans la Chaste-
laine de Vergi. Ce poème présente, en effet, un élément histo-
rique, qui mérite d’être signalé : les personnages que nous y
voyons figurer ont existé réellement, et les détails que nous
connaissons de la vie de trois d’entre eux concordent, sauf en
un ou deux points, avec les faits exposés dans le roman, qui
devient ainsi un véritable roman & clef.
LA CHASTELAINE DE VERGI 155
Signalons aussi les rimes diroie et vraie (vv. 133-134), deloi et soi
(v. 267-268); l’imparfait amot (v. 146), rimant avec pot, est
d'ordinaire attribué au dialecte picard, ainsi que la persistance
du { dans le participe mentit (v. 496).
IV
Si le roman de la Chastelaine de Vergi n’eût été que le récit
plus ou moins poétique et plus ou moins dramatique d’une
aventure bien connue à la cour de Bourgogne, sa vogue n'aurait
guère survécu aux personnages qui y sont mis en scène. Mais
l’histoire en elle-mème était si attachante, l’intérèt purement
littéraire en était si grand que, pendant plus de deux siècles, la
Chastelaine de Vergi fut lue et relue par plusieurs générations de
lecteurs, heureux de trouver dans ce petit roman le charme et
l'émotion, plutôt que la vérité historique.
Cette vogue, nous en avons la preuve dans les nombreux
manuscrits qui, de la fin du xmr° siècle jusqu’au xvi° siècle,
reproduisent le poème", et en remanient et modifient le texte
au profit de lecteurs de plus en plus éloignés de l'original ; elle
nous est aussi attestée par les allusions fréquentes que les écri-
vains font à la châtelaine de Vergi et à son chevalier, comparés
d’ordinaire aux autres couples d’amants fidèles: : le châtelain de
Coucy et la dame de Fayel, Tristan et Yseut, etc.
Froissart place successivement la châtelaine de Vergi dans son
Paradis d'amour :
I y sont Tristams et Yseus.…
Et des dames y est Helainne
Et de Vregi la chastelainne,
et dans sa Prison amoureuse :
Qu'en avint Tristan et Yseus
Qui furent si vrai amoureus ;
Le castellainne de Vregi ;
1. Voy. plus haut le paragraphe relatif aux manuscrits.
2. Fr. Michel dans ses Chansons du chdtelain de Coucy (1830; p. KXXII-XXXV),
a réuni quelques exemples où figure la châtelaine de Vergi.
3. Œuvres de Froissart, Poésies, p. p. A. Scheler, 1 (1870), 30, 217.
LA CHASTELAINE DE VERGI 15
Et du Vergy la tresbelle assouvie
Chastellaine, qui de riens n'ot envie
Fors de cellui a qui avoit plevic
Amour loyale ;
Mais elle et lui orent souldée male
5 Par trop amer, car mort en jeurent pale :
Si ont fait maint et en chambre et en sale
A grant doulour * !
Martin Le Franc, dans son Champion des dames, ne se
contente pas d’une citation; c’est une analyse tout entière qu’il
donne de notre roman. Nous reproduisons les deux strophes,
bien qu’elles aient déjà été publiées dans la Romania?, mais
nous croyons utile de présenter un tableau d'ensemble des
allusions à la châtelaine de Vergi dans la littérature du moyen
âge :
S
Que diray je du chevallier Seulement par le chienne duit
Qui tant amoit couvertement Le temps et l'eure congnissoit,
La chastelaine du Vergier ? Et n'avoit aultre saufconduit
Fait on riens tant secretement Quant il y entroit ou yssoit.
Que fausse Envye appertement Envie qui contrepensoit
Ne congnoisse, die et descelle ? Neantmains tout le fait accusa,
Je l'ay apris, Dieu scet comment, Et congnut on que vraÿ estoit
Entre envyeux rien ne se celle. Quant une mort les encusa.
Enfin dans une rédaction du Livre des secrels aux philosophes,
que veut bien nous signaler M. G. Paris, et dont le ms. ? appar-
tient à la fin du xv* siècle, nous voyons le sire de Coucy donné
comme amant à la châtelaine de Vergi :
Ramembre toy, dit Tymeo à Placidès, de la femme au roy Pharaon qui se
plaindy de Joseph et le fist emprisonner pour tant que il ne vouloit en sa
compaigaie habiter, et du sire de Coucy, amy a la chastellaine de Vergy,
contre La duchesse, et de plusieurs autres.
Outre ces passages d'écrivains des xiv® er xv° siècles, il nous
faut mentionner une version en prose de la Chastelaine de Vergi,
1. Œuvres poétiques de Christine de Pisan, p. p. Maurice Roy pour la Saciété
des anciens textes français, I (1891), 72.
2. T. XVI (1887), 403, d'après le ms. fr. 12476 de la Bibl. nat., fol. 71 c.
3- Bibl. nat. fr. 212, fol. 142 c. — Un autre ms. bien plus ancien (Bibl.
nat. fr. 19958), déjà signalé comme tout différent du premier (Histoire litté-
raire, XXX, 570), ne contient pas ce passage.
LA CHASTELAINE DE VERGI 167
Ce dient tuit, la Dieu merci : D'amer dame si souveraine,
Si avriez bien deservi 80 Se je bien i metoie paine.
D'avoir amie en si haut leu — Si estes, » fet el, « se devient:
64 Qu'en eussiez honor et preu, Mainte plus grant merveille avient
Que bien vous serroit tele amie. Et autele avendra encore.
— Ma dame, » fet il, « Je n'aimie 84 Dites moi se vous savez ore
Encore a ce mise m'entente. Se je vous ai m'amor donée,
68 — Par foi, » dist ele, « longue Qui sui haute dame honorée. »
fatente Et cil respont isnel le pas :
Vous porroit nuire, ce m'est vis : 88 « Ma dame, je ne le sai pas;
Si lo que vous soiez amis Ms je voudroie vostre amor
En .1. haut leu, se vous veer Avoir par bien et par honor.
72 Que vous i soiez bien amez. » Més de cele amor Dieus me gart
Cil respont : « Ma dame, par foi, 92 Qu'a moi n'a vous tort cele part
Je ne sai mie bien por qoi Ou la honte mon seignor gise,
Vous le dites ne que ce monte, Qu'a nul fuer ne a nule guise
76 Ne je ne sui ne duc ne conte N'en prendroie tel mesprison
Que si hautement amer doie; 96 Com de fere tel desreson
Ne je ne sui mie a .n. doie Si vilaine et si desloial
61 D et dieu m. — 62 4, C, E, G aucriez; D'aurez. — 63 D amour. —
64 B Qui. D et grant (preu manque). — 65 B, E, H Car. D Et bien vous
venist de la moie. — 66 B Dame fet elle. D Ma dame fait il ie noseroie. —
67 D Car ie ny ay point mis. — 68 4, B, D, E, F fait ele, — 69 D ce mest
auis; G a mon auis. — 72 D Que bien ame vous y soies. — 75 4, B, D, E,
G Ce me dites ; F Cen dites. 4, B, E na quoi; D, Fne a quoy. — 76 B M
D Car; E, F, G Que. 4, B, D, F, G ne rois ne c. D répète deux vers qui
figurent déjà plus baut (v. 67-68) :
Et sy n'i ay point mis m'entente.
— Par foi, » fait elle, « longue atente…
77 D, E, FQui.—78 Ejen. 4, Cnen. Genla voie. — 79 D, G Dauoir amor;
F Dauoier amour. — 80 D-mectroie ma p. — 81 B, F Sire. E si estes. D
elle se dieu mament. H se sauient; G sil auient. — 82 D Maint greingneur.
grant manque dans B. — 84 F, G que vous sauez ore. D Sy me dictez se
sauois ore. — 85 D Que. — 86 D sÿ haulte. D, E, F, G clamee. — 88 F
ce ne sai ie pas. — 90 G bien et par mon amor. — g1 D Mes dieus de tel
ar. ; E Mes dautre am. ihesus; F Et deus de cele am.; G Mes dieux de cele
am. — 92 E Quamors ne nous tourt; F Qua moy ne vous tort; H Que ia
aul or tour. D tourne tel p. — 94 À Quen; G A. 4, E ne en. — 95 D, E Ne
feroie; G, H Ne prandroïe. D tele traison; F, H tel desraison. — 96 D
Comment. 4 Comme de f. d. B, E, F, G, H Comme de f. traison. — 97 et
manque dans E. G, H ne si.
174 G. RAYNAUD
Por l'angoisse qu'il se porchace, 324 Je ne sai que je doie dire
Et li descent aval la face, Ne que je puisse devenir,
Si qu'il en a le vis moillié. Més je voudroie mieus morir
312 Li dus n'en a pas le cuer lié, Que perdre ce que je perdroie,
Qui pensse qu'il i a tel chose 328 Se le voir dit vous en avoie,
Que reconnoistre ne li ose. Et il estoit de Li seu
Lors dist li dus isnel le pas : Que l’eusse reconneu
316 « Bien voi que ne vous fier pas À jor qui fust a mon vivant! »
En moi tant com vous devriez. 332 Lors dist li dus : « Je vous creant
Cuidiez vous, se vous me disiez Seur le cors et l'ame de moi
Votre conseil celéement, Et sor l'amor et sor la foi
320 Que jel deisse a nule gent ? Que je vous doi sor vostre hont-
Je me leroie avant sanz faute [mage,
Trere les denz l'un avant l'autre. 336 Que ja en trestout mon eage
— Ha! fetcil, « por Dieu merci, N'en ert a creature née
[sire, Par moi novele racontée
309 H Pour la doulor. F con li p.; G qui sep. D, E Du courrous quil [D il]
ne set quil face. — 309-310 intervertis dans F. — 310 À, D Si. E deuale. À
jusquen. — 311 G Si que le vis en a m.; H Si que il ot le vis m. B Et quant
li dus lot aguetie. D, E, F Quant li dus en tel point le voit, — 311-312 man-
quent dans 4. — 312 D, E Et que si (D quainsi] parfont; F Et que si forment.
D, E, Fsouspiroit. B Si en ot au cuer grant pitie; G Li dus le voit sen a pitie.
— 313 À Li dus quide que soit; B, G Quil entent quil i a; D, £, F Lors (FSi]
cuide quil ait. — 315 G Lors list. — 316 D vous ne vous f. — 317 À, E comme
d. D, F, H deussies. — 318 vous mangue dans G. À, B se me disiez ; D, F, H
se me deissiez; E se me dit mauiez. — 319. À, E, H priuement. — 320 B,
D, F, G Que le d.— 321 D le me lauoie. B enceis s. f. — 322 D, E, H
apres. F lune auant. B une auant autre. — j23, 4, B, G Ha [B He] sire fait
dl merci sire; Æ, F Ha pour dieu fait il biau dous [F merci fait cil] sire; H
Ha sire fait cis quest plains dire. — 325 4, E doie d. — 326 D iameroie. —
327 ie manque dans B; F gy p. — 328 B dire vos voloie; D dit ie vous au
Æ Car se le voir vous en disoie. — 329 4 Que sil; B, C Quar sil. D delle s.
F Et que il fust de lie s. — 330 D Que ie leusse, — 331 4, B, E, G, H À
rien [E Pour riens; H Au jor] qui soit el mont [H en mon] viuant; F À
nule rien qui fust v. D qui soit a mon vivant. D ajoute après ce vers :
Je mourroie sinschois avant.
332 F Et. D ajoute après ce vers :
Et vous jur(e) par tel couvenant.
333 F sus. Det sur. G seur lame. — 334 F Et sus.
iay receu, F de votre h.— 336 D a iour de mon zage.
Dsera; G est. — 338 E Parole nule r. B, F, G parole r.
sus. — 335 D que
357 B, F, H iert:
LA CHASTELAINE DE VERGI
Ke samblant fet grant ne petit. »
340 Et dil en plorant li a dit :
ire, jel vous dirai ainsi;
175
Lors li a toutes acontées
356 Ses venues et ses alées,
Et la couvenance premiere,
J'aim vostre niece de Vergi, Et du petit chien la maniere.
Et ele moi, tant c'on puet plus. Lorsdist lidus : « Je vous requier
344 — Or me dites donc, »fet li dus, 360 Que a vostre terme premier
« Quant vous volez con vous en Vueilliezque vostre compainssoie
fcuevre, D'aler o vous en ceste voie,
Savoit nus fors vous dui ceste Quar je vueil savoir sanz aloingne
Loevre? » 364 Se ainsi va vostre besoingne :
Et li chevaliers l respont : Si n'en savra ma niece rien.
348 « Nenil, creature del mont. » — Sire, » fet il, « je l’otroi bien,
Et dist li dus : « Ce n'avint 368 Mès qu'il ne vous griet ne anuit;
fonques: Et sachiez bien g'irai anuit. »
Comment i avenez vous donques, Et li dus dist qu'il i ira,
Ne comment savez lieu ne tens ?
352 — Par foi, sire, » fet cl, « par sens
Que je vous dirai, sanz riens tere,
Quant tant savez de nostreafere. »
Que ja ne li anuiera,
Ainz li sera solaz et geu.
372 Entr'aus ont devisé le leu
Ou assembleront tout a pis.
340 G lia dit en pl. — 341 Fie; G etie le. B de di. D Sire fait il ie vous
diray. — 342 F du v. D laime v. n. pour vray. — 343 D quelle p. plus.
— 344 B fet dont; E, H fait ce. — 345 B, G Quant si volez; E Se vous
vole; F Puis que voler. B que len v. c.; D, G que on v. c.; E que vous en
eroie; F que vous en c. — 346 4, D, E, Set nus fors; B Set ia nus fors. 4
ke vous. E ceste joie. — 349 À Et fait; D Lors dit. E il rauint. G Fait soi li
duz ce ne puet estre. — 350 B, D Et [D Et mangue] comment y alles vous d.
Ci aueniez v. d.; E à auenistes d.; F y alies v. d. G Comment pouez auec
lui estre. G ajoute :
Et dist li dus : « Ce n'avint onc.
351 F Comment sauiez. B, D, G c. auer. — 352 4, E fait il sire ; B fet cil
sire; D, F. G sire fet il. — 353 4, D, H le le. sanz mangue dans D. F sanz
plus. C fere. — 354 tout mangue dans G. — 355 E racontes ; H racontees.
— 356. À Leur v. et leur 2.; B, D, E, F Les (D Et les] v. et les a. —
359 F Cen dist, — 360 F Que vostre termine pr. — 361 D compaignon.
— 362 B celle v.—363 4, B, E, G Que. B, D, E, Hesloingne. — 363-364
manquent dans F. — 365 D Et ma niepce nen saura rien, — 366 H Et cil
respont. F distil. D, F, G ie le voil bien. — 367 E que ne. Dne nenuit; F ni
anuit, — 368 A jou irai. D Sachiez que y iray enuit. — 369 E, F, H que il
ira; Ge ï irai. — 370 4, B, E, FNe ia; D Et que ia. G Et ia ne li ennuie-
rai. — 372 4, G Entre eus .n. deuisent ; E Aus .n. ont d. — 373 D, FOu
il ass. a pie [D tout a p.].
LA CHASTELAINE DE VERGI 177
D'estre o vous sicomme ore isui Que ditIi ot a menterresse,
Trestoz jors puis que je n'i fui. » Et mout li plest. Or voit il bien
le redist : « Mon douz seignor, 428 Que cil ne li a mesfet rien
412 Mes douz amis, ma douce amor, De ce que il l'a mescreu.
Onques puis ne fu jor ne eure Ilueques s'est issi tenu
Que ne m'anuiast la demeure ; Toute la nuit endementiers
Més ore de riens ne me dueil, 432 Que la dame et li chevaliers
416 Car j'ai o moi ce que je vucil, Dedenz lachambre enr. Hit furent
Quant si estes sains et haitiez, Etsanz dormir ensemble jurent
Et L trés bien venuz soiez! »
Et cil dist: « Et vous bientrovéel» 436 Q'il n’est resons que nus recort
420 Tout oi li dus a l'entrée, Ne ne le die ne ne l'oie,
Qui mout près d'aus apoiez fu ; * S'il n'atent 2 avoir tel joie
Sa niece a la voiz bien connu, Que amors aus fins amanz done,
Si bien, et a la contenance, 440 Quant sa peine reguerredone ;
424 Que il est or fors de doutance, Quar cil qui tel joie n'atent,
Et si tient de ce la duchesse S'il l'ooit or, riens n'i entent
409 4, B si comme ie sui. D, F ouec vous si con or [Die] sui. i mangue
dans G. E Destre auoeques vous en requoi. — 409-410 intervertis dans F. —
410 B Trestot lors puis; H Despuis lore. B ne {. F ne vous vi. À Car pieca
auoec vous ne f; D Et plus souuent que ie ne dy; F Mout me tourne
ore a grant anoi. — 411 F Celle. D, E li dist; H respont. G Et ele dist. —
413 E Onques ne fu ne; H Ains puis ne fu ne. — 414 D demouree. —
415 G Mais ore ne me duel de rien. — 415-474 manquent dans E (feuillet
déchiré). — 4168, F, G Quant. D Quant ie tieng quanque ie veul. G quanque
ie ain. — 417 4 Et vous estes. D Quant sy sains estes et chaities. — 418 À, F
Que li. — 419 D Et vous soiez la ; H Cis dit et vous la. — 420 D Tout ce. —
421B Et; D Quar. 4 Dela cambre si pres estoit ; F, H Qui fasses pres dileuc
estoit [H sestut]. — 422 G Et sa n. a la v. c. 4, F connoissoit; Ba connu.
— 423 F Mout b. À counissance, — 424 À, D, G, H Que il est [D fut] tout
hors. B Car il estoit hors, F Quor en est il hors. — 425 D Et ce tint. —
425-426 manquent dans F. — 425-430 manquent dans D. — 426 À Queli ot
dit. — 427 F quor voit il bien. — 429 4. B, F, G dont il la [B, F a] m. —
430 F, HIlleuc. 4, G, H ainsi. F ensiques t. H maintenus. — 433 B, F,
G ensemble f. D iurent. — 434 4, G Qui. B, F, Gen .i. liti. D furent. —
435 D Ent. i. et en t. — 436 D Que par r. ne p.r.; F Que nest r. q. le r. —
437 B, C Ne ne la. À Con le die ne que on loïe; D En cent ans dire ne le pour-
roie ; F Ne nus ne lentende ne noie. —438 D Qui. a mangue dans D. À, B Sil
pen atent auoir ; H Se il natent auoir.— 439 B, F, G, H Comme am. a f.—
440 F, H Quant lor p. lorg. 4, B,G lig.; D lor g. — 441 G Que cilque. Ben
atent; Di. atent. — 441-446 manquent dans F. — 442 À Se il looit rien ne;
B Sil loit pour nient ; D Sil est compter et rien ; G Sil oit ce et rien nen.
Bis, XXL. 12
LA CHASTELAINE DE VERGI 179
484 Or cele dont il ert partiz,
À cui il samble por la nuit
Que failli ait a son deduit,
Ne du jor ne se loe point.
488 Li chevaliers ert en tel point
Et de penssée et de parole,
Quant li dus l'ataint, si l’acole
Et li a fet joie mout grant,
492 Puis li a dit : « Je vous creant
Que tozjors mès vous amerai
Ne jamès jor ne vous harrai,
Quar vous m'avez du tout voir
Cait
496 Et ne m'avez de mot mentit.
Que cest conseil celer vous plaise,
500 Qu'amor perdroie et joie et aise
Et morroie sanz nule faute,
Se je savoie que nul autre
Ice savroit fors vous sanz plus.
504 — Orn'en parlez ja, » fet li dus ;
« Sachiez qu'il ert si bien celé
Que ja par moi n'en ert parlé. »
Ainsi s’en sont parlant venu
508 La dont il estoient meu.
Et cel jor quant vint au mengier,
Moustra li dus au chevalier
Plus biausamblant qu'ainz n'avoit
— Sire, » fet cl, « vostre mercil ait,
Mës por Dieu vous requier et pri 512 Dont tel corouz et tel deshait
484 4 De; D Est; E Fu. D, H ilest; E estoit. il manque dans G. —
485 D y semble que; Fil sembla. — 486 D Quelle aist failli. G Qui si tost
faut pert son deduit. — 487 Bloer; D, H looit. — 488 4, E, H ch. en itel
p. G en cel p. — 489 À Est de p. et de p. ; E Estoit et p. et p. — 492 4 Si;
G Et. B Et dit li a. D tout maintenant. F Et li dit ie vous acreant. Après ce
tvrs E ajoute :
Sur le cors et l'ame de moi
Ek sur l'amor et sur La foi.
493 D A. t. — 494 4, B, D, E, G ne vous mescrerrai. — 495 4, B,E, F, G
Que; D Car. F du tout voir mauer d. 4 maues voir dit de tout. — 496 B
Et ne mauez de rien m. ; D Ce dont vous auoie en despit; G Et de rien ne
maues m.; E, F, H Et la duchesse ma m.— 497 F, H faitil; F dist il.
A, E, F, H pour dieu merci. D Mais la duchesse ma mentit. — 498 À Et.
H Par amour, D Syre fait il pour dieu merchy ; Æ le vous requier et ie vous
pri; F Et pour ses sainz vous quier et pri. — 499 E, G ce; H cel. — 500 D
Ou ie. et manque dans B devant joie. G Quan or perdroie joie. — 501 D
Jameroie mieul. — $o2 B que se. — $o3 D le seust. 4, E, H sauoit; B,
F, G seust. — 504 D parles plus; F penses ia. H p. fait ce li dus. — 505 H
mout bien c. — 506 D, E Que iames non sera p. — $o7 H Atant. D Puis
sen sunt jouant venus. — 508 D Du lieu dont. F Au lieu dont il erent m.
— 509 4, G Et œ iour. D Et puis quant ce vint au disner, — $11 À quen
auoit fait; B quanc nauoit fet; D de la moitié; E, F, H quonques not fet.
— 512 4, B Ettel; E, H Mais tel. D Nonques mais ne fu si haitie. Après ce
vers D ajoute :
Que toux comptens et toux despis
Lay pardonns a celle nuis,
180 G. RAYNAUD
En ot la duchoise sanz fable 520 Et lavé et bien festoié,
Qu'ele se leva de la table Si l'est tantost alez veoir
Et a fet samblant par faintise Et la fist sus son lit seoir,
516 Que maladie li soit prise Et à commandé que nului
Alée est couchier en son lit 524 Ne remaingne leenz fors lui.
Ou ele ot petit de delit. L'en fet tantost ce qu'il com-
Et li dus, quant il ot mengié [mande.
513 H faille. D Et tel doeul oust la duchesse sans faille. — 514 D Que
tantost se 1. G sen 1. — 515 D, E Et fist grant (D grant mg] s. ; G Et fet s.
tot p. £. — 516 D leut souprinse. — 517-518 manquent dans À et C. — $17-
520 remplacés dans B par les vers suivants dont le dernier au moins est de trop :
21. vallet a de sa mesnie,
LI. de ceus ou el plus se fe ;
Par cel [le] dire au duc
Quant il ot, si n'en ot pas joie :
Par cel l'a d'iluec envoié,
Etli dus quant il ot mengié
Et lavé et bien essuyé..…..
dans D par les suivants :
En sa chambre s'ala gesir
Et si se fist mout bien couvr(c}ir
Comment) se malade forment fust,
Ex bien voult que le duc le seust
Que maladie lui fust prinse.
Mais ce faisoit el(le) par faintise.
Un vallet ust de sa mesgnie,
Un de çoux ou [el] plus se fe :
Pour ce dire au duc [el] l'envoie
Afin quel (plus) certainement croie.
Ex le due, quant il ust disné,
Sy s'est de la table levé.
et dans G par les suivants, dont les quatre premiers se trouvent déjà dans D :
En sa chambre s'ala gesir
Et se fist autresi covrir
‘ Com se forment malade fust,
Et bien vout que li dus seust
Que prise li fust maladie.
Un valet a de sa menie
Pour ce dire au duc envoié.
Et li dus, quant il ot mengié.
518 E, F mout poi de d. de manque dans H. — $20 À Et bien 1. et {.:
E, F, H La gent deduit et f. — 521 Si manque dans G. À, E, F, H Si va la
duch. v.; D Et est tantost alle sauoir. — 522 Æ Et va desus; H Et la fait
sor; G Elle le fist. Bsor; F en. D Quelle maladie elle peust auoir. — 523 D,
G EX si commande; H Puis a c.— 524 E Ne soit en la chambre que
525 4, G En; 8 On. 4, B ft errant; F fist errant; G fet aitant.
LA CHASTELAINE DE VERGI 181
Et li dus errant li demande — Ha, » fet li dus, « ma douce
Comment cist maus li est venu famie,
528 Et que cæ est qu'ele a eu. Sachiez je n'en croiroie mie
Ele respont : « Se Dieus me gart, Ne vous ne autre creature
Je ne m'en donoie regart 544 Que onques por nule aventure
Orains, quant au mengier m'assis, Avenist ce que vous me dites ;
532 Que greignor sens et plus d'avis Ainz sai bien qu'il en est toz
N'eust en vous que je m'i vi, quites,
Quant vous tenez plus chier celui N'onques ne penssa de ce fere,
Que je vous ai dit qui porchace 548 Tant ai apris de son afere :
536 Qu'il a moi honte et despit face; Si ne m'en enquerez ja plus. »
Et quant vi que plus biau sam-
[blant Atant se part d'iluec li dus;
Li feistes que de devant, Et ele remest mout penssive
Si grant duel et si grant ire oi 552 Que jamès jor que ele vive
540 Qu'ilueques demourer ne poi. Unc eure a aise ne sera
526 4, B, G tantost E d.; D present li d. — 527 À cius; B cest; E ce;
G él. F Dont cest mal li estoit v. — 528 B que a eu. F fu quelle out
eu. — 529 E Sire fait el; G Et elle respont. — 530 D, H me. — 531 4, B,
D, E, H Ores. 4, G mengier assis, — 532 E ne plus. C damis. — 533 4
Eust; C, E, G Nauer. B, D, E nc vi; G ni truis. Ce vers dans G est suivi
de celui-ci :
Si ai eu si grauz ennuis.
534 D Qui tenez, — 535 F quil p.; G que p. D plus cache. — 536
Æ que a vous; H que a moi. D Que de moi son plaisir £; F, G
Comment honte et despit vous f. — 538 D Vous lui faictes. D que par-
deuant; B,C, F plus que d. E puisque d. ; G hui que d.— 539 H Si grant d.
B et tel ire en oi ; H si grant ire en ou. D le us tel doeul ut sy grant ire; G
Si grant ire et tel duel en oi. — 540 À Que illoec; E Iluec plus; H Car
illeuc. — 541 D Quil est ainsy demoure syre; F Ay dist li duz douce amie.
— 542 4 Certes; D Certain ; E Sachiez. 4, E, Fie ne. — $44 À, B, D, F
par n. — 545 C voust. — 546 B que toz en est quites. D Car je say bien
quil en est q. — 547 À not pense. H Onques ne pensa a ce f. — 547-548
manquent dans F. — 549 À Si que ne men eng. plus; B Si ne vous enq.
ia pl; D Et si ne men parlez nen plus; E Et seur ce ne menq. pl.; F Si ne
men parler des or pl.; H Et si ne men eng. pl.— 550 À, B Atant dilec;
H Atant sem part. 4, B se part. D A ce mot sest parti li dus. — 551 4, B,
D, E, F Et cele. 4, B, D, G remaint; 4, E, F, H si p.; B plus p.;
D toute p. — 552 E Quele iames. 4, B tant com el soit v.; D tant quelle
soit v.; E tant com soit v.; G, H tant com el v. — $53 D, F, H Un iour;
Æ Nule heure. 2 mangue dans G.
LA CHASTELAINE DE VERGI 185
Et de l'issue et de l'entrée Por itant, ce li est avis,
656 Li a la verité contée, Qu'il ne vout estre ses amis.
Si qu'il ne Ka riens teu Si afferme tout son porpens
Qu'il i ait oi ne veu. 676 Que, s’ele voit ne lieu ne tens
Et quant la duchoise l'entent Qu'a la niece le duc parolt,
660 Que cil aime plus bassement Qu'ele li dira ausi tost,
Qui de s’amor l'a escondite, Ne ja ne celera tel chose
Morte se tient et a despite, 680 Ou felonie avra enclose.
Mës ainc de ce samblant ne fist, Mës ainc en point n’en lieu n'en
664 Ainçois otroia et promist [vint
Au duc a si celer ceste oevre Tant qu'a la Pentecouste vint
Que se c'est qu'ele le descuevre, Qui après fu, a la premiere,
Que il la pende a une hart. 684 Que li dus tint cort out pleniere,
Si qu'il envoia par tout querre
668 Et si li est il ja mout tart Toutes les dames de la terre
D'a celi parler qu'ele het Et sa niece tout premeraine
Dès icele heure qu'ele set 688 Qui de Vergi ert chastelaine.
Que ele est amie a celui Et quant la duchoise la vit,
672 Qui H fet et honte et anui Tantost toz li sans li fremist,
657 4, D Si quil ni a de [D de mangue]. t.; E, H Que nuler. ni at. —
658 4, D, E, H Quel ait; B Quil eust. — 659 D Quant. D ce entent; Bd.
entent. — 660 4, D, E Que il. — 661 D Quant; E, Et. — 661-662 inter-
vertis dans D. — 662 D, G A morte se tient et [D et a] despite. B se rent.
— 663 4, H, ains; D, E, F, G onc. E, F, Hnen. — 664 4, B, D, E,F,H
Aïos otria. À, B, D'tout; E, H mout; F bien. — 665 4 a descouurir; D, E
de bien celer; Fa bien celer ; H celer si bien. 4, B, D cele. G ou eure. —
666 4, E Que sainsi est quel la desc.; B, H Que sil set quele len (H se]
desc.; D Car se dentreux deux desc.; F Que sil auient quel le desc, — 667
F Que len. — 668 C, G Et se. H Si li estoit il. D estoit ia. — 669 4, D De
celi parler; F Qua cele parle; H Da cele parler. B, E De parler a cele quel
het. — 670 D Tres. D voit. = 671 À, E Quele estoit; B Que cele estoit.
— 672 E Quil. 4, D, E, F, Gki a fet.— 673 H Pour tant celi estoit a. E se
li est ore. — 674 B, F veut. — 676 E sauoit lieu ne tens. F Que sele vient
en lieu nen t. — 677 G Que. D, G au duc. D puisse veoir. — 678 E assez
tost. D Qui lui dira tout son plaisir. — 679 D Quer. — 680 D Quant. B
soit; D y 2. H Ne plus vient en son cuer enclose. — 681 B Mes se en p. ne
ne l. nen v.; F Mes onc en p. nen 1. nen v.; G Mes en 1. nen p. nen v.; H
Maisains en Î. nen p. nenv. 4 vient.— 682 4, C, D,E, F, HTant que; BEt
quant; 4, B vient. — 683 D Qua prins sa part. Bet la pr.; G toute la pr. À,
E, F Que ce fu la feste premiere. — 684 D Les beles dames. G, H sa. F Les
dames de toute sa terre. — 687 D Sa niepce vint la pr.; E Sa niece toute pr.;
GEX s. n. vint toute premiere. — 688 D du vergier: F du vergi. E fu ch.;
G estoit ch. — 690 F le cors, D Le coeur eu ventre.
LA CHASTELAINE DE VERGI 189
Estre morte o lui me fust mieus Et a celui qui a son tort
Que vivre si que de mes ieus M'a trahie et livrée a mort
Ne le veisse nule foiz. Doinst honor, et je li pardon ;
808 Hal fine amor, est ce donc droiz 828 Ne ma mort n'est se douce non,
Que il a ainsi descouvert Ce m'est avis, quant de lui vient ;
Nostre conseil, dont il me pert? Et quant de s’amor me sovient,
Qu'a m'amor otroier li dis Por lui morir ne m'est pas paine. »
812 Et bien en couvenant li mis
Que a cele eure me perdroit 832 À tant se tut la chastelaine
Que nostre amor descovreroit. Fors qu'ele dist en souspirant
Et quant j'ai avant perdu lui, « Douz amis, a Dieu vous com-
816 Ne puis après itel anui, [mant! »
Que sanz lui por qui je me dueil A cest mot de ses braz s'estraint,
Ne puis vivre ne je ne vueil; 836 Li cuers |i faut, li vis li taint :
De ma vie ne me plest point, Angoisseusement s'est pasmée,
820 Ainz pri Dieu que la mor me Et gist pale et descolorée
[doinst, En mi le lit, morte sanz vie.
Et que, tout ausi vraiement 840 Mès ses amis ne le set mie,
Com je ai amé leaument Qui se deduisoit en la sale
Celui qui ce m'a porchacié, À la carole et dansse et bale ;
824 Ait de l'ame de moi pitié, Mës ne li plest riens qu'il i voie,
805 4, B, D, E, G, H Questre. D sy me. F Morte o lui vousisse estre
m. — 808 E He. G est il. — 809 B Que il iert; F Que cil a; G Qui lia.
— Bio D Nostre amour. À tout en apert. — 812 G au couuenant. — 813 D
Qua icele. — 815 B ie auant perdi L — 816 D un tel .; F si grant a. G
viure apres tel ennui. B Ne pris gueres nul tel ami. — 817 D Quer sanz lui ;
H Sans celui. À por coi. F Viure sanz li pour qui me d. — 817-818 manguent
dans G. — 818 B Ne quier viure; D Plus viure ainsy; F Ne ie ne quier. —
821 E ainsi. B Et tot ausi veroiement. — 822 4, B, E, F, G Commc iai
[B lai]. D Que ie lamoie 1.;, H Com iai ame bien 1. G vraiement. — 823 À
ma ce p. — 824 E Ait hui dieus de mame p.; G Ait de la moie ame p. —
827 G car ie li p.— 828 À De ma mort nest; D La mort ne mest. À se doute
non; B se de li non ; G se douceur non. — 829 À Si. — 829-834 manquent
dans D. — 830 G que. — 831 B Pour qui. H met. — 832 E sestent. —
833 B Mes. H a dit. — 835 B, H A ces mos. D de ses beaulx bras. — 837
E Sest angousseusement ; H Angoissement est. G pense, — 838 D La g. F
morte et d. — 839 D Desur. B pales. v. Aprés ce vers B ajoute un vers isolé :
Amours l’out morte et maubaillie.
840 G ne cœ. — 841 D deduit en my. — 842 E Aus quaroles; G Où il
carole. 4, D, E, F, H ou d. et mangue devant bale dans E, G. — 843 D chose
quil v.4, B, E, F que il v.
LA CHASTELAINE DE VERGI 193
Et par cest example doit l'en Et li celers en toz poins vaut.
952 S'amor celer par si grant sen 96 Qui si le fait, ne crient assaut
C'on ait toz jors en remembrance Des faus felons enquerreors,
Que li descouvrirs riens n'avance Qui enquierent autrui amors.
952 D Celer samour ; F Samour garder. E en si bon sen. — 953 D Quens .
en ait; E Con dit; G Quan oit. H Que on ait t. r. — 954 À Que li racon-
ters; D Quer 1. d.; E Que li recorders; F Que li ramembrer. H Con ne la
perde par tel mescheance. Après ce vers H ajoute :
Que li descouvrirs rien ne vaut.
955 D lieux vaut. Après ce vers H ajoute :
En tous estas, soit bas, soit haut.
956 À Qui tout cou fait ; B Qui ce fet bien; D, H Queinsi le fait; E Et
qui ce f. G lasaut. — 958 4, B, E, H dautrui amours; D contre amoureux.
Après ce vers D ajoute :
Pour ce prion par bon memoire
Ycellui Dieu qui maint en gloire
Qu'il vuille lez deux amans maitre
Au jour du jugement a (sa) destre.
Amen |
F ajoute :
Cest fablel ci endroit deffine.
Or prion 2 Dieu qui ne fine
Qu'il ait de lor ames merci
EX des nostres tout autresi,
nl
G gjoute :
Pour nuire, c'antre preu m'i ont,
Naisance aufs] leiaus amans font
Dont un vers trop courtoisement
D'un son (ms. seul) poitevin les reprent.
200 A. NEUBAUER ET P. MEYER
segon 9 esteron 2$ res is
sir2 aisi 31 bregues 15
soplegues 16 test 39 sopleigues 16
son 17 prosest 40 Jugieus 21
ses 19 laissarai 42 lengas 37
salvet 47 aiso $7, 207 cors 63, 76
senbor 47 bacinas 92 metas 83
cent 48 . frances 328 digas 95
siutat 73 Los 339
Je dois faire remarquer qu’il n’y a point de consonnes redou-
blées dans le texte; j'ai écrit laissaraï, parce que c’est l’usage le
plus ordinaire, mais le texte donne Jaisarai. Si l’on examine ces
exemples, au point de vue de l’étymologie, on reconnaîtra que
partout ls reproduit une s latine, sauf dans cent (centum),
aisi, aiso (eccehic, eccehoc), et dans tengas, metas, digas,
cors, où s répond au #s du latin (finale -atis, curtes). On va
voir que plus ordinairement, c’est le tsadé qui est employé en
ce dernier cas.
Maintenant passons au tsadé.
INITIAL INTÉRIEUR FINAL
rt 41, 227 plassa 32 mandamenz 4
civada 103 balansa, 29 Lx 25, 29
celier 105 berdonansa 30 genolhont 25
cels 115 acerta 77 comlaz 48
serviren 115 aiso 160, 205 mialhr 66, 381
ciutadans 132 Fransa 324 cortx 68
cervel 159 Jrances 326 garni 87
50 204, 262, 379 messier 341 samit 88
cel 360, 395 carnacier 342 perdix 142
celava 393 dinatz 200
MENT 207
sent 208
totx 231
ex 234, 260
Dans les exemples des deux premières colonnes, le tsadé
représente à peu près constamment un c latin. A l’initiale, la
1. C'est ainsi encore que j'écris marrity avec deux r au v. 308, bien que
dans le texte ce mot n'ait qu'un seul resch, tout comme marits (maritos) du
v. précédent.
LE ROMAN PROVENÇAL D'ESTHER
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TRI 2 7 m VO ND 7
AIMTNR EN BINA DINO D
DITINOT VO JD TON AND
DUNTRENP D [2 WRNIKD Ve
215
Fort era tota de bon aire,
408Mes non avia paire ni maire,
Mes un sieu coxin germa
L'avia presa a sa ma.
Veron agesta damairela
© 412Qe era vèrges e piuzela.
De faiso fon mot polida,
Mas un pauc fon escolorida ;
Desobre totas fon plus bela.
416Prezeron La, van s'en amb el.
Anc[non] fon 1022 tant lausada,
En nom dal rei fon espozada.
Lo temps non vuelh que vos des-
[nembre :
420 Ela fon preza en derembre
Al tems que cas la neu el glas
E a tot om lo solas plas
Car am conpania pot jazer,
424L'un cors am l'autre pren plarer.
Qÿ vol molber adoncs la qcira;
Non qe[ijra ges de gran verqeira,
Ni non la bata ni la feira
428 E 2 nengun non fassa feira ;
Mantenga La, sie blanca © neira,
Entro aqel temps qe pon la neira,
E tot estiu sol se mantenga,
432Tro qe l'uvem o Lo freg venga.
Ester fon mesa enfre cambras.
Peseron Ihi de musc e d'ambra ;
Feson Ihi far bons onhemens
436E lavamenz e escuramens.
Abanz que lo rei la coronessa
« Q tant gent es ensenhada ?
— Senber, aiso non me demandes ;
444« E farias ben qe comandesses
LE ROMAN PROVENÇAL D’ESTHER 225
au printemps parait venir originairement de la fausse lettre d'Aristote à
Alexandre qui a été traduite en vers et en prose, tant en français qu’en pro-
vençal. Voir, par exemple, la version provençale en vers publiée par
M. Suchier, Denkmaler provenzalischer Literatur und Sprache, 1, 208, 209;
cf. pour le texte latin, ibid., 478, 479.
432 Raynouard, sous fvemn (III, 577) n'a pas enregistré la forme uuern,
actuellement conservée dans les Alpes, mais dont on a des exemples anciens
dans des textes de la Provence, notamment dans le Nouveau Testament du
ms. B. N. 2425 (par ex. Jo. x, 22). Gros Hiver, quartier de la commune de
Chateau-Ville-vieille, arr. de Briançon, est appelé Grossum huvernum dans
un document de 1373 (Roman, Dit. 1op. des H. Alpes).
434 Peseron Ihi est douteux : le second mot peut-être Li, lit.
435 Onhemens est une restitution conjecturale. Littéralement transcrit, le
texte porte apagoims.
436 Raynouard (I, 532) enregistre le verbe escurar, mais non le subst.
éscuramen, qui toutefois est relevé dans le dictionnaire de Mistral.
437 Que lo, lis. quel.
440 Délicada, corr. délgada?
444 Vers trop long et obscur ; corr. comandes ?
448 Le texte donne littéralement à srbalias. La correction d'i en 0 est insi-
gnifiante : il n'y a qu'à substituer un vav à un yod, et ces deux lettres se
ressemblent, mais cercarias (ou cercarias) me laisse beaucoup de doute.
GLOSSAIRE :
acampar 367. ast, em- 143 (note).
acertar, acerta 77. astas 99.
actdr}s 285. avol 283.
airat 247.
aire, de bon — 407. Bacinas 92.
aitina 53 (note), 83. Dadas, de- 386, 448.
alonx 26 (note). baile 80, 113.
amaestrat 275 balansa, estre en- 29.
amanovit 290 (note). balansar 220 (note).
amatinar, $ — 109. berlas 111 (note).
amb 23, 136, 416, am 136, 140, an 12. beure $3, beua 108, begron 157, begut
anar, auxiliaire, 168, 234, 365. 215.
asomat 7. biors 64 (note).
1. Je ne juge pas utile de donner le sens des mots ici relévés en ordre
alphabétique, tous ceux qui présentent quelque difficulté ayant été expliqués
dans les notes.
Romania, XXI. 15
226 A. NEUBAUER ET P. MEYER
Bolia ou bolida ? 102 (note).
borages 146 (note).
braias, portar las- 310 (note).
brea 306.
broët 139 (note).
brufols 145 (note).
burs 71 (note).
Caber, caupron 74.
cabrit 137.
cabrols 145.
cambries majors 183 (note).
camelina, salsa — 140 (note).
carre 284.
co 95 (note).
codons 155 (note).
collir, colgron ? 229 (note).
condela? 405 (note).
copde 360.
cort, lot — 212.
pola 229.
coginat 102 (note).
creissons 111 (note).
crenilhar, crenilba 284 (note).
Damaixela 411 (note).
decbar 166.
denfre 402 (note).
denomnar, denomnet 46.
desautit 206, 264.
desnembrar, desnenbre? 419 (note).
desportar, se desporta 188.
dissaple 345.
donxela 367, 394.
Ebraic 288.
gas 224, 238.
eguessa 261 (note).
encanonadas ? 154 (note).
encaras, voy. mal encaras.
encortinar, encortineron 110.
enfantina 384.
enfre 433.
enrabiat 171.
entort, pour entorn, 98.
entremes 147.
enubriar 168, 172.
envidar, envidet 164.
envit 289.
eruga 136 (note).
escolorida 414.
escondre, escondia 380.
escorre, escorregut 56 (note).
escudela 191.
escuramens 436 (note).
espelh penre — 298 (note).
estalvar, s'estaluet 35.
éstenir 232 (note).
estiu 431.
Faiso 413.
féira, far — 428 (note).
Jeraos ? 194.
front, aver — 334 (note).
“feixans, voy. gas.
Gabar, gabet 175 (note).
gai, gaias 309.
galias 7r.
gals feixans 147.
ganren 39.
gelaria 138 (note).
genolbonz, de — 25.
glas 421.
glexades 117.
gramages 277.
gratonia 137 (note).
Hart 131 (note).
Irnela 405.
Jogador ? 319.
Jostas 64.
LE ROMAN PROVENÇAL D’ESTHER
juruert 146 (note).
Lai 187 (note).
Hivreias 72 (note).
Lops 138 (note).
Mageslat 11 (note).
mal encaras 195 (note).
malenconi 241.
marritz 308.
mentretant? 248 (note).
mesquenela 404.
messier 341 (note).
méleus 293.
moisalas 90 (note).
morre 378 (note).
mortairols 133 (note).
mostarda 136.
mOUEr, MOVON 121, 174, MOC 395, mo=
£ron 401, mogui 236.
mujols 138 (note).
mur, MUXA 227.
Neira 430 (note).
neulas 153 (note).
Onbemens ? 435 (note).
orre 303, orra 199.
ort 190.
Pairols 97.
parliers 282.
past 144.
Pastura 103 (note).
pevilhons 89.
Pébrada 137.
pes, peyas 237.
peras 155.
Piment 153.
Piuxea 412.
bolit, polida 413 (note).
polpra 88.
ponba, metre- 213.
227
borestat (podestat?) 47 (note).
brosest ? 40 (note).
Reclos 125 (note).
redier, en — 151 (note).
régiment 13.
regirat 248.
renomar, renomada 313.
resposta 233.
riola 230.
ris 151.
riseas 318 (note).
roman, subst. 38; em — 290.
romieu 82.
Salvazinas 100.
samit 88.
selas traucadas 92.
seter, sec 130.
simple 109.
sonar, sonet 183.
sosjornar, sosjornessa 438, sosjornada
439.
soplegar, soplegues 16.
sumac 151 (note).
Tabussar 187 (note).
tal 303 (note), 370?
talbat 292.
tartas 147.
teira 129.
Leunes ? 318 (note).
toxa 417.
trompa 17, trompas 121.
Uvern 432 (note).
Van, vana 170.
verqueira 426.
veslidura 202.
vilonia 243 (note).
vont 398, von 111, 188.
CHRISTINE DE PISAN AND J. MAUNDEVILLE 231
Vi le saint sepalcre et baisay
Et La un pou me reposa
Je regarday comme il est fait
AA demi compas, et de fait
Le häuk et lé le mesuraÿ
Et encore la mesure ay. » (vv. 1261 f.)
« Et poez savoir qe, quant homme est 2 Jerusalern, fait le primer pilrinage
à l'esglise seint Sepalchre, q'est a dehors de La cité. Dedeins celle esglise en
my lieu y ad un tabernacle, auxi comme une petite maisoun.…. et est st
tabernacle fait en fourme de demy compas. Et en cco tabernacle, a la de
partie, est ly sepulere nostre Seignur. Et contient de long le taberacle
piez et de large. v. piez; et si ad le tabernacle .xj. piez de haut, Et n'i ad pas
long temps qe ly sépulcre estoit tot descovert, si qe l'em poait toucher et
baiser, Mes, pur ceo qe chescun qi y aloit se penoit de prendre de La iere ou
piece ou poudre, pur ceo l'ad ly soudan fait emmurer, si qe homme ne poct
toucher. » (Maundeville, ed. Warner, p. 38.)
Note that while Maundeville states that the Holy Sepulchre
is inaccessible, Christine claims to have entered and kissed it.
It will be observed that she again more than once in the course
of her narrative prides herself on having done or seen things,
which Maundeville says were especially difficult to do or sec,
she, of course, being supernaturally aided by the Sybil who was
her guide.
Christine next sees the site of Troy :
La fu Troie,
La cité de si grant renon;
Or n'y vois se ruine non,
Mais encor y pairent les raurs
Selon la mer haulz, longs et durs. (vv. 1296 #.)
EX pluis hal, vers le chief de cest bracz de meer[sc. de scint George], devers
la grant meer soloit estre la cité de Troie sur la rive del eawe, en mult beau
lieu et plain; mês la cité y piert poy, pur ceo q'il y ad si grant temps qe cl
fuist destruite, » (Maund., p. 8.)
She then comes to Cairo and the Nile :
Vi après la cité du Kaire,
Qui plus est grant qu'autres deux paire;
Vi le Nil qui croist et descroist,
- Vi le champ ou le basme croist,
Vi comment Babiloine siet
CHRISTINE DE PISAN AND J. MAUNDEVILLE 233
Homme qui ne porte son vivre
Sus chameux, nous tôut a delivre
Y passasmes sanz fin ne s0ÿ
Et sanz denier porter sus sy",
Ne nous y travaillasmes moult. (wv. 1331 .)
They ascend the mount and visit the monastery and church
of Saint Catherine, which Christine had made a special point
ot seeing (cf. vv. 1305-11) :
Et si montasmes sus le mont
Où il a moult belle abbaïe
Close, qu'el ne soit envaïe
De serpentine ou male beste.
La ot mainte lampe et maint cierge;
Si baisay le chief de la Vierge,
Et du propre abbé de l'uile oz
Qui yst de ses precieux os. (vv. 1342 M.)
Et est ly mont de Sinay appellez le desert Syne.… La y ad une abbeïe des
moignes bien fermez et tres bien encloscez as portz de fer pur paour des
beistes sauvages. La est l'esglise seint Katerine, ou il y ad mult des lampes
ardantr… Et ly prelait des moignes moustre les religes as pelrins, et d’un
instrument d'argent il frote l'os. Et si en ist un poy d’oile auxi come un suour.…
Et de ceo il donne un poy as pelrins; qar il nen ist mie grant quantité, Et il
moustre la teste seint Katerine. (M., p. 30.)
Passing on towards the East, unharmed by the crocodiles,
dragons, bears, lions, unicorns, elephants, etc. they meet (all
of which are mentioned by M., pp. 98, 147), they come to the
a Isle de Cathay * », with its wonderful riches, of which Maun-
deville gives a long description :
Toute passasmes Tartarie,
Et la grant terre de Surie,
Etla riche isle de Cathay
Ou vi moult, mais riens n'achetay,
1. €: they had no need of money to hire interpreters.
2. It appears that this expression « isle de Cathay » is peculiar to
Maundeville, who, as M° Warner remarks (p. xxVIn) « makes islands of
almost every country he names, not excluding even Cathay. » The fact that
Christine de Pisan employs the same expression is in itself almost proof
positive that she made use of Maundeville's book.
CHRISTINE DE PISAN AND J. MAUNDEVILLE 235
all of which are familiar to readers of Maundeville, she
comes to the « gode folk of the Yle of Bragman », i. e. the
Brahmans :
Je fus ou regne de Brachine,
Ou les gens sont bons par nature
Et ne font pechié ne laïdure. (vv. 1424 ff.)
Outre ceste isle y a une grant isle et bone ct pleintevouse, ou il y a des
bons gentz et loialx et de bone vie solonc lour creaunce et de bone fo... ils
sount pleins de toutes vertues, et si fyent vices et toutz malices et toutz
pecchez.… Et appelle homme celle isle l'ile de Bragmey. (M., p. 144.)
Next Christine sees the four rivers which flow out of the
Terrestrial Paradise :
Vi les quatre fleuves qui viennent
De paradis terrestre et tiennent
Grant pais et terre foison :
Le noble fleuve de Phison
Court par Inde, en lui sont trouvées
Precieuses et esprouvées
Pierres tout par la region:
Et puis le fleuve de Gion
Court par Ethiope et Egipte,
Armenie grant et petite;
“Tygris ne tient mendre pais,
Car par Persie court lais.
Ne Euffrates mains ne possede :
Armenie, Persic et Mede
Tient, ses flos me furent monstrez. (vv. 1429 Æ.)
Et el plus haut lieu de Paradys el droit my lieu est la fountaigne, q jette
les ii. fluvies qi courrent par diverses terrez. Dount li primer ad a noun
Phison ou Ganges, c'est tout un, et court par my Ynde ou Emlac; en la
quelle rivere y ad molt des preciouses pierres... et molt de gravell d'or. Et
l'autre rivere ad a noun Nilus ou Gyon, qi vayt par Ethiope et puis par
Egipte. Et l'autre ad a noun Tygris, qi court par Assirie et par Armenie la
grande. Ex l'autre ad a noun Eufrate, qi court auxi par Mede, par Armenie
t par Persye. (M, p. 150.)
She then proceeds to enumerate the high mountains of the
earth, among which she saw :
(1) Les grans montaignes d'Armenie
Ou l'arche Noë bien garnie
S'arresta après le deluge ;
CHRISTINE DE PISAN AND J. MAUNDEVILLÉ 239
plusours [devindrent] sourdez pur la noise del eawe…. si qe nul mortel ne
poet approcher (M., p. 151.)
Si est Paradis enclos tout entour d'un mur... et n'y ad qe un entré, q'est
close de feu ardant, si qe nuls hommes mortels ne purroient entrer.
CG, p. 150.)
At this point Christine’s obligations to Maundeville abruptly
terminate, her journey being no longer over the regions of
earth, but through the firmament of heaven, whence, like
Dante:, she looks down with contempt upon this world, which
she sees lying at her feet :
Comme une petite pelote,
Aussi ronde q'une balote (wv. 1699-1700).
{ Paget ToyNBEr.
t. Cf. Par, XXI, 134:
Vidi questo globo
Tal, ch' io soisi del suo vil sembiante,
NOUVELLES RECHERCHES SUR LE ROUMAIN DE L'ISTRIE 245
hixdä; pitsor, m.-roum. fäitior (de kitior). Deux mots font
exception à cette règle : Hliept (à côté de pieptu, Maior.)
(pectus), faptir (pecten). En meglen aussi, ce sont pré-
cisément ces mots qui ne se conforment pas à la règle
générale. Voy. Vlacho-Meglen, p. 16.
ProNOM, page 75.
Pron. pers. abs. conj. abs. conj.
Sg. N. jo 30 tu tu
Acc. mire me tire: te
D. a mie mii atsle ti
PLN. noi noi voi voi
Acc. noi ne voi ve
D. ani ne a voi ve
Sg.N. yem. je m. pa f. pa f.
Acc. ye lo Ja la = wo
D. a lui ii ae li
PLN. yei y pale Jgale
Acc. yei hi pale le
D. alor Hi lor alor Bi lor
Pron. réfléchi abs. sire; conj. D. Acc. se. On traduit « lui-
même » par äns.
Pron. rel. Agarle, kparça; pl. kçarlii, kçarle tie indécl.
Pron. interrog. fiire, qui; tie, que, ; Hiela t$e-i bur e kontenät,
celui qui est bon, est content. Hire terit-aw sgara? Qui est
venu hier soir ? {je va tfäïta om ? Que veut cet homme ?
Pron. poss. Les formes de M. G. sont justes, excepté le pl.
fém. meli, telï, au lieu de male, tale. Il faut ajouter se, sça;
pl. si, sçale, son. La périphrase au moyen de Jui est aussi
très usitée. Au lieu de meli, etc., on peut aussi dire ameli.
Voy. morceau 1 : ameli libri, amçale kjarte; morc. 11 : asé
fi, td5ta se fili; morc. mn : ku téela se miligar.
Le pron. poss. peut précéder le subst. sans article ou suivre
le subst. avec l’article. On peut donc dire : me frpate ou froa-
tele meu, mon frère; mçale surdr ou surdrile mgale, mes sœurs;
sor(a] sa ou a lui sora, ou enfin sora lu tiela, sa sœur.
Pron. dém. Sg. m. f. Häïta; pl. m. tiäïtla, f. tiäfle; # m.
Bela, £. ta; pl. m. ticia, f tiçale.
NOUVELLES RECHERCHES SUR LE ROUMAIN DE L'ISTRIE
Passons en revue les temps :
Inf. fase Gér. fatiendo.
Part. passé 1) fakut 2) fakaugait.
Prés. foak.
Imp. fakavçata.
Fut. 1 vor foatie Cond. 1 rças foatie
Fut. 11 vof foit fgatie Cond. 11 rças foët foate.
Subij. fut. fakur.
Parf. (Impf., Passé déf., Plus-pf.) faküit-am.
Plus-pf. fahauçait-am.
249
Les nombreux verbes en gaï n'ont qu’un seul part. passé;
par conséquent, ils manquent aussi du plus-que-parfait, c’est
ce qui a causé cette confusion entre le parfait et le plus-que-
parfait.
Passif. — On préfère la formation du passif avec f, être, à
celle avec le verbe réfléchi.
Ind. prés. Fi, esse
Impératif f Imparfait fyçata
säm
äs fiyén Subj. fut. Jusér
à, ei subj. fiye fiyéts Part. passé 1) foit
sän, àsmo 2) foçait
äte
äs
Vya, habere
Présent am É Imparfait vçaia
ai Part. passé 1) vut
gare, aw, a 2) vçait
arén
aréts
garu
SUBSTANTIF
I. masculins en #:
Sing. qan-u PL. gani-i an
lup-u lup-i loup
brek-u breki chien
bork-u borti-i porc
Frug-u Hrug-i rabot
250 r G. WEIGAND
tidu xd
soldgat-u soldgats-i
milifar-u millgarriri
hga-lu hgalti
vitse-lu vitseli-i
libru Bibri
pedukliu peduklii
Î. masculins en e:
frpate-le fryats-i
fole-le fol
II. féminins en a (ga) :
Roasça, hgasa; kgase-le
vgakga, voaka ; vake-le
a; tilele
sor-a ; suräre-le
ça, Stçawu ; Hçale-le
IV. fém.ence:
muliçare, muliçara; muliçare-le
blote, ploïa ; ploïe-le
V. neutres :
brats-u ; e-le
Suflet-u ; e-le
bäkfat-u ; e-le ou ts-i
pitiér-u; e-le
Jok-u ; uri-urle
värhu; uri-urle
mur
soldat
millier
cheval
veau
livre .«
pou
frère
outre, ventre
maison
vache
jour
sœur
étoile
femme
pluie
bras
âme
péché
pied
feu
montagne
On forme le gén. et dat. par /u; le voc. est semblable au
nom. avec l’article.
PRÉPOSITIONS
än Trst, à Trieste.
a koasça, Rgasa, à la maison.
za géspodar,, chez, pour le père.
la prewtu, chez le curé.
pre ga, à cheval ; hontenät pre ye, content de lui.
256
Yuwya hatsgala dn tielpate vrun sol-
dfat, uliidala-l. Tiuda ramfas-ow
morts de Talipanï. ipaple pani foït-am
An Tpalle, pok me lasÿat-auw kpasa. Foët
am a hgasça kvarnÿar zile. Foët-au pore
dem qan; mes-am yo la Pola än lukru
Basparski za prislufi vrun kraïtsr za
pomoë kpasa, neka mal leko pritivesku.
Poklpa mi a pispalt tipatie, ke neka viru
hpasa, ke je mire murfa dnsurfa. 3
fahit-me-aw änsuréa dupga ku sora lu
ma molhiba. Hi vut-am in fl, murit-
a, Mi polla mi a-dpat Domenu o fille,
pokia un AIT 5 poklra inkça o fille. gatu
mu din Ge pure, Finin.
Paris, mars 1891.
G. WEIGAND
Où ils attrapaient un soldat en ville,
ils le tuaient. Beaucoup en restèrent
morts (tués) par les Italiens. Je fus
sept ans en Italie, alors ils me lais-
sèrent à la maison. Je restai chez moi
quarante jours. Cela fut une mauvaise
année; j'allai à Pola pour les tra-
vaux du gouvernement , pour gagner
quelques kreutzers, pour aider la
famille, afin qu'ils vécussent plus aisé
ment. Puis mon père écrivit de venir
à la maison, parce qu'il pouvait me
marier, Et'après il me ft marier à la
sœur de ma belle-mère. J'eus un fils,
il mourut, alors Dieu me donna une
fille, puis un fils, puis encore une
fille. Je ne sais pas autre chose à
raconter. Finissons !
Gustave WEIGaxD.
MÉLANGES
VALBETON DANS GIRART DE ROUSSILLON
On n’a pas encore pu identifier d’une façon certaine le lieu
de Valbeton que la légende épique désigne comme l’un des
champs de bataille où se rencontrèrent Girart de Roussillon et
Charles le Chauve. D’après la Vie latine de Girart de Roussillon!,
Valbelon serait situé entre Vézelay et Pierre-Perthuis, sur les
bords d’une rivière nommée Arsen, qui, d’après cette vie latine,
ne serait autre que la Cure. « Je n'ai pas réussi, dit M. P.
a Meyer, à trouver de texte purement historique sur ce Vau-
« beton. Ce n’était sans doute pas un lieu imaginaire... La
« détermination géographique de ce cours d'eau (4rsen) dépend
« naturellement de la détermination de Vaubeton?. »
Partant des données topographiques indiquées par la Vie
latine, j'ai recherché si entre Vézelay et Pierre-Perthuis, il ne
restait rien qui rappelât le souvenir de la lutte et le nom attribué
au lieu de combat.
De premières indications aux archives municipales de Vézelay.
me firent découvrir, dans un terrier 3 de l’hospice de cette ville,
la mention de certains biens sis au « climat+ de Vaubouton »,
du finage de Saint-Père-sous-Vézelay. L’atlas cadastral de cette
1. Romania, VII, 202, $ 147.
2. Girart de Roussillon, chanson de geste traduite pour la première fois,
p- 67; note.
3 Terrier datant de la première moitié de ce siècle.
4. « Climat » est en Bourgogne un nom désignant ce qu'on appelle plus
communément ailleurs « lieu dit » et l'on en constate l'emploi vers le nord-
ouest jusqu'à Moret (Seine-et-Marne). C'est à peu près ce qu'on appelle
chantier au sud de Paris, canton en Lorraine, pie en Franche-Comté, quartier
en Dauphiné, friage où frige en Normandie et jusqu'à Jersey.
Romuris, XXL 17
262
MÉLANGES
quêtes. Dans cette pièce, comme dans la seconde pièce anglo-
normande, on remarquera la personnification de danx Nœl, sire
Nous, qui s’est conservée jusqu’à nos jours dans la figure,
chère aux enfants, du « Bonhomme Noël ».
Letabundus
Exullet fdelis chorus :
Alleluia |
Regem regum
Intacte profundit thorus :
Res miranda!
Angelus consilii
Nalus est de virgine,
Sol de stella,
Sol occasum nesciens,
Stella semper rutilans,
Semper clara.
Sicut sidus radium,
Neque mater flio
Fit corrupla.
Cedrus alla Libani
Conformatur byssopo
Valle nostra:
Verbum ens Alissimi
Corporali passum est
Carne sumpla.
Lsaias cecinit,
Synagaga meminit ;
Nunguam lamen desinit
Esse caca ;
24
Ori parra :
La cerveise nos chantera
Allduia !
Qui que en beit,
Se tele seit com estre deit,
Res miranda!
Bevez quant l'avez en poing :
Bien est droit, car mout est loing
Sol de stella;
Bevez bien e bevez bel :
Ef vos vendra del tonel
Semper clara.
Bevez bel e bevez bien,
Vos le vostre e jo le mien,
Pari forma.
De ço seit bien porven :
Qui auques la tient al fu,
Fit corrupla.
Se riches genz font lor bruit,
Faisons nos nostre deduit
Valle nostra;
Beneit seit le bon veisin
Qui nos done pain e vin,
Carne sumpta !
E la dame de l'ostal,
Qui nos fait chiere real !
Ja ne puisse elle par mal
Esse cul
2 cerueyse nos chauntera — 4 Qui que aukes en beyt — 5 Si tel
: doit — 7 poin — 8 Ben, mut — 11 11 — 16 soit — 17 Qui que 2. le
-19 Riches g. funt L. brut — 20 Fesom nus — 21 Valla — 22 Beneyt
li — 23 dune payn — 25 de la maison — 26 Ki nus fait chere —
PIERRE DE BEAUVAIS 263
Si non suis vatibus, Mout nos done volentiers
Credat vel gentilibus Bons beivres e bons mangiers;
Sibyllinis versibus Mieuz vaut que autres moilliers
He predicta. 32 He predicla.
Infeix, propera : Or bevons al derain
Crede vel vetera; Par meitiez € par plein,
Cur damnaberis, Que ne seions demain
Gens misera ? Gens misera.
Natum considera Nostre tone ne vuit,
Quem docet littera : Car pleine est de bon fruit,
Lpsum genuit E si ert tote nuit
Puerpera. 40 Pucrpera.
Amen. Amen.
G. P.
LA TRADUCTION DE LA LÉGENDE LATINE
DU VOYAGE DE CHARLEMAGNE À CONSTANTINOPLE
PAR PIERRE DE BEAUVAIS
P. Meyer à fait connaître, dans sa notice sur le ms. de La
Clayette (Not. et Extr. des mss., t. XXXIIL, 1° p., p. 9-48),
les différents ouvrages en prose et en vers composés, dans Île
premier quart du xin* siècle, par un certain Pierre; Pierre ne
nous a pas transmis son surnom, mais comme nous le voyons
établi à Beauvais, protégé par l’évêque de Beauvais et plus
tard par son frère Robert de Dreux, célébrant un saint
(Germer) à peu près spécial à Beauvais, nous pouvons, pour
le désigner plus clairement, l'appeler sans inconvénient Pierre
de Beauvais. Je veux seulement ajouter un détail à la notice
de P. Meyer. Le ms. B. N. fr. 2168 contient le commence-
ment (les feuillets qui faisaient suite ont été arrachés) de
1. S'il ne prend pas lui-même ce surnom, c'est sans doute qu'il n'avait pas
quitté sa ville natale; il en résulterait que ses écrits doivent nous représenter
exactement le langage parlé à Beauvais au commencement du xrme siècle.
29 Mut nus d. volenters — 30 beiueres, mangers — 31 Meur waut,
muliers — 33 bewom al dereyn — 34 meitez, pleyn — 35 Que nus ne
sepm demayn — 37 Ne nostre tonel wis ne fut — 38 Kar plein, frut —
39 tut anuit.
COMPTES RENDUS
Romanische Bibliothek, herausgegeben von Dr. Wendelin FŒRSTER,
Professor der romanischen Philologie an der Universität Bonn. Halle,
Niemeyer, 1888-1892, in-12.
1. Christian von Troyes, Cligès. Textausgabe mit Einleitung und Glossar,
herausgegeben von W. FœŒRsTER, 1888, xx1-215 p.
II. Die beiden ersten Bücher der Makkabäer. Eine altfranzôsische Ueber-
setrung aus dem 13. Jahrhundert. Mit Einleitung, Anmerkungen und
Glossar zum ersten Male herausgegeben von Dr. Ewald GæœrLicn, 1888,
1-130 p.
I. Aliprovenzalische Marienklage des XII1. Jahrbunderts. Nach allen bekann-
ten Handschriften herausgegeben von Dr W. Musnacxe, 1890, 1-65 p.
IV. Wistasse le Moine. Altfranzæsischer Abenteuerroman des XIII. Jahrhun-
derts. Nach der einzigen Pariser Handschrift von neuem herausgegeben von
Wendelin F&RSTER und Johann Trosr, 1891, xxx1-88 p.
V. Kristin von Troyes, Yuain (der Lowenritter). Neue verbesserte
Textausgabe mit Einleitung und Glossar herausgegeben von W. FŒRSTER,
1891, XXIV-187 p.
VI. Das Adamsspiel, Anglonormannisches Gedicht des XII. Jahrhunderts,
mit einem Anhaog, Die fünfrcbn Zeichen des jüngstem Gerichts, herausgege-
ben von Dr Karl GRass, 1891, vInr-174 p.
VII. Bertran von Born, herausgegeben von Albert Srimmrnc, 1892, vrir-
247 P.
VIIL. Ille und Galeron, von Walker von Arras. Altfranzôsischer Abenteuer-
roman des XII. Jahrbunderts, nach der cinzigen Pariser Handschrift heraus-
gegcben von Wendelin Fœrsrer, 1891, XLVIU-244 p.
Nous avons signalé, quand elle a commencé à paraître, la Romanische
Bibliothe dirigée par M. Forster (voy. Rom., XVIII, 340); elle s'est rapi-
dement enrichie et compte maintenant huit volumes. Beaucoup d’autres sont
annoncés, et, quand on connalt la prodigicuse activité du directeur, on peut
croire qu'ils ne tarderont pas à paraître. Il faut penser cependant qu'il y a eu
des mécomptes ou des changements d'idée : la couverture du 3e fascicule
annonce comme devant former les nes IV-XI huit ouvrages, dont trois seu-
lement ont paru, formant les nos V, VII et VIII; en revanche les nos III et
E. FoRESTIË, P. de Lunel, dit Cavalier Lunel 305
tion des registres des frères Bonis, s'en est parfaitement rendu compte, et il a
fait revoir les épreuves de son travail par plusieurs philologues compétents,
M. Chabaneau, M. À. Jeanroy et l'auteur du présent compte-rendu. Mais on
conçoit qu'un travail fait dans ces conditions ne peut pas présenter beaucoup
d'unité. Ainsi il arrive parfois que la traduction n'est pas conforme au texte
adopté. Par exemple, dans l'ensenhanien, an v. 9. M. F. traduit «un matin »
quand le texte porte, conformément au ms., per un cami. C'est qu'en réalité
il a traduit en adoptant la correction de Bartsch per un mati. Si M. F. accep-
tait cette correction (à mon avis fort probable) il devait l'introduire dans le
texte, Or il ne la donne ni dans le texte ni dans les notes. J'appellerai sur-
tout l'attention sur le sirventés composé 4 l'occasion de la peste de 1348, qu
est imprimé pp. 66-69. Ce sirventés était resté inédit, vraisemblablement parce
que M. Bartsch l'a omis à l'article de sa table des troubadours qui conceme
Lunel (Grundriss, p. 160, n° 289). Le texte en est très difficile à établir,
l'écriture étant par places usée et tachée. Les taches viennent de ce qu'on a
employé, À une époque que je ne saurais déterminer, pour faire revivre les par-
ties effacées, un réactif qui a augmenté le dommage. Je suis, je l'avoue, en une
certaine mesure responsable du texte que donne l'édition. J'avais, en effet,
revu sur le manuscrit, avec un soin tout particulier l'épreuve que m'avait
communiquée M. Forestié. Toutefois, soit que l'imprimeur se soit embrouillé
dans les corrections dont l'épreuve était criblée, soit que certaines fautes
m'aient échappé, il est certain que le texte de l'édition contient encore beau-
coup d'erreurs, que je vais rectifier, grâce à une nouvelle collation du ms., et
aussi en faisant usage d'une copie que j'ai prise de cette pièce il y a plus de
vingt ans, à une époque où mes yeux étaient meilleurs qu'aujourd'hui, et
qui s'est retrouvée sous ma main tout récemment. V. 2, gran, lis. grans
(as sujet). V. 4, Qu'es il faut Ques (qui). V. 11, sagraments, ls. sagramens.
V. 13,gran, lis. grans (plur. rég.). V. 21-2, Mays a mon trop que Dieus a rasemr-
blatx, Trop que sson oy a parlar la vertatz. Ces vers n'ont aucun sens, et la
traduction que propose M. F. ne soutient pas l'examen. Lisez : Mays amon
trop que Dieus (corr. Dieu) terras e blatz | Trop que sson oÿ, e par be la vertaix.
V. 23, laishams, lis. laishan ; le sens. du reste, exige la 3e pers. et non la 1e.
V. 24, praubes, is. paubres. V. 28, feunia, li. folia. V. 29, auria, j'ai lu autre-
trefois ais, qu'exige le sens ; je ne le lis plus aussi bien maintenant, mais
sûrement il n'y a pas auria. V. 30, dégran, lis. dégra. V. 35, guoquols, lis.
guoguols ; ce mot que M. F. traduit, probablement au hasard, par « viveurs »,
doit signifier « présomptueux! ». V. 37, an, lis. am (avec). V.42, Lo rey, lis. Le
reys. V. 45, valhan, lis. valbam. V. 47, el drect els temps caretios, lis, e dreitz en
temps careslios. V. 48, partit, lis. partisos. V. 50, foys de goig, lis. fons de
1. Guopue, en ancien français exprime l'idée d’une joie bruyante « Estre en ses
gogues » est traduit dans Cotgrave par « to be frolick, lusty, lively, wanton ». Le sens
de présomptueux apparalt dans gopuelu « proud, cocket, scomiul.…. vainglorious »
(Cotgrave).
Bomenis, LA. 20
J. PICHON ET G. VICAIRE,
Texte de MM. Pichon et Vicaire.
Pour dessaler tous potages sans y
metre ne oster, prennés une nappe
blanche et mettés sus vostre pot, et la
tournés souvent, et tirés arriere le pot
du feu.
Pour oster l'arsseure de tous po=
tages, prenés un pou de levain et le
liés en un drapel, et metés ou pot, et
ne l'i lessiés gueires.
Bouture de grosse char, c'est porc,
buef, mouton. Cuit en eauc et sel, et
mengier aux auls blans ou vers, ou au
vers, ou au verjus, se elle est freiche,
et, sallée, à la moustarde,
Le viandier de Taillevent 309
Texte du Vatican.
Pour dessaler toutes manieres de po-
taiges qui seroient trot sallez, sans ÿ
rien mettre ne oster, prenez une nappe
bien blanche et la mettez sur vostre
pot et la retournez souvent, et com-
vient Hraire Le pot loing du feu.
Pour oster l'arsure d'un pot que l’on
dit aour *, prenez ung pou de levain et
le liez en ung drappelt blanc, el gellex
dedans le pot, et ne l'y laissiez guaires
demourer.
Boutture de grosse chair si est beuf,
porc et mouton cuit en eaue et en sel.
Et se mengue le beuf aux aulx vertz en
esté, blans en yuer, et le porc et le mou-
ton aussi à bonne sausse vert où il n'y
ait point de vin, se La chair est freische,
et, se elle est sallée, à la moustarde.
Nous croyons que ces citations suffisent pour mettre en évidence et hors
de toute contestation la supériorité du texte du Vatican. Il n'en faut pas
moins savoir beaucoup de gré à MM. Pichon ct Vicaire du service de pre-
mier ordre qu'ils viennent de rendre à l'histoire littéraire et ausssi à la phi-
lologie française par leur publication. Les étrangers prétendent, non sans
malice, que nous avons joui de tout temps, en cuisine, d’une suprématie
moins disputée que dans les autres domaines où notre action a pu s'exercer.
Or, le Viandier de Guillaume Tirel ou, comme disaient nos pères, le Taille-
vent, car le sobriquet du queux, dont l'œuvre si populaire servit de modèle
pendant des siècles à toutes nos Cuisinières bourgeoises, était devenu un nom
commun, le Taillevent est Le monument le plus antique et le plus vénérable de
cette suprématie.
Siméon Luce.
1. Brûlure, goût de brûlé, adj. ou subst, formé sur le verbe aourser, brâler, s'attacher
au fond du pot, en parlant des aliments, Le dict, de M. Godefroy a plusieurs exemples
de ce verbe, mais n'enregistre pas aour.
PÉRIODIQUES 35
bomme compétent. Dans ces pièces M. C. aurait dù numéroter les vers
où an moins les couplets:. Il est inexact de dire que « les manuscrits
des vies des saints en prose française sont peu nombreux » (p. 249). Les
travaux que j'ai publiés sur ce sujet, et auxquels veut bien renvoyer M. C.,
prouvent le contraire, et je suis loin d'avoir cité tous les mss. de ces recucils
que je connais. La prière Sainte vraie croix aourée, publiée p. 255, se rencontre
souvent dans les livres d'heures. Elle avait déjà été imprimée peu de temps
auparavant dans La Revue des langues romanes, 4° série, Ill, 370. — P. 263,
A. Fourès, Les jeux des enfants en Lauraguais. P. 281, A. Fourès, Voucabulari
anatoumic e de la malautios en Lauragués. — P. 290. J. Brissaud, Chant de mates
de l'Agenais. — P. 296. A. Blanc, À propos de l'expélition en Sardaigne de Guil=
laume II, vicomte de Nartonne. Cet article contient des extraits de comptes
(x410) tirés des archives de Narbonne, qui sont peut-être les plus belles
archives municipales du Midi de la France. On y remarque plusieurs exemples
du passage d's à r et inversement. — P. 307. Castets, « I fiore » et ses cri-
tiques. » M. C. essaye encore de soutenir que Dante pourrait être l'auteur de
cette série de sonnets sur le Roman de la Rose.
P. M.
GIORNALE STORICO DELLA LETTERATURA ITALIANA, n@œ 43-4 (t. XV,
8e année, 1890). — P. 1. G. Volpi, La vita e le rime di Simone Serdini detto
il Saviogxo. Travail approfondi, suivi d'un appendice bibliographique et d'un
choix de morceaux inédits. — P. 79. F. Macn-Leone, La politica di Giovanni
Boceacio. Malgré les efforts de l'auteur, les idées politiques de Boccace n'appa-
raissent pas clairement, Elles ne semblent pas, en tout cas, avoir cu beaucoup
d'originalité. — P. 111. G. Rua, Intorno alle « Piacevoli nolti » dello Straparola
(premier article). L'auteur donne de curieux renseignements sur les diffé.
rences considérables que présentent entre elles les premières éditions des
Piacevoli notti; montre qu’en certains cas Straparola a reproduit des narrations
qui couraient dans le peuple, qu'en d'autres il a simplement mis à profit des
recueils écrits, par exemple, celui de Morlini, ce qui n'est pas une vue
entièrement nouvelle; insiste sur les énigmes que Straparola introduit dans
ses contes. — P. 152. E. Pércopo, Laudi e devogioni della citlà di Aquila.
Guite). — P. 180, R. Kæhler, Mustragioni comparative ad aleune novelle di
Gigvanni Sercambi (suite). Ces illustragioni se rapportent à trois nouvelles
seulement. Pourquoi les morceler en aussi menus fragments? — P. 183. V.
Rossi, Di una rimatrice e di un rimatore del sec. XV. Girolama Corsi Ramos &
1. Je remarque que la chanson pieuse de la p. 245 :
Bien emploie son cuer et s0n corage
Qui bien vos sert, douce vierge Marie...
est faite sur les rimes de la pièce d'Hugues de Beraé : Bernart, di moi Fouquet qu'on
tient a sage, imprimée dans la Romania, XVIII, 557, qui se trouve aussi dans Le chan
sonnier de Modène.
LA PREMIÈRE PERSONNE DU PLURIEL
EN FRANÇAIS
1
Parlant de la désinence française -ons, en regard des désinences
latines -amus, -émus, -imus, Diez indique que la réduc-
tion de trois désinences à une seule, commune à tous les
verbes, n’a rien qui puisse surprendre; puis il continue en ces
termes! :
On peut, il est vrai, s'étonner ici de voir la voyelle o, qui est absolument
étrangère au latin, régner exclusivement en français. Le franç. s0mes — lat.
sumus, en vertu de son emploi très fréquent, aurait-il ici servi de type?
Des dialectes de la partie orientale du domaine n'ont pas donné accès à cet o
devenu dominant ailleurs : ainsi le wallon, où stopan, par exemple, répond au
franç. éoupons, slopen au franç. éloupions (imparf. ind.). Pour des exemples
d'autres régions, voy. Schnakenburg, p. 68. On trouve au contraire en ita-
lien des traces de om pour am : ainsi dans le dialecte de Reggio le prés. ind.
purièm, le subj. purlomm — portiamo.
Diez ajoute en note :
Delius s'exprime sur notre question de la manière suivante : « L'énigme
« s'explique par les terminaisons abrégées am (ams), em (ems) et im (ims), où
« la nasalisation, lorsqu'elle s'y est introduite, a pu troubler les trois
« voyelles et les fondre dans je son sourd b ou u, om ou um. Comme,
« d'après les règles de la phonétique, un u latin atone tombe purement et
« simplement en français, sans aucune compensation, à ce point de vue aussi
« chantomes ne semble pas formé directement de cantamus, mais allongé
« de chantons où chantoms. »
Le maitre ne se prononce pas entre les deux alternatives.
L'explication proposée par Diez a été reprise et développée par
1. Grammatik, I (3* éd.), 226; trad. française, II, 207.
minis, XXL. 2
LES FRAGMENTS
DE LA TRADOCTION NÉERLANT.
De toutes les Himératures du moyen ie, celle des Pays-Bas
est la seule. semble-t-il, qui ait possédé une traduction du
grand cycle des Lorrains. Certe traduction est perdue dans son
ensemble, mais nous possédons une suite de fragments impor
tants (en tout environ 10.000 vers), d'autant plus intéres-
sants qu'ils donnent, pour une partie du cycle, une rilaction
spéciale, qui ne correspond à aucun poème français conservé,
On sait, en effet, que quelques manuscrits de là geste
donnent, pour faire suite au prologue (Here) et aux deux
grands poèmes centraux (Garin, Girkri), des continuation
qui reprennent le récit à partir de la mort de Fromondin, frappé
par Girbert *. Ces suites se divisent en deux groupes, selon que
le fils de Girbert, qui continue la lutte contre les Bordelais,
s'appelle Anseïs ou Yon. Laissant de côté les r&its du premier
groupe, nous pouvons classer dans le second deux rédactions
françaises : 1° un poème faisant suite À Girkvri, dans le manus-
crit de la Bibliothèque Nationale, français, 1622; 2° un récit
en prose de Philippe de V'igneulle. Or, les fragments néerlan-
dais appartiennent, en grande partie, à une continuation dans
laquelle le héros s'appelait Yon; ils nous offrent les débris d'un
long récit qui forme la troisième version du second groupe,
récit que nous essayerons de reconstituer d'abord et que nous
comparerons ensuite aux rédactions françaises.
1. Voir G. Paris, Manuel, 1,6 25, sur le plan général du cycle, et Bonnar-
dot, Romania, II, 260, pour là distribution des poèmes dans les différents
manuscrits.
TRADUCTION NÉERLANDAISE DES LORRAINS 377
des Bordelais, au Nord et au Midi; cette guerre est interrom-
pue par une trêve qui dure dix-sept ans (fol. 306 r°); une nou-
velle guerre éclate, dans laquelle Raoul de Cambrai joue le rôle
principal‘; néanmoins, la paix se conclut; les Lorrains et les
Bordelais réconciliés sont reçus à Gironville par Ludie, femme
d’Hernaut et sœur de Fromondin; à la chasse, Yon, injurié par
le fils aîné de Ludie, frappe ce dernier; l'enfant va se plaindre à
sa mère; celle-ci, qui n’a jamais pu pardonner à Girbert la mort
de son frère, exhorte son fils à venger à la fois les griefs de la
famille de sa mère et les siens propres en tuant Girbert;
« l'enfes l’entant » et frappe Girbert mortellement, après quoi
il s'enfuit; Yon jure de venger la mort de son père (fol.
314c):
« Hé] Girbert pere, com grant desconvenue |
Qui vous a mort joie nos a tolue;
Ja Deu ne place ne la Virge absolue
Que j'aie amie, ne pucele, ne drue,
Tant que li aie larme dou cors tolue,
Lou chief tranchié a l'espée esmolue. »
L'été suivant, Yon est couronné roi de Gascogne ; le poète
ajoute (f. 3144):
Yons fu prouz et chevaliers manbrez,
Bien tint sa terre environ et en lez,
Vers les prodommes fu paisible et souez,
Vers les felons fiers com lyons crestez.
Mais de son pere ne fut paz oubliez:
Puis fat par lui li flz H(ernaut] matez.
Grant fut la guerre, jamais tel ne vairez ;
Garins ses freres l'aidait, c'est veritez,
Mout s’antramerent li dui frere senez.
Col. 315 a)
Li rois prist fame de mout grant richetez;
Garins sis freres fut apres oisserez :
Li rois d'Espaigne, qui riches iert assez,
Sa belle fille li donna de ses grez,
Monglanne tint qui est riche citez.
1. C'est l'épisode publié par MM. Meyer et Longnon dans leur édition de
Raoul de Cambrai, p. 297-320.
‘TRADUCTION NÉERLANDAISE DES LORRAÎNS 399
naître, dans ce récit altéré, limpératrice Judith et le rattacher à ce person-
nage? D'autant plus que l'autorité historique qu'il avait sous les yeux pouvait
difhalement le mettre sur la bonne voie. Nous avons vu qu'il suit Sigebert
Cou Vincent qui copie Sigebert) pour l'histoire des contemporains et suc-
can de Charlemagne ; or, Sigebert dit simplement ceci (Perte, Monum.
VI, 338) : 2° 832 Imperalor uxorem suam Judith, quasi causam malorum,
abdicavil.…. 2° 834 Ludouvieus imperalor relaxalus, arma, imperium et usorem
recipit.… (Vincent ne dit rien de plus). Dans ces sèches notices, l'accusation
d'adultère, le seul point de contact entre La légende et l'histoire, manque.
Notre auteur, qui certainement n'a pas consulté les historiens contempo-
rains, n'a pu conclure de ces passages qu'une chose : c'est que Judith fut
pendant quelque temps répudiée par son mari, comme causant des troubles
dans l'État; il n'a pu les rapprocher du récit déjà si altéré de l'impératrice
condamnée au supplic à la suite d'une fausse accusation d'adultère et en
tirer le récit tout divergent des malheurs de Judith comme jeune fille, qui se
trouve dans Yon.
424 MÉLANGES
4 Et dient tuit j'ai mespris
Et de l'anel qui fu mis en traîne,
Et mais a bon droit i fu mis,
Que par l'anel fu faite la saisine
8 Par que je suis entrepris
M. Wallenskôld a surtout tenu compte, dans sa restitution
critique, du texte de MT, dont la leçon, il est vrai, peut être
acceptée pour les vers 1-4 (elle est au vers 2 appuyée par celle de
C qui est d'une famille différente); mais pour la dernière partie
de la strophe, l'accord plus ou moins complet de O et de C,
apparentés de beaucoup moins près que M et-T, permet de
retrouver la bonne leçon : nous lirions au vers 6, avec O et C:
mais a bon droit i fu mis; cette reprise, faisant pendant au v. 4
(maïs mout a bon droit le fis) serait assez dans le style brusque et
impérieux de l’auteur. Au vers 8 nous lirions avec C : dont je
sui mors et traïx au lieu de la leçon de MT, qui est une platitude,
et de celle de O, qui n’en diffère guère.
Il reste au vers 3 une grave difficulté : la leçon coverture de
saus confirmée par l'accord de tous les mss. (car c’est elle qui
se cache sans doute sous celles de O et de C) doit être celle de
l'original, et elle est inintelligible; il serait facile de présenter à cœ
sujet des conjectures, mais elles demeureraient nécessairement
sans fondement ; il y a là probablement quelque allusion à une
pièce perdue, allusion dont il faut nous résigner À ne point
pénétrer le sens tant que la pièce en question ne sera pas
retrouvée.
A. JEANroY.
4 mout a bon droit le fs M; mais a mit boin droit le fis T; mais li
pluxor ont mespris C. — 5 de son anel ke ie mix en terainne C. — 6 dont li
miens cors fu trahi MT; car a boun droit i fut mis C. — 7 Quar par celui £.
£ LS. MT. — 8 donc ie sui si (si omis dans T) maubailliz; dont ie seux
mors et traîs C.
1. Comme le remarque M. P. Meyer (Rom., XIX, 14), cette pièce est
exactement sur le rythme de la chanson de B. de Born : Ges de disnar.
Conon de Béthune a poussé limitation jusqu'à reproduire, à très peu
chose près, et en les répartissant dans deux séries de couplets, les rimes de son
modèle (dans La pièce provençale is, au, ana; ir, er, aine dans les deux pre-
miers couplets de la pièce française, sous, is, ine, dans lès deux derniers).
24 Il est probuble aussi que #rui,, à La rime, aura été amené par fraîne, du
vers prévient, et que tout le vers aura êté refait sur ce mot.
432 MÉLANGES
de Carlo del Nero, en ferxa rima, a 433 vers, wndis que le
poème d’Alain Chartier, en huitains, n’en a que 368. Le poète
italien, naturellement, a supprimé les allusions à Oton de
Grandson et à Guillaume de Machaut.
Voici, pour donner une idée de la traduction de del Nero,
les premiers et les derniers vers du poème :
Infra duo sonni, appresso mezza note,
L'ora ch'amore i veri amanti desta,
Ch la pit gente a riposo & ridotte,
Sendo nel letto, e non con molta festa,
Uno amoroso dolente ascoltai,
Che par ben ch'abbia la puce alla testa,
Ch'a un si consigliava de’suoi guai;
Eson coleati insieme in un sol leo.
Io, a udir, l'orecchio lor prestai.
‘Un che non dorme, ama di cor perfetto.
E’non husava il compagno svegliare,
Credendo dorma, e nol’abbia a dispetto.
E'molte volte principiô il parlare;
E il non dormente, qual se si sentissi,
Comincid coll'amante a ragionare.
Dissegli : Tu credevi ch'io dormissi;
Cid vo’ben far, nè di gracchiar mi curo;
Parlar dovevi avanti al letto gissi
1. Après minuit entre deux sommes,
Lorsqu'Amours les amans reveille,
En ce pays cy ou nous sommes,
Pensoye ou lict ainsi qu'on veille
Quant on à la puce en l'oreille;
Si escoutoye deux amoureux
Dont l'un 4 l'autre se conseille
Du mal dont il est douloureux.
Deux gisoient en une couche,
Dont l'ung veilloit qui fort amoit,
Mais dès long temps n'ouvroit la bouche
En pensant que l'autre dormoit.
Puis ouy je qu'il le nommoit,
Et huchoit pour mettre a raison,
Dont l'autre forment le blasmoit.
Et disoit : Il n'est pas saison.
LA QUISTIONE D'AMORE DE CARLO DEL NERO 433
Poi venne l'alba e finÿ' lor parlare,
Non so sed & si furno adormentati,
Credo di sl; e cid ragion mi pare.
E io, ch'il terzo ero de'svegliati,
Dormi tanto alsi che'fu gran giorno ;
Quando ch'i'mi svegliai, eron levati.
Non so che di lor fussi, o ove andorno.
E io mi messi in cuor di recitare
Cid ch’avian ditto, e che d'amor parlorno.
Fatto l’ho come l'ho saputo fare :
Se non & bene, iscusimi ignoranza,
E priego sia corretto il mio parlare,
Quant id non ne ricolsi altra sustanzar,
Arthur PIAGET.
1. Ainsi l'aube du jour creva,
Et les compaignons se dormirent.
N'oncques nul d'eulx ne se leva
‘Tant qu'huit heures lever les firent.
Si mis en escript ce qu'ils dirent
Pour mieulx estre de leur butin;
Et l'ont nommé œeulx qui le virent
Le Débat reveille-matin.
COMPTES RENDUS
Origines et sources du Roman de la Rose. Thèse pour le
doctorat présentée à la Faculté des lettres de Paris par ERNEST LANGLOIS,
Paris, E. Thorin, 1890. In-8, vrri-203 pages. (Cinquante-huitième fasci-
cule de la Bibliothèque des Écoles françaises d'Athènes et de Rome).
De tous les poèmes français du moyen âge, le Roman de la Rose est celui
qui a joui de la réputation la plus longue et la plus ininterrompue, mais aussi *
celui peut-être dont l'étude soulève les questions les plus complexes et les
plus ardues; on ne peut donc que féliciter M. Ernest Langlois d'avoir pris
pour sujet de thèse cette œuvre plus admirée que connue. Composé à la fin
de la première grande période du moyen Age, ce poème en résume toute la
science dans sa seconde partie , et montre, dans sa première, quelques-unes
des inspirations nouvelles où puisent maintenant nos trouvères. Art d'aimer
dans la pensée de Guillaume de Lorris, tableau satirique de la société et
encyclopédie de la science contemporaine sous la plume de Jean de Meun, le
Roman de la Rose est à la fois une œuvre originale et d'imitation, dont il
importait une fois pour toutes de faire la genèse et de rechercher les origines
et les sources. Voulant donner une édition critique de ce poème, M. E. L. a
été naturellement — je devrais dire nécessairement — amené à aborder cette
étude difficile, et, grâce à sa grande connaissance du moyen âge, il a su la
mener à bonne fin.
Son travail se divise en deux parties, comme le roman lui-même; la pre-
mière est consacrée à l'œuvre de Guillaume de Lorris, la seconde à celle de
Jean de Meun; et dans chacune il a suivi une méthode différente, consé-
quence forcée de la manière différente dont les deux poètes ont traité leurs
sources. Guillaume s'est plus inspiré des poètes qui l'ont précédé qu'il ne
les a servilement suivis; Jean de Meun, lui, traduit le plus souvent et imite
fidèlement les auteurs qu'il prend pour guides; il n'y avait donc qu'à signa-
ler ses emprunts; pour Guillaume de Lorris, le travail était tout autre; il
fallait rechercher, non seulement ce qu'il doit à ses modèles, mais encore la
transformation qu'il a fait subir aux motifs poétiques que ceux-ci lui ont fournis.
Le sujet du Roman de la Rose, comme le dit fort bien M. E. L., est l'art
d'aimer et d'être aimé; comment un pareil sujet a-t-il pénétré dans la litéra-
ture du moyen âge? À quelle époque y apparaît-il d'abord? M. E. L. admet
E. ROUSSELOT, Le Patois de Cellefrouin. 439
naissance les autres maîtres dont il a suivi les leçons, et il est visible que,
parmi ces savants auxquels il reconnaît devoir beaucoup, M. Gilliéron occupe
une place d'honneur. Il s'en faut toutefois que l'étude sur le patois de Celle-
frouin procède purement et simplement de l'étude sur le patois de Vionnaz.
On y trouve une note personnelle, et fort intense. Elle n'est nulle part plus
accentuée que dans les préliminaires et, en particulier, dans la critique des
documents oraux (p. 160 et suiv.), critique pleine de finesse et de pénétra-
tion. À signaler également toute la troisième partie (p. 317) sur les modi-
fications du fonds nouveau du patois. Dans tout cela, il n'y a qu'à s'incliner
devant la puissance d'observation de l'auteur et à admirer son talent d'expo-
sition. La conclusion, qui n'a que six pages, soulève une question de la plus
haute importance, que la linguistique et la philosophie associées auront sans
doute bien de la peine à résoudre péremptoirement. Quel est le principe de
l'évolution phonétique ? Faut-il le chercher dans l'indolence des organes qui
exécutent mal les ordres du cerveau, ou dans le cerveau même ? M. l'abbé R.
penche vers la seconde explication et s'arrête à « l'hypothèse d'une sorte
d'anémie, d'un affaiblissement graduel ct transitoire des centres nerveux qui
aboutissent aux muscles, siège de l'évolution ».
Je ne suivrai pas M. l'abbé R. dans ces régions élevées : je ne m'en sens
ni la compétence ni le goût. Il me tarde d'arriver à ce qui est « ma droite
balle », comme dit Montaigne, aux pages 181-316, où se trouve exposée la
phonétique des consonnes, puis celle des voyelles. Le plan ne me paraît pas
très heureux : je ne parle pas, bien entendu, de l’ordre respectif des con-
sonnes et des voyelles, qui n'a aucune importance, mais de l'ordre intérieur
dans chacune des deux sections. Pour les consonnes, M. R. établit les di
sions suivantes : L. Articulations conservées depuis l'époque latine; II. Chan-
gements d’articulations; IIL. Simplification des consonnes doubles; IV.
Changements de sonorité; V. Chute de consonnes; VI. Vocalisation des
consonnes; VII. Formation de consonnes nouvelles, Assurément, il a des
raisons pour agir ainsi, ct il les indique. Mais j'estime que ce qui devait les
primer toutes, c'est la nécessité de raccorder toutes les études de patois
locaux aux études générales de phonétique romane et, par suite, d'adopter le
plan classique de M. Ascoli, dans ses Sagyi ladini, En adoptant ce plan,
M. l'abbé R. n'aurait pas pu csquiver, comme il l'a fait, certaines questions
importantes, celle de l'accent, par exemple, sur laquelle on est étonné de ne
pas trouver, dans l'étude phonétique, un paragraphe spécial. Ce défaut de
plan et ceue lacune grave n'empêchent pas l'étude de M. l'abbé R. d'être un
travail de grande valeur, dont le détail est traité dans un excellent esprit phi-
lologique : l'auteur sait à propos ou blisser ou s'appesantir sur tel où tel
point, selon que le terrain le demande. C'est plaisir de le suivre dans ses
déductions ingénieuses quand il se livre à quelque digression étymologique, par
exemple à propos de chu « pourquoi », où il montre cliirement (p. 207) que
cet adverbe est simplement la seconde syllabe du verbe ch'eha « chercher», sor-
tie de phrases comme « K4 chcha ana & eu? que chercher allit-il, pourquoi
442 COMPTES RENDUS
«niche à chien », n'ont pas le même radical que le français croupe, s'accrougér,
et c'est bien gratuitement que M. l'abbé R. suppose à ces mots « un radical
avec un seul p, krupe, comme au germanique stuppula, éouble ».
D'abord je crois que le fr. éfouble vient du lat. *stupila (au lieu de stipula)
ct non de l'allemand ; puis, en ce qui concerne s'agrous les formes franche-
ment méridionales données par Mistral (agrous, prouve, agrus, etc.) ne sont
pas favorables à l'hypothèse d'un p intervocalique, même simple. Mistral
indique comme étymologie curbare, que je ne voudrais pas cautionner.
P. 21. « Fer conbuja un' barik, rendre une barrique étanche. » Il aurait été
bon de remarquer que le mot combuger figure dans tous les dictionnaires
français, y compris celui de l’Académie, et que le français l'a probablement
emprunté aux patois du sud-ouest.
P. 212-223. « Lodefes, hameau de la commune de Vaux, à côté de Lode-
Jens (Cartul. de Vaux). » Cette double forme n'a pas la valeur que M. l'abbé
R. lui attribue. Defes représente le lat. defensum, comme dans la même
région pes — pensum; defens est une forme calquée sur le latin littéraire
comme penser sur pensare : il ne s'agit pas ici de l'" caduc du provençal.
P. 225. « C'est dans cette position que se trouve la seule labiale sur
laquelle nous possédons un renseignement. Nous trouvons cette phrase [dans
le censier de Cellefrouin] : P. Aymes .vij. sol. deu chambo qui est. Le copiste
s'est oublié puisqu'il a effacé deu chambo qui est pour restituer la bonne leçon
de maynamento, etc. Il a voulu dire : du champ. Mais pourquoi ce b? Un à
final se serait assourdi, Aurait-il voulu écrire un p très aflaibli et presque
indistinct? » Je crois que le copiste a voulu dire non pas du champ, mais du
Chambon, en bas lat. cambonem , mot qui parait signifier « champ cultivé»,
qui est peut être d'origine celtique et où, en tout cas, le b est primitif. D'où
il suit que les observations de M. l'abbé R. s'en vont à vau l'eau.
P. 230-253. M. l'abbé R. déploie beaucoup d'ingéniosité pour se persuader
que l'adjectif Ait dans des phrases comme : ou batri son Hit per « il battrait son
père lui-même », À né pd un” Hit poum « je n'ai pas une seule pomme », vient
de*eccu-iste. Malgré l'appui apporté à cette étymologie par une forme kilo,
signalée à la p. 249 dans le patois de Bagnols (Puy-de-Dôme), elle soulève
encore bien des difficultés, ét j'avoue que je demeure provisoirement incrédule.
P. 311. L'explication de l'ancien français mon par minus est ingénieuse,
mais bien peu vraisemblable ; sa signification n'est pas la même, il me semble,
que celle du cellefrouinais man ou men.
P. 310-312. Une des sources de l'en de Cellefrouin ne me paraît pas indi-
quée avec assez de netteté. « Il en est de même de en suivi d'une gutturale
ou d'une palatale : linguam, kng; cingulam, snlh; linteolum, leuso;
tenui, fngui; *venui, vengui; *prenui, prengui; et dans les mots sui-
vants: sentio, sn; sentire, senti; *deintus, den; sine, sn; auxquels il
faut ajouterle german. skella, éhenl; enfin in (i) donne aussi en: nutrimen,
nouren. » L'énoncé de tous ses cas se réduit à ceci : l'en actuel se trouve partout
où il ÿ a eu antérieurement in (5). Reste à montrer les sources diverses de cet
450 COMPTES RENDUS
système d'exactitude À outrance est décevant. Car en typographie, La division
des mots est nécessairement très nette, tandis que dans les mss. il est sou-
vent bien difficile de savoir si deux mots sont séparés ou réunis. Il ne faut pas
demander à la typographie ce que peut seul nous donner un fac-similé.
J'ai dit que les corrections proposées par M. O. étaient, en général, fort
bonnes, mais il en a laissé à faire. Voici quelques observations qui portent
sur le texte et sur la traduction. Je me borne aux corrections qui intéressent
le sens, négligeant celles, beaucoup plus nombreuses, et, en général, plus
faciles que l'on pourrait tenter pour remettre les vers faux sur leurs pieds, ce
genre de restitutions ne pouvant être entrepris sans une étude préalable de La
versification du poème qui allongerait démesurément ce compte rendu. V. 6$
Oë lui la ramist lote la terre. M. O. a bien vu qu’il n'y avait aucun sens à tirer
de là et il a traduit d'après le contexte : « Should carry her away with him
from the land, » ce qui évidemment n'a aucun rapport avec Le vers précité.
Je corrigerais O4 lui ara tote la terre, « With er (not bim) he will have the
whole land, » ce qui s'accorde parfaitement avec le contexte. V. 181, lire
SE non pur moine reûler. NV. 215, vosire, corr. nostre ; c'est le même cas qu'aux
vers 144-5 où M. O. a bien reconnu qu'il fallait le possessif de la première
personne et non celui de la seconde. V. 238-9, cor. Quant li reis out [la]
sojorné | CAu}lant [come] li vint a gré. V. 263 Host iuang (en rime avec
pas), v. 1917 dost iuaus (en rime avec Finglas). Le sens est sûrement « très
vite ». M. O. conjecture au v. 263 qu'inang est pour ésnaus, ce qui n'est pas
admissible, mais il propose aussi, à la note du v. 1917, vias, qui se trouve
employé de même (4ost vias) au v. 2802. Cette seconde conjecture est la
bonne, mais je ne puis m'empêcher de penser qu'ivas n'est peut-être point
une faute, car en catalan on trouve aussi fras pour tias. Je sais bien que
M. Mussaña, dans le glossaire qu'il a joint aux Sept sayes, dit qu'irus est
originairement une fausse lecture de cas, mais j'avoue que cette hypothèse
m'a toujours paru peu vraisemblable. V. 385, Pur se rendre le coleit, cor.
rckndre; ce mot est mal traduit par « submit », c'est le latin redimere, cf.
La vie de saint Edouard, vv. 542, 557, où du reste la traduction de M. Luard,
«to despoil », n'est pas exacte, et Guill. le Maréchal v. 1722. Le vers tout
entier signifie « par ce qu'il voulait lui faire payer rançon ». V. 395, Que il
quite s'en purreit partir. La rime est en er; il faut donc substituer abr à
partir. V. 595, Ne sai s'il iert delicere num, est mal traduit par « 1 know not
if he was liberated fn ». Serait-ce nun que M. O. aurait rendu par « then »?
Il faut corriger [u] mun, « or not ». V. 416, point, corr. fn! ; c'est du reste
ainsi que M. O. a compris. V. 429, Cor. Gnt a val € [gen] a pe
Vs ja nert remansus | Ne larrunt en nule manvre ; le premier vers
doit être comigé Ke ja por els] n'ert remansuz, et le sens n'est pas du tout
« That never would they be left behind », mais « That it will never remain
Case) for (on account of) them ». Cet emploi du verbe remaindre est bien
connu; par es. Gill. le Mar., v. 11102 : Ne remeist jus for nul asvir | Se
ble viande ert troëve | Quel ne fust tantost achatés. V. 698, Dés que vus serre
454 COMPTES KENDUS
et aussi des notes ajoutées parle copiste ou par le traducteur #. M. U. n'a pas
su bien distinguer ces deux genres d'additions, et souvent il a rejeté en
note des morceaux qui, omis primitivement par le copiste et ensuite rétablis
par lui en marge avec renvoi, devaient prendre place dans le texte. Il n'a
pas non plus toujours vu à quel endroit devait se placer l'addition.
M. Ulrich dit dans son « introduction » que la valeur de la traduction
ainsi que de l'extrait (l'extrait, c'est le texte Latin de Philippe) est nulle, S'il en
est réellement ainsi, il ne fallait pas faire la publication. Mais je crois qu'entre
les mains d’un éditeur consciencieux et instruit, les morceaux que renferme
le ms. add. 17920 auraient pu donner matière à une édition intéressante et
en somme facile à mener à bien. Ce n'est malheureusement pas la première
fois que M. Ulrich s'acquitte d'une manière insuffisante des tâches qu'il
s'impose. P. M.
1. J'ai donné quelques spécimens de ces notes dans mon rapport de 1866.
2. M. U. imprime ordinairement (mais non toujours) en italiques, on ne sait pourquoi
(car il ne donne à cet égard aucune information au lecteur), les additions marginales du
ms. qu'il fait passer dans le texte,
PÉRIODIQUES
ZerrscHRIFT FOR ROMANISCHE PHILOLOGIE, XVI (1892), 1-2. — P. 1.
G. Voretzsch, der Reinhart Fuchs Heinrichs des Glichezare und der Romans de
Renart (An). [Ce consciencieux travail semble clore définitivement les discus-
sions sur les rapports entre le Reinbart Fuchs de Henri le Glichezare et la com-
pilation des branches du Roman de Renart. M. V. a divisé son étude en
deux parties : 1° les épisodes du R. F. correspondent-ils à des branches que
nous possédons ou ont-ils eu pour prototypes des branches plus anciennes et
disparues ? 20 L'ordre des aventures dans le poème allemand était-il celui
de l'original ou estl l'œuvre du traducteur ? Pour conclure sur la première
thèse, M. V. à fait un examen minutieux de chacune des vingt-quatre aven-
tures qui composent le R. F. Quand elles correspondent visiblement à des
branches du R. de R., il dresse d'abord un tableau comparatif du morceau
allemand et du morceau français qui indique ce qu'il y a en plus ou en moins
dans l'un et dans l'autre; puis il discute point par point les différences. Le
résultat auquel il aboutit est des plus intéressants ; il nous renseigne non seu-
lement sur le poëme allemand, mais aussi sur la formation de la compilation
française. Ce n'est la plupart du temps, en effet, que le squelette de la rédac-
tion française que nous donne le R. F.; celle-ci est un remaniement ou plu-
tôt le dernier terme d’une série de remaniements opérés entre l’époque où a
écrit le Glichezare et celle où ont été copiés les manuscrits français en notre
possession, c'est-à-dire entre la fin du xue siècle et le xive siècle. Le texte
allemand se rapproche beaucoup moins des récits des branches que des allu-
sions éparses dans le R. de R. et comprises dans les diverses confessions où le
goupil rappelle tous les tours qu'il a joués ; c'est par elles surtout que nous
pouvons remonter à l'état le plus ancien de ce que les trouveurs ont appelé
l'estoire du Renart, Non moins utile est la contribution qu'apporte cette étude
à la connaissance des rapports des branches entre elles. L'histoire en particu-
lier des branches relatives aux épisodes du Jugement et du Lion malade était
encore obscure, malgré les recherches de Knorr et de Martin ; elle nous appa-
rait plus claire maintenant, et nous saisissons mieux ce que chacune ren-
ferme d'archaïque et de moderne. Bref, sur les 24 aventures du R. F., 15,
suivant M. V. — nous verrons tout à l'heure que ce nombre doit être porté à
16 — ont leurs parallèles dans le R. de R. Parmi les autres, deux sont certai-
nement de l'invention du Glichezare, la XXIIe (envoi de l'éléphant sur la
L'IMAGE DU MONDE
RÉDACTION DU MS. HARLEY 4333
Le ms. du Musée Britannique Harley 4333, duquel j'ai déjà
tiré deux morceaux précieux, le dit du Chancelier Philippe (Rom.,
1, 210) et une rédaction particulière du Chastie-musart (XV, 603),
renferme un texte de l’mage du Monde qui se distingue de tous les
manuscrits connus du même ouvrage (et l’on en connaît environ
70) par un long et curieux prologue qui ne se rencontre point
ailleurs. Ce qu’il y a de plus intéressant dans ce prologue, c’est
la fin (vv. 637 et suiv.) où l’auteur nous apprend qu'il a dédié
son poème, en premier lieu 4 Robert d'Artois, frère de saint
Louis, et en second lieu à l’évèque de Metz, Jacques, frère de
Mathieu II duc de Lorraine. On sait que Robert d'Artois fut
tué à la bataille de Mansourah, le 8 février 1250. Quant à
Jacques, son épiscopat dura de janvier 1239 au 24 octobre 1260,
date de sa mort.
Les termes de cette dédicace demandent à être pesés.
L'auteur, qu'il ne faut plus à hésiter à appeler Gautier de Metz,
selon la rubrique du ms. de Du Cange, récemment retrouvé à
Cheltenham ', nous dit qu’il donna * d’abord son poème à Robert
d’Artois, puis qu’il fit le second envoi (Lo secont mex) à l'évèque
de Metz. Il faut donc exclure l’idée que le poème muni du pro-
1. Voy. Romania, XXI, 299. En décrivant , dans les Notices et extraits des
mss., ce ms. jusque-là considéré comme perdu, j'ai dit par erreur qu'il conte-
nait la première rédaction. En réalité, c'est la seconde qu'il renferme. Ce qui
m'a trompé, c'est qu'il se termine par la conclusion propre à la première
rédaction.
2. L'auteur parle à la première personne ; dona (v. 643) est la forme lor-
raine qui répond à donai.
Romania. XXL, si
482 P. MEYER
logue que nous offre le ms. Harléien serait dédié à la fois à
Robert d’Artois et à l’évêque de Metz. Dédier simulranément
un livre à deux personnes d'un rang aussi différent eût été
inconvenant. Gautier veut dire évidemment qu’il a successive-
ment dédié son œuvre au frère du roi de France et à l’évêque
de Metz. Et comme en fait nous avons deux rédactions de
l'Image du Monde, V'une datée de 1246", l’autre de 1248*, il ne
me paraît pas douteux que la première rédaction — celle qui a
été de beaucoup la plus répandue — a été présentée à Robert,
et la seconde à l’évêque de Metz.
Cette conclusion, qui a, au point de vue historique, une
évidente importance, se heurte à l’idée généralement admise,
selon laquelle la seconde rédaction de l'Image du Monde serait
l'œuvre d’un simple copiste, qui aurait interpolé en certains
endroits et raccourci en d’autres la première édition. Je dois
dire que cette opinion, produite fort légèrement par V. Le Clerc,
dans son article de l'Histoire littéraire sur l'Image du Monde, m’a
toujours paru insoutenable ou du moins très faiblement soute-
nue. Voici comme Le Clerc exprime sa pensée (Hist. dit,
XXII, 324) :
Cette rédaction ainsi défigurée, et que précède ordinairement une table
rimée des chapitres, nous paraît l'œuvre d'un copiste messin qui avait du loi-
sir et surtout un grand amour des contes : il n'en trouvait pas assez dans le
poème primitif, et, pour en ajouter beaucoup d'autres, le moindre prétexte lui
a sufñ. On a vu que l'ancienne composition n'est pas exempte de ce
désordre : la description du phénix, les merveilles de Virgile, que donnent
tous les manuscrits, sont peut-être de trop longs épisodes ; mais on y garde au
moins quelque mesure, Il n'y en a plus dans la nouvelle forme. L'auteur avait
nommé Charlemagne, saint Paul, saint Brandan et décrit quelques animau:
L'interpolateur ajoute aussitôt de longs détails sur Charlemagne, où il est fait
mention de l'église de Saint-Estève et de l’abbaye de Saint-Arnoul de Metz;
les voyages un peu moins longs de saint Paul, puis sans aucune autre
transition que ces mots qu'on retrouve, ainsi qu’une certaine partie des addi-
tions, dans le ms. 7989 * (fol. 115 ve) :
Ms ci de saint Pol nos tairons
Et de saint Brandan conterons,
12 1246 nouveau style; voir ci-après, p. 504.
2. 1248 nouveau style (9 mars 1247); voir ci-après, p. 498.
L'IMAGE DU MONDE 487
Bien s'antent qui sa langue tient 128 Autres se chastie de lui.
104 Fors qant de Dieu parler convient. * Sexultez sole oste dolor (sic)
Fox est qui n'entent son pooir, Et confors tout tote paor.
Qex il est et q'il puet valoir.
Li hom q'a soi meïsme plait
108 À Deu et a monde desplait.
* En mal sofrir doïes entendre
+ Qui de cest monde a meins de
[eure,
* Cil est de plus haute nature.
L'enviex senble que li biens
*Purgement des biens Deu aten- C'om done autrui soit li siens
Lare. [biens.
Conpaiz a bon entendement * Qui de science se sorcuide
112 Est cil qui volentiers aprent. 136 *De sapience son sens vuide ;
“N'est mie mors qui bien raconte, “Qui plus en digneté s'alieve,
*Ne cil povres qui sen senz dote. *Qant ele li faut plus li grieve.
* Qui plus s'umelie entre sages * Porpenz est clers de verité,
116 * Plus i aprent de bons usages. 140 * Car qant li hom s’a porpensé
“N'aies cure de rason rendre + De dire chose q'il ne doit,
* Fors cex qu'a toi quierent apren- * Tantost conest et aparçoit
dre. (4) * La verité de son afaire
+ Petite maisons a po terre, 144 * Que sa folie li fait faire.
120 * Mendre dolor et maindre guerre. * Li fox vuet toz jors desprisier
Plus liez doies estre de taire + Ce dontil ne ce sceit aidier.
.J. mal que d'un bien a retraire. * Qui la chose blasme ne prise
* Iriez te garde de pechier, 148 * Angois q'il en ait rien aprise,
124 * Au feble t'espargne a vengier. * Nuns ne l'en doitcroire derien,
* Li sages hom ne li decreit * Caril n'en seit ne mal ne bien.—
“Ne revelent paz lor secreit. *Porce volons id prover
Qui ne se chastie d'autrui 152 * Et rasenablement mostrer
103-128 Cf. 2174, fol. 38 d; 25343, fol. 41 b; Musée Brit. Roy. 20. À. I,
fol. 48 vo, etc. Ces vers sont précédés dans ces mss. des vers Tholomeus j.
rois gentils, qu'on retrouvera plus loin dans le ms. Harl. au fol. 38 ç.
Ces dits de Ptolémée sont bien certainement tirés des Dicta philosophorum,
ouvrage latin traduit de l'arabe, qui, depuis le xuure siècle, a pénétré par des
traductions en diverses littératures du moyen âge. Je cite les passages utilisés
par l'auteur de l'Image du Monde, d'après le ms. Bibl. nat. lat. 6652 (fol. 58-9),
restituant entre [ ] quelques mots oubliés, à l'aide du ms. du Musée Britan-
nique addit. 16906 (fol. 49). On pourra lire la version espagnole de ces pas-
sages dans les Mittheilungen aus dem Eskurial de H. Knust (Bibliothèque du
Litterarische Verein de Stuttgart, tome 141), pp. 317 et suiv. La version de
Gautier de Metz est fort libre et contient diverses maximes qui manquent
dans le latin, ou du moins dans les textes que j'ai à ma portée : « Dinit :
Convenit sapienti quod de Deo erubescentiam habeat, nec in alio quam in eo
plurimum meditetur. — Et dixit : Sapiens est qui in Dei eloquentia statuit
et roborat linguam suam (ww. 103-4) et insipiens est qui non agnoscit etiam
L’IMAGE DU MONDE 491
De vesteüres d'or molt chieres 368 Richement, et fist amener
332 Et chaucement a riches pieres, De Rome ilueques les columpnes
Corone riche, et cort adèz De marbre q'ancor i sont bones.
Molt grant des barons loiget prèr. Main et soir on mostier estoit
Tenprez en boivre et en mengier; 372 Et a matines relevoit.
336 As autres jors a son mengier Vers povres fu, humles toz dis,
Avoit de qatre mès adès; De son regne et d'autre païs;
Sanz lo rost qui venoit après. Par tot lor fesoit molt de biens.
Volentiers menjoit veneson, 376 Puis q'il les seûst crestiens,
340 Et au mengier li lisoit on La pecune lor envoioit.
Les hystores des anciens Les rois Sarrazins q'il savoit,
Don volentiers oioit les biens. Qui crestiens avoient s0z ex,
Pou li avenoit nule fois 380 Il recevoit l'amor de cex,
344 Boivre au mengier plus de Q'as crestiens qui soz eax fussent
fois; Feïssent plus d’amor q'il puissent.
En esté, puis disner, menjoit Tant ot de biens en Charlemene
Pomes et une fois bevoit, 384 Que nuns lo vos diroit a peine.
Puis reposoit une hore ou dous. Qant il vit que prèz de mort fu
348 Par nuit ce relevoit toz sols Et q'il defailloit de vertu,
Trois fois ou quatre; a l'esvillier Si manda son fil Loeïs
Toz bestenz fasoit apasier. 388 Et les barons de lor païs,
Bien fu parlans, voisox et sages, Evesgez, duz et cuens palaiz :
352 Et si sot de plusors lengages : (b) A Aiz lor dist en son palais
Greu et latin si bien parloit Et amonesta par amor (c)
Q'en latin Deu adès oroit. 392 Q'a son fil portassent honor
Les ars liberaus molt ama Et li feïssent fealté.
356 Et toz jors s'i estudia. Petis et granz a demandé
Del cours des estoiles savoit, C'il lor plesoit que de son fil
Que sor totes riens li plasoit. 396 Feïst empereor, et cil
Par nuit s’en relevoit sovent De part Deu l'otroient joiant.
360 Por encerchier lor errement, La dimenche après maintenant
Car tex science affiert a roi, Com empereres s’atorna,
En sa chambre escrivoit par soi 400 A la maistre eglise en ala
Tables, livres de sutils sens, Q'il meïsme fondée avoit;
364 Qant il en pooit avoir tens. Desus lo maistre auteil tot droit
Sainte eglise ama dès s'enfance, Fist metre .j. nueve corone.
A toz clers porta reverence. 404 Qant orei out, si arasone
L'eglise d'Aiz fist aorner Son fil et ammoneste molt
336 Ibid, xxv. — 350 Le texte est peu clair; voici le latin : « …statim
litigantes introducere jussi, et, velut pro tibunali sederet, lite cognita, sen-
tentiam dixit » (ch. xxv). — 351 Ibid, Xxv. — 365 Ibid, XXVI. —
373 Ibid. xxvn. 383 Ibid., xxx, — 385 Thegan, Vita Ludovici pit, ch. V1.
L'IMAGE DU MONDE 495
*Delatin est trais et formez ; Li secons gel chose Deus fist
636 * Mès ne sui pas si toz sencz Angois qu’il autre rien feist,
*Ce ne fust j. sols hom gentils Que c'est et que il devenra :
+ Fils de roi prodom et sutils 664 C'est de nature q'il crea; (8)
*Freres au roi Loys de France Li tiers por quoi il fist lo monde
640 * Qui conquist lo fer et la lance, Ou tant de bien toz jors abonde,
* La corone Deu et la croix : Et por quoi fist a sa senblance
+ C'est li contes Robers d'Artois. 668 L'ome et li dona teil poissance
A celui lo dona premiers, De fare bien ou mal cil vuet
644 * Car il aprenoit volentiers; Del bien a bien, do mal se duet.
“Et après fi lo secont mez Li quars est por quoi et conment
+ A l'avesque Jake de Mez, 672 Les ars furent premierement
+ Frere lo duc de Loheregne, Trovées et aprés savées
648 * Mon evesqueetsignor demeine. Par lo deluge et retrovées
Des prodomes qui se penerent,
Qui vuet entendre en cest con- 676 Et comment il les ordenerent;
[manz, Après de chascune art par soi
Si puet aprendre en cest romanz Conment ele vaut et a quoi;
Plusor afaire de clergie Por quoi ars liberals ont nom;
652 Dont amender porroit sa vie. 680 De .ïj. genz qui sont par rason;
Cist livres qui deserit lo monde, De l'aliance des .vij. ars
Qui a non ymiage do monde, Q'as .vij. vertus ont lor esgars
Dous parties de livre tient Coment eles vindrent en France
656 Dont li premiers livres contient 684 De leu en leu par la poissance
vi. chapitles de bele escole : Charlemene qui assez sout,
Ce sont .vj. somes de parole. Et en aprist tant com il pout.
Li premiers chapitles si est Li quins est de philosofie
660 De Deu dont tote bontez nest; 688 De cest monde quele est sa vie;
640-1 conquist signifie « acquit ». C'est en 1241 que ces reliques furent
envoyées de Constantinople à saint Louis par l'empereur Baudouin 11 de
Courtenai, qui les avait engagées aux Vénitiens pour une forte somme
d'argent. Saint Louis les dégagea et en devint légitime possesseur, comme
Baudouin le reconnut par un acte de juin 1247 qui est imprimé dans Morand,
Hist, de la Sainte Chapelle royale du palais (Paris, 1790, in-4e), pièces justif.,
p. 7. Cf. Le Nain de Tillemont, Vie de saint Louis, Il, 409 et suiv. —
649 En, corr. a. C'est ici que commencent les mss. de la seconde rédaction,
par ex. le ms. de la Bibliothèque Phillips qui donne en rubrique le nom de
l'auteur, Ceux de la première rédaction ont, avant ce vers, un autre prologue
de dix vers dont le premier est Qui bien vuet entendre a cest livre; voir Roma-
nia, XV, 315.— 65r-2. Au lieu de ces deux vers on lit dans la plupart des
autres ms. quelques vers dont la substance et parfois le texte littéral se
retrouve plus haut, vv. 13 et suiv.
496
est fortune, que sont richesces
De cex qui aiment les nobleces ;
Del loux do mont, qui l'a ou non,
692 Des fauces genz qui quierent non;
Por quoi fu trovée monoie,
Et merchandise mise en voie
Li semes chapitles reconte
696 Des philosofes maint bel conte
De Platon et puis d'Apollone,
D'Alixandre de Macedone,
De Vigile qui fist merveilles
700 Tels que nuns n'oï les pareilles;
De S. Poul qui quist et troya
S'ymage dont ce mervilla,
Coment les bons clers converti; (c)
704 De S. Brandan d'Illande ausi
Qui par la mer .vij. ans era;
Des mervelles q'il i trova;
D'un philosofe qui descrit
708 Conment nature .j. home fist;
De celui qui sa mere ocist
Par la parole qu'il enquist ;
De Tholomeu qui tant enquist
P. MEYER
712 D'astronomie et qui descrist
Lo monde et sa droite meniere,
‘Tant tient la partie premiere:
S'i a encor meint autre afaire
Que bien orrez après retrate,
Si dirons premeraîns ici
De Deu qui lo monde establi,
Dont il nos fist si grans bontez,
Que jai riens n'essiens estez,
Ainz fussiens ausi com perdu,
Conme chose c'ongez ne fi.
Si prions au conmencement
A Deu lo roi omnipotent
Qv’en cestlivre nos doinr entendre
Teil bien et tel science aprendre
Qui nos conduie et nos enmeint
En saint paradis où il maint,
Or oiez au dit premerain
Da glorious Do /, Deu) soverain.
16
720
728
Quant Dex fist lo monde premiers
M. Fant a cité, dans sa dissertation sur l'Image du Monde,
quelques morceaux de ce poème selon les deux rédactions,
afin d'en montrer la différence. Voici l'un de ces morceaux
d’après le ms. harléien. Il appartient au 4° chapitre de la
première partie. On verra, en comparant avec les deux textes
donnés par M. Fant, p. 19 de la dissertation précitée, que
notre ms. reproduit la deuxième rédaction. Je cite quelques
vers de plus que M. Fant, tant au commencement qu’à la fin:
Si regarderent de la lune
Que si deversement est une
Celonc ce qu'ele apert a monde,
À l’une fois clere et reonde,
Et a l'autre aparoit demie, (f. 10 b)
Ausi comme par mi tranchie ;
Aprèz cornue devenoit.
Ensi defaillant s'en aloit
Tant qu'ele n'estoit plus veüe,
Et puis raparissoit cornue,
Puis demie et puis tote plene
Si com devant et ausi saine,
Ensi com ele fait ancore;
Et retenoient en memore
Lo tens et lo nombre des jors
Oue le parfaisoit son cors.
Ensi ce travilloient lors
N'aasoient pas tant lor cors
Q'il en lassassent a enquerre
Les biens Deu por aise de terre;
Car qui son cors vuet aesier
A l'arme tolt son desirrier ;
L’IMAGE DU MONDE 497
Aise de cors dolor a arme.
N'orent cure de teil reclaime,
De grans mengiers ne de mols lis.
Plus chier avoient les delis
De l'arme qui ne puet morir
Que del cors d'il convient failir.
L'arme amoient plus que lo cors;
N'amoient pas vie de pors.
Ne queroient fors tant mengier
Qu'il en peñssent alegier
Lor faim por lor cors sostenir
Et lor vie en santei tenir,
Si que de lor sens ce peñssent
Aidier ensi com il deñssent
Por venir a la droite sente
De la glore Deu, dont li trente
Vivoient lors plus longement
Que ne font orendroit lé cent.
Je transcris le morceau suivant relatif à Charlemagne, parce
qu’il renferme un certain nombre de vers qui auraient dû
prendre place plus haut dans le prologue et qui ont été dépla-
cés, semble-t-il, par une simple erreur de copiste.
Car par nature et par usage (f. 16) En l'eglise riches et bias
Doient li roi savoir clergie Q'il i laissa et en fist don
Et aprendre philosofie, A saint Estene lo baron,
Car Charlemenes molt ama La maistre eglise do pais
Philosofie et avança Ou ancor gist .j. de ces fils,
En France de tout son pooir. Li rois Loeïs, qui sanz guile*,
Toz les bons clers qu'il pot savoir A S. Arnout, devant la vile,
Mandoit et recevoit o lui. Une abaïe de noirs moines
Mainte peine ot et meint ennui Ou meint bien fist rois Charlemenes 5,
Por crestienté avancier, Qui tant ce pena a sa vie
N'onques por ce ne volt lassier Et en son regne amena clergie.
Qu'il ne tenist clergie a près, Ancor i est, ancor i regne
Et aprist volentiers adès (b) Par la proesce Charlemene,
Et sout assez d'astronomie, Dont as oirs est bien avenu
Si com il récônte en sa vie" Quant si bien lor en est cheù,
Qui a Mèz en Loyregne gist, Car a toz jors ont conquestei ;
Don cil fu qui cest livre fist. Senz de clergie en lor cité.
La vout rois Charles sovent estre, Or se peinent del retenir
Car molt ama lo leu et l’estre. Et la vile en pais maintenir,
Ancor à il de ces jueas Car se clergie s'en aloit
1. Corr. come l'en irueve.
2. Cor. R. L. qui fu s. g.
3 Cest ici que les mss. de la seconde rédaction (ce morceau n'existe pas
dans la première) placent les vers Por amor de ses ancessors, etc, que le ms.
Harléien (ci-dessus, p. 490, wv. 283 et suiv.) introduit dans le prologue. Il est
bien possible, du reste, qu'il y ait simplement dans ce ms. une trinsposition
ayant pour cause un déplacement de feuillet dans l'original, car il y à ici en
marge à côté du vers Ou meint bien, un signe de renvoi qui se retrouve au
fol. 3 d avant le vers Por amor, etc.
Romanis, XXI. 32
L'IMAGE DU MONDE 499
C’est à ce passage qu'ont été empruntés, on verra tout à l’heure
comment, les dits de Prolémée, insérés dans le prologue,
wv. 103 et suiv. Citons d’abord le texte du ms. Harléien :
Tholomeus, j. rois gentils (f. 384) Plus prisa science q'avoir
D'Egipte, sages et sutils, Ne lo monde, dont il dist voir,
Ne clama mie l'aler ! quite, Li plus hauz hom de tot lo monde
Ancore fust il rois d'Egipte, Est cil qui plus prise lo monde.
Ainz enquist ment regne et maint livre Cil rois sot plus d'astronomie
Por rendre a Deu l'arme delivre. Que nus hom c'onques fust en vie,
Plusors rois i ot Pharaons, Fors Adam li premerains hons
Et plusors Cosdroé par nons ; Qui des .vij. ars sout la rasons
Aprèz vindrent li Tholomeu, Entierement et si a droit
De cex i ot j. sage et preu Qu'il conessoit qant q'il veoit;
Qui ne prisa pas tant son regne Don tantost com Deus lé mostroit (4)
Que clergie li fust lonteine, Une beste, et il la nomoit,
Ainz s'en tint près tant com il pot, Et mist a chascune son non
Tant que des [set] ars assez sot. Lonc sa nature et sa rason
Dans les mss. de la seconde rédaction, les vv. 103 et suiv. de
notre prologue prennent place ici, comme suit. Je cite le ms.
Bibl. nat. fr. 25343,fol. 41 b:
Plus prisa science qu'avoir Cil est li plus haus hon del monde
Terrien, dont il dist be savoir + : Qui mains chaut de l’estre del monde.
Bien s’entent qui sa langue tient L'envieus semble que ses biens
Fors quant de Deu parler covient; Soit ce qu'on tout autrui ses biens.
Non sachans est qui ne cognoist Li hom puet bien avoir gaigner
Qu'il puet, qu'il vaut et quels il est. Et avoirs l'omme quant l'a chier.
Li hom qu'a lui meïsme plest Amor et hayne ensement
Le coros Deu seur lui atret. Pervertissent droit jugement.
Aversité sofrir estuet Porpens est clés de verité.
Qui au monde remanoir velt. Ce dist cil rois qui, de par Dé,
Compai[n]s a son entendement Sout plus de l'art d'astronomie
Est chascuns lone ce qu'il aprent. Que nus hons qu'onques fust en vie,
Soiés plus liés d’une error tere Gad.
Que d'un bien dire ne retraire. Fors Adan le premerains hons
Li cuer des justes gens decrès Qui des .vij. ars sout les renons.
Sont monument de tos secrès. Entierement et si a droit
Qui ne se chastie d'autrui Qu'il cognoissoit quant qu'il veoi
Autres se chastie pafr] lui.
1. l'errer dans 25343 ; lerreit dans 20. A. Il, reler dans 14961.
2. Vers incorrect; B. N. fr. 1444 (fol. 194 d) Terrien dont dist grant
savoir.
L'IMAGE DU MONDE sor
Ou en breton ou en englois, Ce de maistre apris ne l’avoit
En greu ou en sarrazinois Ou Deus miracles n'i fasoit.
Ou autre, aprendre en covenist, Ce sont livre que tot sanz mestre
Qui clergie savoir vosist, G. 390)
Latins n'est fors c'uns briez lengages Puet l'en savoir ce que puetestre,
Par quoi l'en aprent les usages Qui bien c'i vuet estudier ;
De clergie gen latin sont. Autel vos di do romancier :
Greu et Sarrazin, qui les ont Maintes choses sont en romans
En arabit et en grizois, Dont chascuns n'entent pas lo sens,
Les aprenent selonc lor lois, Ancor sache il bien lo langage.
Et nos q'en latin les avons Cist livres est de teil usage
Par latin savoir les poons Que chascuns qui est de bon sens
Qest lengages briez et communs L'entent, c'ili vuet metre tens :
Entre crestiens; por ce chascuns N'a rien q'il ne puisse aprendrer.
Qui latin seit ne s'entent mie
Par tot es livres de clergie. Cil qui n’entent a premier lire
De vie ou d'ystore de gens Puet entendre par sovent dire.
Puet l'en tost entendre les sens,
Que des parfons sens de clergie En ceste partie seconde,
N'entent l'en pas sanz grant mestrie. Qui est de la forme do monde,
Maint livre en latin sont escrit A par conte .xv. chapitles
Don nus hom n'entendroit lo dit, Entitulez de .xv. titles
Por latin q'il seüst parler : Et de vint et quatre figures
Tote i porroit sa vie user, Qui del mont mostrent les fatures.…
Le prologue qu’on vient de lire est bien celui que la seconde
rédaction place en tête de la deuxième partie; mais, pour la
suite, le ms. Harltien se rattache plus à la première rédac-
tion qu’à la seconde. Ainsi la seconde rédaction introduit,
au début du troisième chapitre (description du monde), la
légende de Seth*, que l'auteur déclare avoir trouvé à Saint-
Jean-d’Acre, dans une église dépendant de Mont Sion. Cette
légende manque complètement dans le ms. Harléien dont le
texte est ici celui de la première rédaction :
La premiere regions d'Ase (f. 45) Leans est li arbres de vie.
Est paradis, li leus pleins d'aise, Qui avroit mengiet de cel fruit
Si plens de joie et de solaz Jamais ne morroit jor ne nuit,
Que nus n'i puet devenir la Mës nuls hom aler n'i porroit
N'enveillir de nule partie Sangles ou Deus ne l'i menoit,
1. Le copiste, s'étant aperçu qu'il manquait un vers, a laissé ici un blanc.
2. M. Fant l'a analysée longuement (p. 31-2) sans savoir que c'est une
légende des plus répandues, voir Romania, XV, 326.
L'IMAGE DU MONDE
503
de la hautesce des estoiles), quelques vers où se trouve encore une
date :
Des estoiles do firmament (f. 65 c)
Dont tant i a, vos di briement
Que totes ont une hautesce,
Mais ne sont pas d’une grandesse.
LU: 6 4)
Adansi fust toz jors alez,
Dès lor q'il fu premiers creez
-xxv. milles: chascun jor,
Ne fust il pas a teil labor,
Ainz eüst a aler ancore
Par .vij. [cens] et .xij. ans, dès l'ore
Que cis livres fust premiers faiz,
Qui premierement fu parfaiz
As rois a l'aparition
En l'an de l'incarnation
M. ce. xl. vif. * ans;
Tant meist à aler Adans
Dès lors ainz q'il fust jusque la 3...
Li recors de tout L livre (fol. 69).
Dès ors finerons cest romans
On (sic) qeil avez oï conmens
De Deu qui nature crea,
Por quoi le monde après forma,
Por coi il fist de teil afare
L'ome q'il puet mal et bien fare,
Coment que l'en trova premiers
Les .vij. ars et de lor mestiers,
Conment eles furent salvées
Par lo deluge et retrovées,
Coment paîs remuez ont (sic)
Tant g'en France venues sont
Par Charlemene lo bon roi
Qui Damedeu ama de foi.
Aprèz avez rason oïe
Del sermon de philosofie,
Qfest li mondes et g'est fortune
Et des richesces c’on aûne,
Del loux do mont, de fole vie,
De monoie et de marchandie,
Des philosofes qui cerchoient
Lo monde ou adès aprenoient (e)
De Platon qui vesqui sanz guile
Puis d'Apollone et de Vifrigile,
De S. Pol et de saint Brandan
Qui par la mer erra meint an;
Comment nature .j. home fist;
De celui qui sa mere ocist;
De Tholomeu le sutil home ;
Ce est en la premiere somme.
En la seconde oï avez
Coment li mondes est formez,
Conment la terre est en mi monde,
Et conment ele se devise,
Puis de la mappemonde l'estre :
Premiers do paradis terrestre,
Puis d'Inde et de ces regions,
Des oisias, des gens, des poissons,
Des bestes, des serpens d'enqi,
Des pieres, des arbres ausi,
D'Europe et d'Afrique aprèz,
Des illes qui sont loig ou prèz,
Des merveilles conmunes, puis
Où enfers siet li puans puis;
De l'ewe qui terre environe,
Conment elle soit, male ou bone;
Des fluns, des diverses fontenes
Dont mervilloses sont les veines,
Dont la mer saleüre prent;
Conment la terre crolle et fent;
De l'air, conment les nues vienent;
Coment plue et grelles avienent,
Coment il tone et espartist ;
1. Les autres ms. (2174, 25343, Phillipps, etc.) ont lieues.
2. Ms. Phill, meclu.; mais c'est une leçon isolée et sans valeur.
3: Jusqu'au soleil.
L'IMAGE DU MONDE sos
As Rois, a l'aparicion Qui dou siecle volez entendre
Mile .ije.xl.v. ans Qez chose et conment ce est,
Fu premiers perfaiz cist romans. Et conment va'et toz jors est.
Vos qui avez of l'escrit Ici faut de la mappe monde;
De nostre signor Jhesu Crit Proiez Deu qu'i nos face monde
Et puis do mont eui Deus forma, Et nos pardoint toz les pechiez
Li siegles une autre forme a Dont chascuns est si entechiez.
Que par cesti poez aprendre
On voit qu’en somme le ms. Harléien nous offre une combi-
naison de la première rédaction avec la seconde, augmentée
d’un prologue en grande partie nouveau. Cette combinaison
a-t-elle été faite avant l’achèvement de la seconde rédaction? En
d’autres termes, avons-nous là un premier état de la seconde
rédaction ? Je ne le pense pas, malgré la date 1246 donnée au
début du prologue, car le ms. Harléien contient l’épilogue de
la seconde rédaction, et cet épilogue est bien probablement la
partie la plus récente de cette rédaction. Je crois que Gautier de
Metz, ayant achevé en janvier 1246 son poème, le remit aussi-
tôt sur le métier. C’est ce qu’indique la date 1246 donnée par
le prologue du ms. Harléien. La seconde rédaction ne peut
pas avoir été achevée avant le 9 mars 1248 (n. st.) puisque
cette date est celle de l’un des morceaux ajouté (p. 498). C'est,
selon moi, plus tard que l’auteur, voulant tirer du même sac
une troisième mouture, aura écrit le prologue qui caractérise
le ms. Harléien, et laura joint à un texte où la seconde
rédaction domine. J'admets volontiers, du reste, que les copistes
peuvent être tenus pour responsables de certaines des particula-
rités de ce texte, par exemple de l'addition de la date finale, qui
nest à sa place que dans la première rédaction.
Paul Meyer.
tionnellement conservé, comme je l'ai dit plus haut (p. 481, note), la conclu-
sion propre à la première rédaction. Le ms. Harléien présente cette particu-
larité qu'il se termine par la conclusion de la seconde rédaction à laquelle il
ajoute les douze vers contenant la date 1245, qui, en réalité, ne s'appliquent
qu'à la première rédaction.
1. Cor, nest, C'est ici que le poème s'arrête dans la plupart des mss. Les
deux derniers vers se rencontrent aussi sous cette forme :
Quel cose c'est et comment va
En empirant tous jours s'en va,
CMs. Phillips.)
Quant aux quatre vers suivants, ils sont l'œuvre d’un copiste.
512 A. THOMAS
Hilarem, “Jr, Ne (dans Sanch Ile, devenu Saint-Chile au moyen âge,
auj. Saint-Chly, Lozère).
Isara, *Lwra, l'Isère, rivières.
lampada, lampega® (cf. tepida, tbesa).
Lazarum, Lager (cf. cicerem, cr).
Mimate, Memde, Mende, Lozère (cf. amita, amda).
monachum, mongue, mongue, morgue, monje (cf. canonicum, cano-
neue, etc.).
orphanum, orfé(n).
platanum, *pladé(n), *plader.
raphanum, raf(n).
Rhodanum, Ron), Ro.
sabbatum, mpée, sabde (cf. subitum, sopte).
sinapi, senebes.
Stephanum, Estfe(n), Estewn) (cf. juvenem, jou).
Telemate, Tallende (Puy-de-Dôme). (v. Mimate).
tympanum, éempe (Chans. de la croisade contre les Albigeois, 5961, 6663,
et 8841).
Devant /, l'a posttonique se change de même en e:
“bufalum, drufe.
Mairoialum, Mairgel (charte du xue siècle, no 505 du Cartul.. de
Conques), aujourd'hui Saint-Jean-de-Marujols (Gard).
secalet, sel, sel.
actuelle gabo, à côté de gaudo. (Voy. Mistral, Tréor, vo gawelo.) La forme
provençale actuelle gavélo (par confusion de suffixe pour gavelo) suppose une
forme gaveda, qui a ensuite déplacé l'accent (cf. mango pour mdnso, de
manica, lampéo, de lampada, etc.)
1. Voy. Devaux, Essai sur la langue vulgaire du Dauphiné sepientrional
(Paris, Welter, 1892), p. 213.
2. Aujourd’hui lampéo, avec déplacement d’accent; de même que dhéo,
dans certaines régions.
3. Ces formes se déduisent de la forme actuelle Hladre, usitée en Velay,
d'après Mistral.
4. P. Meyer, Re. d'anc. textes, p. 161, ligne 55.
$: M. G. Paris a montré (Romania, 1890, p. 468-479) que l’on doit accepter
“oïalum et non -oiolum comme étant la forme primitive de cette catégorie
de noms géographiques.
6. Je ne cite pas Burdigala, Bordeaux, parce que la filiation n'est pas très
claire. M. Meyer-Lübke (Gramm., p. 532) croit que Burdigala était par-
oxyton et qu'il est devenu, par métathèse, Burgidala, d'où l'anc. franç.
Bordele, ce qui est évidemment erroné. Le français doit être mis hors de cause,
AISE * 525
quelques exemples dont la plupart n’ont pas besoin de com-
mentaire :
Si (ma donna) no m'aixis lai on ill jai
Si qu'ieu remir son bel cors gen.
(B. de Ventadour, Lonc temps, ms. À.)
E car plus pres de vos nom puosc aiir.
(A. de Mareuil, Si com lé pris, ms. A.)
E sil plagues que pres de si m'aitis".
CP. Vidal, Per melhs sofrir, éd. Bartsch, p. 78.)
Jois nom pot esser guitz,
Car ves celliei cui sopleja
E s'autreja
Mos cors non estai aigifg.
(G. Faïdit, Pel joi, ms. 4.)
De l'approche à la postession, il y a bien près, au moins dans
les désirs des amoureux et des troubadours. Aussi n’oserions-
nous décider si c’est le sens de « approcher », employé active-
ment, ou celui de « posséder » qui conviendrait pour traduire le
verbe aixir dans les deux exemples suivants :
Ben saup lo mel de la cera
Triar, el mielhs devezir,
Lo jorn quem fetz lieys aixir.
(R. d'Orange, Una chansoneta, ms. C, fe 202.)
Si m'ampara
Cill cui trahutz
D'aigir
Si, qu'es de pretz capduoills»,
(A: Daniel, éd. Canello, IX, 52.)
Enfin à côté de aigir, le provençal a aussi aiginar. M. P. Meyer
a déjà signalé le sens de « approcher » dans son glossaire de la
Chanson de la croisade contre les Albigeois. Ce sens se trouve plus
d'une fois ailleurs. Je me borne à en relever deux exemples :
1. On ne s'explique pas que Barisch n'ait pas reconnu dans ce passage le
verbe aitir et ait cru devoir rapporter cet exemple au verbe assire avec lequel
il n'a rien à voir.
2. Les mss. portent soit agir, soit augir. Canello a bien vu qu'il fallait
corriger aigir ; c'est ce qu'il a fait; mais il a mis après air une virgule qui
gâte tout : il faut certainement construire d'aitir si, de l'approcher.
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 531
ait été entamé par le couteau du relieur, surtout dans la partie
supérieure, ses dimensions sont encore 208"® pour la hauteur
et 140 pour la largeur. La reliure en carton recouvert de
veau est du siècle dernier ; sur le dos, on avait imprimé, en or,
un titre qui était fort probablement ainsi conçu : MÉMOIRES DE
Boxsser; il n'en reste à présent que des débris. Parmi les
feuilles de garde, qui ont été réparées, la plus ancienne est
endommagée par des piqûres de vers qui ont entamé par ci par
là le ms. lui-même. Une main moderne ÿ a écrit: Mémoires
historiques. 1372-1400.
Fol. 1 r-9 v°. Il n’est pas commode de décrire ces feuillets,
qui, sans doute par suite d’une bévue du relieur, se trouvent
aujourd’hui placés en tête du ms. dont ils formaient, à l’ori-
gine, les dernières pages. Nous y trouvons, en effet, des
comptes datés de 1389, qui font suite À ceux qui se lisent dans
les feuillets 74 et suiv. de notre ms.; ces comptes ont été
presque toujours biffés par Boysset, qui y a même écrit quel-
quefois en surcharge de nouvelles notes; si on ajoute à cela les
dégâts causés à ces feuillets par l'humidité, on concevra aisément
qu’il soit fort difficile d'en indiquer avec exactitude le contenu.
Toutefois, sur le recto du premier feuillet, nous avons pu
déchiffrer en partie la note des dépenses faites par Boysset en
1389 (?), à l’occasion d’un voyage d'Avignon à Arles :
Item per pan que compram per lo camin
Item per lo quaraton que nos portat a T'arascon.
Item per pasar a Belquayaron (?).
Item per pasar ad Arle que fon nuc;
Item per Bernat (?) Amayson quant enquabasem per vi]
csitrons... .. ..
Item per lo mesagier que portet la letra
Sur le verso de ce mème feuillet, Boysset avait tenu compte
des « despensas quant montem Avinbon an l'anguila ; cela cut lieu
le 18 de janvier 1389 (1390, n. st.) ; mais on déchiffre très mal
les détails. Aux mêmes jours — 25, 29 janvier — appartiennent
les comptes qui occupent les feuillets 2 r° et vo. Le recto du
1. Lire portet?
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 535
Ce morceau manque dans le Musée; on le lit dans le ms. de
Paris, fol. 15 v°.
CLAPIER
L'an .m. ie, .lexij. lo jomn xvj. de desembre fon plantat lo plantier
del clapier de la legna, so es a saber .xviife. malhols, e si confronta an la
vinha de mi Bertran Boysset et a doas partidas an l'ermas' de mi Bertran
Boysset et an l’ermas de Nicola * Avansat.
Ce morceau manque aussi dans le Musée; le ms. de Paris le
donne au fol. 16 r°.
L'ALBA
Dans le Musée, il y a deux rédactions de ce morceau : celle
donnée par notre ms. à la p. 222; l’autre à la p. 14.
LA TINA GRANT
De ce morceau, qui se lit aussi dans le ms. de Paris, fol. 15 ve,
lc Musé donne deux rédactions : la nôtre p. 222; l’autre
p- 18.
LA LONA SEQUA
NEUET
NÉVET
FERAGUT
F. Musée, p. 14. Dans notre ms., le récit est plus court que
dans l'imprimé; il s'y arrête aux mots : el en fon gitat an gran
dexonor.
ÉCLIPSI DEL SOLELH
Musée, p. 25.
ECLIPSI DE LA LUNA
Musée, p. 26.
1. Après ce mot, Boysset avait écrit del, qu'il a effacé.
2. [Nicolet dans la copie de Bonemant. — P. M.]
536 F. NOVATI
* FEMENA QUE NON AVIE BRAS
Musée, p. 26.
Fol. 36 r°-37 r°. Notes de Boysset sur la naissance de ses
onze enfants. Elles commencent ainsi :
E non de Dieu amen.
cc, -kxij. lo jorn -x. de febrier nasquet Maria Boysset, etc.
. xxxxiij. lo jorn .xxiij. d'abril de matin, que era digous,
nasquet Huget Boysset, etc.
Ces notes ont été imprimées, d’après notre ms., dans le Musée,
p. 204. Mais elles se trouvaient toutes à leurs dates dans le
ms. copié en 1772 par Bonemant; et, par suite, se lisent aux
pages I, 13, 14, 26 et 27 du même recueil.
[MORT DE L’ARSIVESQUE D’ARLE]
Musée, p. 57. La partie inférieure du fol. 37 a été coupée;
mais plus tard on l’a rapprochée de nouveau à l’autre moitié et
fixée à sa place à l’aide d’une bande de papier collée sur le
verso du feuillet, qui est blanc.
Fol. 38 r°. PLANTIER DE JUSTA JO. DEL PONT
Musée, p. 230, d’après notre ms.
ESTELAS CASENT
Musée, p. 26.
NEVET
L'an .m. aie. .Ixxxix., lo jo xxvij. de novembre, nevet que ac d'espes
dos pals, e la nueg d'aquest jorn siguent ploc e leguet ben las doas parts.
Item, la tersa part restant non fon leguada de .vilj. jorns. Item ploc lo jom
primier de desembre e tota la nueg siguent.
Ce morceau manque dans l'imprimé; mais il se trouve dans
le ms. de Paris, fol. 18 v°.
Fol. 38 ve. PLOC MOT LONGAMENS
Item lo jorn segon del dig mes non ploc, mas tota la nueg siguent ploc.
Item lo ters jorn del dig mes ploc e la nueg siguent. Item lo quart jom del
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 537
dig mes ploc c tota la nueg siguent. Item lo .v. jorn del dig mes ploc; la
nueg non.
Ce morceau non plus n'est pas donné par l'imprimé.
VENC LO REY DE FRANSA AD AVINION
Musée, p. 26.
LA QUANTARELA
Musée, p. 27.
Fol. 39 r°. CANT FON ASETIADA LA SIEUTAT D'ARLE
L'an «m. ie. .Ixviij lo jorn .xj. d'abril que fon lo ters jorn de pasquas?,
monssen Lois duxs d'Ango frayre del rey de Fransa asctiet la sicutat d'Arle, ct
aqui tenc per el seti monssen Bertran de Cliquin conte de Longuavila entro
lo jorn primier del mes de may, et aquel jorn s'en aneron, eseptat aquels que
resteron mortz?.
Ce morceau, terminé par une réflexion que M. de la Palisse
n'aurait pas jugée indigne de lui, n’est pas autre chose que la
traduction fidèle d’un paragraphe de l’ter Italicum de Garoscus
de Ulmoisca-veteri, dont nous allons parler tout à l’heure3. Il
manquait dans le ms. que Bonemant a copié et, pour cette rai-
son, il n'apparaît pas non plus dans l'imprimé4.
GRAN NEBLA
Muse, p. 27.
Fol. 39 vw. FON TALHAT LA VINHA
Musée, p. 229. D’après notre ms., mais pas en entier.
[remresra]
Musée, p. 44.
QUANT JO. DE BETIZAC FO CREMAT
Musée, p. 27 et ms. de Paris, fol. 19 r°.
1. En face de cet alinéa, il y 4, dans la marge du ms., à gauche, ces
mots écrits par une autre main : Fom asetiada la vile d'Arle. »
2. Ces derniers mots ont été ajoutés après coup par Boysset.
3 Cfr p. 538.
4. M. Fassin l'a toutefois réimprimé, d'après Baluze, dans Le Musée, p. 198.
538 F. NOVATI
Fol. 40 r°. "LO REY RETORNET A PARIS
Musée, p. 27.
FON DESCONFIDA LA GALEOTA DE BREGUANSON !
Musée, p. 28.
Fol. 40 vw. L'EMPERADOR FON CORONAT 2?
L'an .m. ie, inv. a ii. de junis fon l'enperador monssen Karles +
d'Alamanha en Arle per eser coronat; e fon coronat detras l'autar de san
Trofeme, e coronet lo monssen G. de la Garda arsivesque d’Arle. Era hi
present monssen R. d'Agout senesqual de Provensa, lo conte de Savoia, lo
duc de Borbon e motos quavalier autres e grans senhos. — Item deysendet
a l'arsivesquat. — Item era granda roanada quant intret en Arle per lo portal
de la Quavalariaé,
Ce morceau, qui manque dans la copie de Bonemant et par
conséquent dans l'imprimé?, a été publié d’après le ms.
de Paris, où il se lit sur le recto du fol. 1, par Baluze, Vite
Paparum Avenionensium, I, col. 985, qui, par une étrange
méprise, l’a donné comme écrit par ce Garoscus, dont Boysset
avait immédiatement après copié dans son livre l’Jter Jialicum
Urbani. Trompé à son tour par Baluze, M. Fassin a réimprimé
dans le Musée (p. 198) ce fragment relatif au siège d’Arles,
dont nous avons déjà parlé, en l'affublant d’un titre très reten-
tissant, mais, hélas! fort peu justifié : « Extrait des mémoires
« de Garoscus de Ulmoisca-veteri, citoyen d'Arles vivant au
« milieu du xiv: sièc
4
1. Les mots « de bregrumson » ont été ajoutés plus tard par Boysset
2. Ceue rubrique qui se trouve dans la marge a &té écrite par la même
main qui a ajouté celle relative au siège d'Arles, au fol. 39 re.
3. En interligne.
4. Monssen Karles est ajouté en interligne ; à côté, il y avait dans le ms. un
autre mot qui, à la suite d'une rature, est à présent illisible, Ce mot est lu
savon par Bonemant. C'est en effet Charles 11, empereur.
s. Boysset avait écrit a, qu'il a barré. Le ms. de Paris porte « dereire ».
6. Ces paragraphes ont été ajoutés plus tard par Boysset.
7. [ll manque dans la première des deux copies de Bonemant, celle qui
est imprimée dans le Musé, mais il se trouve à sa place, p. 6. dans la
seconde, celle du ms. des Trinitaires. — P. M.]
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 539
[Lo ser1 DAVAN LO BAS]
L'an .m. .iije. xxx. a x. de juni ?, pauret ? emes lo scti l'amiral de
Fransa davant lo Baus.
Ce morceau, qui se trouve aussi dans le ms. de Paris,
fol. 20 r°, est suivi dans le Musée, p.27, de plusieurs lignes qui
manquent ik
QUANT FON FAG LO GUAST
Musée, p. 28, et ms. de Paris, fol. 20 v°.
[PONS LAURENS PENDUT]
Musée, p. 28, et ms. de Paris, fol. 21 r°.
Fol. 41 r°. FORON FACHAS FORQUAS
Musée, p. 28.
QUANT VEGNERON LAS GENS DE BREUGANSON
Musée, p. 28, et ms. de Paris, fol. 20 v°.
FON DESCONFIT LO PRINSE D’AURENGUA
Musée, p. 45, et ms. de Paris, fol. 21 v°.
Fol, 41 w. QUANT FON APELAT DEL PAPA
Musée, p. 44, et ms. de Paris, fol. 21 v°.
Fol. 42r°. LA FENNA QUE NON AVIE BRAS
Musée, p. 44.
QUANT SI BASTI LA MARTELIERA DE MAYRANA
Musée, p. 14.
1. Les mots « a .x. de juni » ont été ajoutés en interligne.
2. M, Fassin lit « fausel » ; mais « pauret » est donné par notre ms. et par
celui de Paris. [Bonemant avait lu pausel.]
3. Ces lignes fournies par le ms. de Paris sont celles-ci : « Car mons.
« Raïmon de Torena tenie lo luoc desus dig e faie gera a Proensa sensa rason ;
« € motos mals en lo pays fes. » Même texte (sauf variantes graphiques dans
le Musée, qui ajoute : « Item, aqui demoret lo seti asas de tems; € apres fon
« levat et apres fon pausat, etc. »
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 541
quatre quardenals viels e los novels que avie fag, elegiron papa Bonifazi;
ct aquel vieu e gouerna lo papat en Roma. Item, papa Clement vi, que fon
elegit [fol. 43 ve] apres papa Urban vi en Fondis per despieg del davant
dig papa Urban vi, visquet papa o lo non tenent en la sieutat d'Avinhon
-xvj.ans e mori soptamens. E mort que fon lo colege d'Avinhon elegiron per
papa lo cardenal de la Luna, quatalan que es, e per so non es apelat mons.
P. de la Luna. Son titol fon papa Beneret xin et aquel governa lo papat
d'Avinhon à sa volontat.
Cf. Musée, p. 13, et ms. de Paris, fol. 14 r°.
QUANT FON TALHAT LO BOSC
Musée, p. 230, d’après notre ms., où, dans la marge, ily a
ces mots presque illisibles : Wacat quia in numerero (sic) est des-
cripta .Ixxxxv. Voy. aussi ms. de Paris, fol. 19 v°.
L'ESMAGE DE SANT JAUMES
Cf. Musée, p. 44, où le morceau est plus complet que dans
notre ms., qui omet les dernières phrases : « facha que fon. la
sobre dicha esmage. »
L’ENSULT DE MONPEYLIER
Fol. 44 r°.
Le texte de ce morceau présente dans le Musée, p. 14, des
modifications considérables. Notre ms. donne ici des armoiries
dessinées à l’encre rouge.
TEMPESTA
Musée, p. 44.
Fol. 44 v°. CURADA LA ROBINA
Musée, p. 229, d'après notre ms., où le paragraphe a été biffé
par Boysset, qui a écrit en marge : vacat.
NATZ DOS ENFANS D'UNA BESTIA
Musée, p. 44. Les mots « et aysins fon fag, que batejas foron »
manquent dans notre ms., dans la marge duquel Boysset a des-
siné un autre écusson, surmonté par un chapeau de cardinal.
Ce sont peut-être les armes’du cardinal de Saint-Ange, Pierre
Blavi (1596-1409). "
LE LIVI
DE RAISONS DE B. BOYSSET 543
de l'écrivain, qu'ici il a, au contraire, supprimé; il s’appelait
Garoscus de Ulmoisca veleri
[rer GREGoRIr PP. x1] Début (fol. 50 ve)
E non de Dieu amen. Gregorius papa xr°.
Anno domini «me. cc. .Ixvj. et die sabati .xif. menssis septembris
dominus noster papa Gregorius undesimus exivit de Avinione pro eundo ad
partes Romanas, etc.
Fin (fol. 52 vs) :
Hem anno quo supra, et die martis .xxs. marc fuit translatum corpus
domini nostri pape Greporii .x1. de sancto Petro ad sanctam Mariam novam
et de dicto loco debet portari ad casam Dei. Cuius anima requiescat in pace.
Amen.
Cet itinéraire de Grégoire XI, qui a été bien évidemment
écrit par un personnage de sa suite, et tout ce qui suit relatif à
la mort du pape, se lit aussi dans le ms. de Paris, fol. ix-xj, et
dans le Musée, p. 2-3.
Fol. 2 0-54 re, Noverint universi quod anno + Domini me. .ccce. .Ixx
ct die sabbati .xxvij. menssis marcii, quasi ad duas homas noctis, sancte
memorie dominus Gregorius papa x1 migravit ad Dominum in Roma.
Musée, p. 12-13, où ce document est intitulé : Nova creatio
Pape, et ms. de Paris, fol. xij re.
Fol. j4ro. Anno .mo.
fuit dies sancte Pasche, ete.
. Ixxviij. Item, die dominica .xvii
Musér, p. 13, ms. de Paris, fol. xiij ve
cean qui décrit le couronnement du pape.
iii. C’est le mor-
Fol. 54 v°. LO REY D’ARAGON 5.
Musé, p. 49. Au fol. 55 r°, dans la note des personnages
est imprimé « ex reteri codice ms. Bibliotlecae Regie ». C'est à Garoscus que
Baluze a attribué aussi les récits du couronnement de Charles IV et du siège
d'Arles. :
1. [On verra plus loin que ce nom baroque est le résultat d'une mauvaise
lecture de Baluze. — P. M.]
2. Dans la marge, les armoiries du pape surmontées des clefs de saint Pierre.
3. C'estadlire 1378.
4. Boysset avait écrit après anno « qu cf die qui », qu'il a rayé.
5. Armes d'Aragon peintes en rouge, surmontées d'une couronne royale,
dans la marge.
544 F. NOVATI
qui prirent part au diner du roi, notre ms. laisse en blanc le
nom d’un évêque. Cette lacune se rencontrait aussi dans l’exem-
plaire de Bonemant et est passée dans l’imprimé.
Fol. 55 r°.
L'an .m. ie. JIxxaxvij, Îtem donet papa Benezet al sobre dig rey la roza
a mieia quarema.…
Must, p. 50.
Fol. 55 vw. [pos ENFANTS QUE si TENON]
Musée, p. 45.
[Lo REY D'ARAGON]
Musée, p. 50. Dans l’imprimé, comme dans notre ms., est
laissé en blanc le nom d’un des cardinaux qui dinèrent avec le
roi à Avignon le 29 mars 1397. Dans la marge, Boysset, selon
son habitude, a peint en rouge les armoiries du prince.
Fol. 56 r°. TERRA TREMOL
Item l'an .mo. e tres sens .Ixxxxvij., lo jorn .xxvj. de maÿ o la nueg
siguent fon terra tremol mot gran e duret que foras avant: dos trags de nera
© pauc mays o pauc mens. E venc esgual la mieya nueg e fazie bel temps e
clar e ben seren e gran bonasa, € fon un di mergue al seras.
Ce morceau manque à l'imprimé.
1. POL AN Ii]. QUAMBAS
Item l'an .m. .ccc. .Ixxxavij. lo jorn .xii. de juni vi yeu Bertran Boysset
j. pol blanc, que avie a la part drecha tres quambas, etc.
Musée, p. 50.
FON MUDAT LO FORT
Item, l'an .m. .cec. .Ixæxxvij. lo jorn .vj. de jul, fon mudat lo port al por-
tal de Monpeylier, per despieg de monssen Jo. de Rochachoart, archivesque
d'Arle, per alcunas storsions, laqual pretendien gens que fazie far als uficies
sieus, a Trenquantalhas, a pluros gens que pasavan per aquel luoc, la qual
cauza non fon ver. Item, sachas que lo fes mudar lo sobredig port, o fon
cauza’, Jo. Rostan, Jo. de Vilamus, messer Bernat Teyseyre, Bernat Romieu,
St. d'Aurelhac, G.5 Raynaut, Frans de Brunet, Guinot Bernat, ed
1. [I y a anat dans le ms. de Paris, ol. xxvj ve, — P. M]
2. Les mots o fon cauxa en interligne.
3. Lisez Guilhem.
LE LIVRE DE RAISONS DE B. BOYSSET 545
autres per autras malenconias e demandas, la qual fazie far justamens mons-
sen l'arsivesque d’Arle als danant nomatz et a pluros d'autres. Îtem, feron
mays far motas antas e dezonor € naframens a las gens de l'ostal d'Arle de
Parsivesque d’Arle per St. d'Aurelhac, Nicolet Anantat, Jaumet Aymar,
Janmet Andrieu, Trofeme e Lionart Rodelh notaires frayres, lo filh de messer
Bernat Teyseyre e lo flh de Steve d'Aurelhac. Item, los davant nonnatz
feron tant e dieyseron que la cort rial o pres per tal maniera que tot cujet
anar a destrucion.
Cfr. Musée, p. 50. On y donne une rédaction très écourtée
de ce morceau, dans laquelle les deux derniers paragraphes
manquent.
QUANT BASTIRON LO PORTAL NOU DEL PORT O
DEL PORT NOU
Cfr. Musée, p. $o: Port novel. Dans notre ms., les derniers
mots « et aquel portal fon mays fag per voler que non fon per dever »
ont été ajoutés par Boysset, lorsqu'il introduisit partout les
rubriques, où elles manquaient.
Fol. 57 r°. [Lo sETr1 DAVAN PERTUS]
Musée, p. 50.
[REYMON DE TORENA]
Musée, p. 50-51.
Fol. 57 v°. [corpinor DEsconrT]
Musée, p. 51.
[MORTALITAT]
Musée, p. 51.
Fol. 58r°. [LA TORADA DE SANT HAPOLITE]
Musée, p. 51.
[AURA E FREJOR]
Muse, p. 51.
[RARLES ALBA]
Musée, p. 51.
Romania. XXL,
556 F. NOVATI
tion d’une note à l’autre, le texte des morceaux conservés ; cette
révision, toutefois, s’est bornée presque toujours à des retouches
qu'on peut dire insignifiantes '.
Voilà donc de quelle façon nous nous représentons les diffé-
rentes phases par lesquelles les mémoires de l’arpenteur arlé-
sien passèrent avant de rejoindre leur forme définitive. Le
premier anneau de cette chaîne est, à notre avis, le ms. des
Trinitaires, qui, après beaucoup d’aventures, que nous ne
connaîtrons probablement jamais, car rien n’est plus mystérieux
que les pèlerinages des manuscrits, a trouvé un refuge dans la
Bibliothèque de Gênes.
F. Novari.
1. Les morceaux qui concernent l'élection de Clément VII et les consé-
quences de cet événement (1378 : Muse, p. 13); la « Mala nus » de Mont-
pellier (1379 : Musk, p. 14); l'entrée de Feragut en Arles (1384: Musée,
p. 14); le siège de 1393 (Musée, p. 27); la demeure du roi Louis en
Provence (1400 : Musée, p. 58 suiv.; la chute de Castelnuovo (1400 : Musée,
p. 67), présentent tous des traces de remaniements considérables, Bien des
fois, Boysset a substitué à son incipif habituel : « L'an que desus, » la date
exacte de l'année à laquelle se rapportait son récit.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 559
historiques y tiennent la plus grande place, on reconnaîtra que
letitre de chronique ou d’annales est celui qui convient le mieux
à cet ouvrage.
Il en existe deux manuscrits anciens, l’un et l’autre de la
main de Boysset, celui des Trinitaires d'Arles, que M. Novati
a retrouvé et décrit, et celui de Paris que je vais décrire. Il a dû
en exister d’autres, deux au moins ?, qui sont représentés par des
copies modernes.
Je parlerai succéssivement de ces divers manuscrits.
Manuscrit des Trinitaires d'Arles, maintenant à Gênes. Au
sujet de ce ms. je serai très bref: le mémoire qu’on vient de
lire me dispense d’entrer dans de longs détails. Je me bornerai
à dire qu'avant la découverte de M. Novati, la rédaction qu'il
renferme pouvait être étudiée dans la copie excellente faite par
Bonemant au siècle dernier, et actuellement conservée à la
bibliothèque municipale d'Arles 2.
Cette copie est la seconde partie d’un volume in-folio écrit
avec beaucoup de soin, qui renferme deux textes différents de
Boysset. En premier lieu, celui dont voici le titre :
Mémoires de Bertrand Boysset, contenant ce qui est arrivé de plus remar-
quable, particulièrement à Arles et en Provence, depuis M cc LXxI1 jusqu'en
M cccc xnu, copiés et enrichis de notes et de pièces justificatives par moi
Laurent Bonemant, prêtre de la ville d'Arles, l'an de grâce 1772, le 12
de juin.
Début :
E non de Dieu, amen. Anno Domini me. né. Lxxu. die x° mensis febroarii,
nascivit Maria; Boysset
La copie, qui a l'air d’être préparée pour l'impression, est
paginée en chiffres romains, de .j. à .lÿ. Elle a été imprimée
1. On a vu plus haut que M. Novati suppose qu'il nous manque un seul
des manuscrits originaux de Boysset, celui qui est représenté par la copie de
Bonemant imprimée dans le Muse. Mais on verra plus loin les raisons à
l'appui de mon opinion.
2. Ce ms. ne porte pas encore de numéro. Il en aura un dans le catalogue
(sous presse) que M. l'abbé Albanès a rédigé des manuscrits de cette biblio=
thèque pour le Catalogue général des manuscrits.
3: 11 faut lire Martha, comme on Le voit par les autres copies.
æ 8il
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 567
nomna lo lona". ltem, era an mi Raïmon Bertemieu e Jaufre Chamba e
Guilhem Malet, e motos d'autres, quant pasem per la sobredicha lona que
era tota sequa, que non de vi de memoria d'ome. Item, lo ray * que ven apres
era tot sec. Item, l'eschan de la lona e del ray sobredig comenset a sequar per
mieg avost pasat.…
Viennent ensuite les actes de naissance, rédigés en provençal,
de Jaumet Boysset (10 mars 1378, n. st.), Honorat Boysset
(25 déc. 1378), puis la chronique latine reprend, à la mort
de Grégoire XI :
Anno Domini millesimo .cechkxviïi.,.et die sabbati .xxvi]. archi, circa duas
horas noctis, dominus noster papa Gregorius undecimus migravit (fol. xij)
ad Christum, et die lune .xxix. marcii fuit portatum corpus domini pape pre-
dicti in choro sancti Petri Rome, et ibi fuit factum officium, et ibi fuerunt
«avi. cardinales 1.
Suivent le récit de l'élection mouvementée d’Urbain VI4, et
ce paragraphe avec lequel se terminent les extraits transcrits par
Boysset :
(Fa. xiij ve) Anno Domini millesimo .lexviij.1, die dominica .xviij.
aprilis, que fuit dies sancte pascha, predictus papa Urbanus vies celebravit
missam in altare sancti Petri, et ibi fuit consecratus in presencia tocius
populi ; et postes, missa dicta, fuit coronatus in scala sancti Petri é, extra eccle-
Siam, supra unum solerium qui fuit ibi factum de novo, et in presencia
tocius populi. Istis factis, predictus papa recessit de Sancto Petro cum .xv.
1. On appelle lones, depuis Lyon jusqu'à la mer, les bras du Rhône où
l'eau est dormante, ou encore les terrains bas dans lesquels l'eau est restée à
la suite d'une inondation; voy. Puitspelu, Did. du palois lyonnais, sous
Loxa, et Mistral, Lono. Littré, en son Supplément, donne ce mot comme
spécialement lyonnais. Il n'est pas dans Raynouard, bien qu'ancien, Il y en
à dans Du Cange un exemple sous LAUNA, et un autre (mal expliqué) sous
LoNA. Un plus ancien exemple (entre 1043 et 1060) se trouve dans le Cartu-
laire de N.-D. de Nimes, p. 213: « et de alio loco ubi vocant ad lona longa. »
— A cette époque, Arles était entourée d'eau, sauf du côté du nord ; à l'ouest,
le Rhône ; au sud et à l'est, les étangs.
2. Source ; voy. Mistral, rar. Il ÿ a un exemple en ce sens dans Raynouard,
V3. é
3e Musée, p. 3.
4. Muske, p. 12.
5. Dans le Musée on à imprimé par erreur Ixxi.
6. La scala pape sur laquelle voy. Du Cange scALA, 10.
UNE ÉDITION GOTHIQUE
DE CHARLES D'ORLÉANS
M. Picot, rendant compte dans la Romania, t. V, p. 390-
393, des Cent quarante-cing Rondeaux publiés en 1875 par
M. Bancel, a dressé la liste des emprunts, excessivement rares,
faits aux potsies de Charles d'Orléans par des rimeurs peu scru-
puleux ou par des compilateurs d’anthologies de la fin du
xv° et du commencement du xvi* siècle. Cette liste n’a que
cinq numéros : deux ballades et trois rondeaux qui figurent
dans le Jardin de Plaisance, dans le Verger d'honneur ou dans le
manuscrit publié par M. Bancel. Voici les refrains de deux
ballades :
1. L'omme esgaré qui ne scet ou il va.
Ch. d'Orl., édit. d'Héric., I, 82. J. de Plais., édit.
Arnoullet, fs 149.
2. Tout est rompu, c'est à refaire.
Ch. d'Onl. I, 83. J. de Plais., fo 149 vo.
Rondeaux :
3: Sot œil, rapporteur de nouvelles.
Ch. d'Orl., Il, 133. J. de Plais., f 77.
4. Quant je fus prins ou pavillon.
Ch. d'Orl., Il, ro$. Verg. d'honneur.
$: Pour tous vos maulx d'amours garir.
Ch. d'Onl., I, 196. Bancel, 137.
Il n’est pas difficile d’augmenter cette liste. L'édition Vérard
du Jardin de Plaisance, outre les trois pièces citées par M. Picot,
renferme les sept rondeaux suivants :
1. Acquittez vostre conscience.
Ch. d'Orl., II, 146. J. de Plais., fe 81 ve.
582 A. PIAGET
C'est par vous que tant fort souspire.
Ch. d'Orl., II. 266. J. de Plais., ffes 86 et 124.
3. Des amoureux de l'Observance.
Ch. d'Or, I, 190. J. de Plais., fo 82.
En la forest de Longue Attente.
Forvoyé de joyeuse sente.
Ch. d'Orl., II, 166. J. de Plaïs., fe 98.
: J'attens l'aumosne de doulceur.
Ch. d'Or, II, 173.J. de Plais., fe 85 vo.
6. M'amerez vous bien?
Ch. d'Orl., II, 267. J. de Plais., fe 122 vo,
7. Quant je fus prins ou pavillon.
Ch. d'Onl., U, 105. J. de Plais., f 120 vo,
s
8
On trouve également dans le Jardin de Plaisance, édition
Vérard, le rondeau d’Antoine de Guise :
Hal mort, hélas!
Ed. Guichard, 408. J. de Plais., & go vo,
et ces deux rondeaux de Fredet :
En la forest de Longue Attente
Des brigans de Soussi bien trente.
Ch. d'Orl., II, 165. J. de Plais., fo 89 vo.
Pour mettre à fin la grant douleur.
Ch. d'Orl., I, 110. J. de Plais., f 82.
Le Verger d'honneur, À côté du rondeau cité par M. Picot,
renferme le rondeau suivant :
Gardez vous bien de ce fauveau.
Ed. Guichard, 426. Verger d'honneur.
Dans les Lunettes des Princes, on rencontre les deux rondeaux,
déjà relevés dans le Jardin de Plaisance :
C'est par vous que tant fort souspire.
M'amerez vous bien?
L'édition du Triomphe de l'Amant vert donnéc en 1535 à
Paris par les frères Denis et Simon Janot renferme, comme
l'indique le titre, outre le poème de Jean Le Maire de Belges,
UNE ÉDITION GOTHIQUE DE CHARLES D'ORLÉANS 583
« plusieurs balades et rondeaux nouveaux '. » Les trois ballades
ne nous intéressent pas. Les dix-huit rondeaux « nouveaux »
sont de Charles d'Orléans, de Fredet, du comte de Clermont,
de Jean Caillau, de Georges Chastellain, de Jean de Lorraine
et d'Antoine de Lussay. Les voici:
1. Rondel de Fredet [Ch. d'Orl. IH, 110]:
Pour mettre a fin la grant douleur.
2. Responce par Orleans [IL, 111] :
Pour mettre à fin vostre douleur.
3. Rondel [II, 119]:
Oncques feu ne fut sans fumee.
4. Rondel du comte de Clermont [II, 147] :
Le trucheman de ma pensee,
5: Rondel par maistre Jehan Caillau (II, 154] :
Las! le fault il ? esse ton vueil?
6. Rondeau [II, 164] :
En la forest de Longue Attente
Par vent de fortune dolente.
7. Rondeau [M®* d'Orléans, II, 164] :
En la forest de Longue Attente
Entree suis en une sente.
8. Rondel de Fredet [II, 165] :
En la forest de Longue Attente
Des brigans de Soucy bien trente.
9. Rondel de Orleans [II, 166] :
En la forest de Longue Attente
Forvoyé de joyeuse sente.
10. Rondeau [II, 171]:
Ainsi doint Dieux a mon cueur joye.
11. Rondeau [Fredet, II, 186] :
Je regrette mes dolans jours.
1. Le Triumpbe de l'Amant vert, comprins en deux Epistres fort joyeuses
envoyes à madame Marguerite Auguste, composees par Jehan le Maire de Belges,
indiciaire et hystoriographe de la royne, avecques pluseurs lelires missives amou-
reuses, plusieurs balades et rondeaux nouveaux. Paris, 1535, in-16.
586 A. PIAGET
Le sixiesme et derrenier
Est que serez tres diligent
Comme ung amant jolly et gent
D'apprendre tous gracieux tours
Qui pourront servir en amours,
Car les dames ayment tresfort
Ung amant qui mect son effort
D'estre diligent et actif,
Habille, saige et ententif,
Non point lourdault, ne estourdy,
Lasche, meschant et eslourdy *.
La Lettre de relenue est également travestie. En voici le com-
mencement chez Charles d'Orléans :
Dieu Cupido et Venus la deesse,
Ayant pouoir sur mondaine liesse,
Salus de cueur par nostre grant humblesse
A tous amans.
Savoir faisons que le duc d'Orleans
Nommé Charles, a present jeune d'ans,
Nous retenons pour l’un de noz servans
Par ces presentes ;
Et lui avons assigné sur noz rentes
Sa pension en joyeuses attentes
Pour en joir par noz lettres patentes
‘Tant que vouldrons *.
Saint-Gelais la reproduit presque textuellement, en ayant
soin, naturellement, de la démarquer :
Dieu Cupido et Amour la deesse,
Ayans puissance sur mondaîne liesse,
Salut de cueur par nostre hardiesse
À tous amans.
1. Je me sers de l'édition de Paris intitulée : La Chasse et le Depart d'amours,
nouvellement imprimee à Paris, ou il y a de toutes les tailles de rimes que l'on
pourroit trouver, composee par reverend pere en Dieu messire Octavien de
Sainct-Gelais, evesque d'Angoulesme, et par noble homme Blaise d'Auriol,
bachelier en chascun droit, demourant a Toulouse. — Cy fine la Chasse et
le Départ d'amours, nouvellement imprimee a Paris par la vuefve feu Jehan
Treperel et Jehan Jeannot. Bibl. Nat. Rés. Y: 300.
2. Tomel, p. 13.
UNE ÉDITION GOTHIQUE DE CHARLES D'ORLÉANS 589
Qui ne vouldroit tout ennuy abollir?
Nul ne tiendroit contre telle puissance !,
Après avoir à sa façon remanié les dix premières ballades, le
zèle de Saint-Gelais pour la rime riche tomba, et cet impudent
personnage voulut bien laisser tel quel le texte du manuscrit
qu'il copiait. Nous avons là 253 ballades et rondeaux exactement
reproduits, — il serait peut-être facile de voir d’après quel
manuscrit, — sauf, bien entendu, de nombreuses fautes d’im-
pression. C'est un joli chiffre! Ai-je eu tort d’intituler ces
quelques notes : « Uneédition gothique de Charles d'Orléans » ?
Voici, par ordre alphabétique, la liste des refrains des 62
ballades et celle des premiers vers des 191 chansons et rondeaux.
Refrains des ballades :
Acquittez vous pareillement.
* Ainsi je laisse le dormir.
* Ainsi m'ont rapporté mes yeulx.
+ Aussi bien au fol com au sage.
Autant de bien que j'ay de desplaisance.
A vostre joyeuse venue.
Car le dieu d'amours m'aydera.
Car trop ennuie qui attent.
Ce n'est fors que plaisant folie.
Ce n'est que miracle d'amours.
Ce peu de plaisir que j'avoie.
Ce premier jour du mois de may.
C'est une chose que fort doubte.
C'estes vous de qui suis amye.
Comme lors fut mon aventure.
De ces grans biens est ma dame garnie.
Des grans biens de ma seigneurie.
De mille l'un puist advenir.
Devant tous loyaulx amoureux.
Dieu doint qu'ainsi puist advenir.
Dieu scet en quel mauvais party.
En attendant bonne esperance.
* En esperant que brief vous voÿe.
En la prison de Desplaisance,
1. Cf. Charles d'Orléans, édit. d'Héricault, t. I, p. 18.
2. Les dix ballades marquées d'un astérisque ont été remaniées par
Octavien de Saint-Gelais.
590
A. PIAGET
En paine, souci et douleur.
En vous se dire je l'osoye.
Et le tresor de ma lyesse.
Fors que la mort tant seulement.
Gaignier le jeu entierement.
Helas! et n'est ce pas assez ?
Il ne faut ja que plus je vous en die.
J'aymasse mieulx de bouche le vous dire.
Je le tendray jusqu'a la mort.
Je l'oy crier piteusement secours.
Je pry a Dieu qu'il en ait l'ame.
Je pry Dieu qu'il les maudie.
L'amoureuse maladie.
Le droit de vostre seigneurie.
De plus grant bien qui me puist avenir.
Le rebours de ma voulenté.
Le tresor de tous biens mondains,
L'omme esgaré qui ne scet ou il va.
* Ma dame, le sauray je ja?
Ma dame, ma seule maistresse.
* Ma seule souveraine joye.
Mis pour meurir ou feurre de prison.
* Mon cueur qui est maistre de moy.
Ne lui vueillez a son besoin faillir.
* Nul ne tendroit contre telle puissance.
Ou coffre de ma souvenance.
Ou purgatoire de Tristesse.
Ou temps qu'aÿ congneu en ma vie.
Par les fenestres de mes yeux.
*Par vostre plaisant accointance.
Pour alegier mes griefs maux doloreux.
Pour bien et loyaument amer.
Pour ma maistresse souveraine.
Pour resveiller vos penses joyeuses.
Puisqu'ainsi est que de vous suis loingtains.
Quant il vous plaist d'ainsi me conforter.
Quant me donna le don d'amy.
Quant temps et besoin en sera.
Qu'encore est vive la souris.
Qui loyaument fait son devoir
S'a Leaulté ne vous rendez.
Se je ne fais une dame nouvelle
Si lui dis je que c'est folic.
Tousjours tres loyalle maistresse.
UNE ÉDITION GOTHIQUE DE CHARLES D'ORLÉANS
Tout enroillié de Nonchaloir.
Tout est rompu, c'est a refaire.
‘Treshumblement de toute ma puissance,
Tresor d'amoureuse richesse.
Chansons et rondeaux :
A ce jour de saint Valentin.
A ce premier jour de l'annee.
Acquittez votre conscience.
AI Dieu 1 qu'il m'anuye.
Ainsi doint Dieux À mon cueur joye.
A l'autre huis.
Alez vous en, alez, alez.
Alons nous esbatre.
Après une seule exceptee. [René d'Anjou.]
A qui les vent on?
A qui vendez vous vos coquilles?
A recommencer de plus belle.
As tu ce jour ma mort juree ?
A trompeur trompeur et demy.
Au besoing congnoist on l'amy.
Avancez vous, Esperance.
Avugle et assourdy.
Baillez lui la massue.
Beauté, gardez vous de mes yeulx.
Belle que je cheris et crains.
Bien assailly, bien deffendu.
Bien deffendu, bien assailly. [René d'Anjou.]
Bien viengne doulx regard qui rit.
Ce may qu'amours pas ne sommeille.
Ce n'est que chose accoustumee.
Ce n'est riens qui ne puist estre.
Ce qui m'entre par une oreille.
C'est fait, il n'en faut plus parler.
Chantez ce que vous pensez.
Chascun devise a son propos.
Chascun dit qu'estes bonne et belle.
Chascune vieille son dueil plaint.
Ci pris, di mis.
Comme j'oy que chascun devise.
Comment vous puis je tant aimer. ®
Contre le trait de fauceté,
Crevez moy les yeulx.
597
592 A. PIAGET
Cueur, a qui prendrez vous conseil?
Cueur endormy en pensee.
Cueur, que fais tu ? revenje toy.
Dedens mon sein, pres de mon cueur.
Dedens mon livre de pensee.
De la regarder vous gardez.
De la maladie des yeulx.
De leal cueur, content de joie.
De legier pleure à qui la lippe pent.
De riens ne sert a cueur en desplaisance.
Des amoureux de l'Observance.
Des arrerages de Plaisance.
Des malheureux porte Le pris.
De vostre beauté regarder.
Dieu! qu'il la fait bon regarder.
Dieu vous conduie, Doulx penser.
Dieu vous envoye pascience.
Dont viens tu maintenant, souspir ?
Durant Les treves d'Angleterre.
En amer n'a que martire.
En changeant mes appetiz.
Encore lui fait il grant bien.
En gibessant toute l'après disnee.
En la forest de Longue Attente, [Mme d'Orléans. ]
En la promesse d'Esperance.
En la querelle de Plaisance.
En la vigne jusqu'au peschier.
En mon cueur cheoit.
1. C’est le rondeau de la duchesse d'Orléans, édit. d'Héricault, t. 11,
p. 164:
En la forest de Longue Attente
Entree suis en une sente
Dont oster je ne puis mon cueur.
On trouve dans la Chasse d'amours d’autres rondeaux qui commencent par
le mème vers :
En la forest de Longue Attente
Entree suys en une sente
Ou nul espoir vers moy s'adresse,
En la forest de Longue Attente
J'ay trouvé ma dame endormye.
En la forest de Longue Attente
J'ay esté de moys plus de trente.
Geucourt. Cf. Raynaud. Rondeaux, p. 79-)
UNE ÉDITION GOTHIQUE DE CHARLES D'ORLÉANS
En mes pais, quant me trouve a repos.
Ennemy, je te conjure.
En regardant ces belles fleurs.
En songe souhait et pensee.
Entre les amoureux fourrez.
Envoyez nous un doulx regard.
Est ce vers moi qu'envoyez ce soupir ?
Et de cela, quoy 1?
Et de cela, quoy ? ?
Et eussiez vous, Dangier, cent yeulx.
Et ne cesserez vous jamais,
Faulcette confitte.
Fuyez le trait de Doulx Regard.
Gardez le trait de la fenestre.
Gardez vous bien de ce fauveau.
Gens qui cuident estre si sages.
Helas! me tuerez vous ?
Il me pleust bien.
Il vit en bonne esperance.
J'attens l'aumosne de doulceur.
J'ay esté poursuivant d'amours.
J'ayme qui m'ayme, autrement non.
Je congnois assez telz debas.
Je me metz en vostre mercy.
Je ne les prise pas deux blans.
Je ne prise point telz baisiers.
Je ne suis pas de ces gens la.
J'estraine de bien loing m'amie.
Je suis mieulx pris que par le doy.
Je vous arreste de main mise.
Jusques Pasques soient passees. [Fraigne.]
Laissiez aler ces gorgias.
Laissiez moy penser a mon ayse.
Las! merencolie.
La veez vous, la lyme sourde.
Le premier jour du mois de may.
1. Edit d'Héric., Il, p. 118 :
Et de cela, quoy?
Se souscy m'assault.
2. Edit. d'Héric., II, p. 118 :
Et de cela, quoy ?
En ce temps nouveau.
Romania, XAL.
593
594 A. PIAGET
Les fourriers d’Amours m'ont logis.
Les fourriers d'Esté sont venus.
Le temps a laissié son manteau. :
Le trouveray je jamais ?
Levez ces cueuvrechiefz plus hault.
Le vigneron fut attrapé.
Le voulez vous ?
Le voulez vous que tout vostre deviengne ?
Logiez moi entre voz bras.
Loingtain de joyeuse sente.
Ma dame, tant qu'il vous plaira.
Maistre Estienne Le Gout nominatif
Malade de mal ennuieux.
Marché nul autrement.
Ma seule amour, ma joye et ma maistresse.
Ma seule amour que tant desire.
Maudit soit mon cueur se j'en mens.
Me fauldrez vous a mon besoing.
Mes yeulx sont trop bien reclamés.
Mon cueur, il me faut estre mestre.
Mon cueur plus ne volera.
Mon seigneur tressupellatif.
Mon seul amy , mon bien, ma joye.
Mon tresbon hoste et ma tresdoulce hostesse.
N'est elle de tous biens garnie.
Noli me tangere.
Oncques feu ne fut sans fumee,
On ne peut servir en deux lieux.
Ou Loyaulté me payer2.
Où pis où mieulx.
Par Dieu, mon plaisant bien joyeux.
Parlant ouvertement
Par l'aumosnier Plaisant Regart.
Par le pourchaz du regard de mes yeulx.
Par les portes des yeulx et des oreilles.
Par m'ame, s'il en fust en moy.
Pense de toy.
Plus penser que dire.
Pour ce que Plaisance est morte.
Pour ce qu'on jouxte à la quintaine.
1. On lit dans la Chasse
Mais
UNE ÉDITION GOTHIQUE DE CHARLES D'ORLÉANS
Pour Dieu boutons la hors.
Pour le don que m'avez donné,
Pour les grands biens de vostre renommee.
Pour mettre a fin la grant doleur [Fredet].
Pour mettre a fin vostre doleur.
Pour paier vostre belle chiere.
Pourtant se vous plaignez d'amours. [René d'Anjou.]
Pour vous monstrer que point ne vous oublie.
Prenez tost ce baisier, mon cueur.
Puisqu'Amours veult que banny soye.
Puisqu'estes en chaleur d'Amours.
Puisque je ne puis eschapper.
Quant commenceray a voler,
Quant j'ay nomparcille maitresse.
Quant j'ay ouy le tabourin.
Quant je fus prins ou pavillon.
Quant je voy ce que ne vueil mie.
Quant tu es courcé d'autres choses.
Que c'est estrange compaignie.
Que cuidez vous qu'on verra.
Que faut il plus à un cueur amoureux.
Quelque chose derriere.
Quelque chose que je dve.
Que me conseillez vous, mon cueur ?
Que voulez vous que plus vous die?
Regart, vous prenez trop de paine.
Remede comment.
Rendez compte, Vieillesse.
Rescouez ces deux povres yeulx.
Retraiez vous, regart mal avisé.
Se dangier me tolt le parler.
Se desplaire ne vous doubtoye.
Se j'eusse ma part de tous biens.
Se mon propos vient a contraire.
S'en mes mains une fois vous tiens.
Se vous estiez comme moi. [René d'Anjou.]
Se vous voulez m'amour avoir,
Si dolant je me treuve a part. [René d'Anjou.]
S'il vous plaist vendre vos baisiers.
Sot ueil, raporteur de nouvelles.
Soubz parler couvert.
Tant que Pasques soient passees.
Tant sont les yeux de mon cueur endormi.
Tellement quellement.
595
596 A. PIAGET
Tiengne soy d'amer qui pourra.
Trop estes vers moy endeptee.
Ung cueur, un vueil, une plaisance.
Va tost, mon amoureux desir.
Veu que j'aÿ tant amour servi.
Vostre bouche dit : Baisiez moy.
Vous estes paié pour ce jour.
Arthur PiaGer.
NOTE ADDITIONNELLE. —- Nous avions reçu depuis quelque
temps l’article qu'on vient de lire, quand M. de Maulde-la-
Clavière, l’historien de Louis XII, nous a remis, sur le mème
sujet, une note qui aboutit, au moins pour les faits, aux mêmes
conclusions, car M. de Maulde ne juge pas le procédé d’Octavien
de Saint-Gelais aussi sévèrement que M. Piaget; il pense que
l'évêque d’Angoulème n’a pas cru mal faire en s’appropriant les
poésies de Charles d'Orléans, qu’il n'a pas voulu commettre
ce que nous appelons aujourd’hui un plagiat, et qu’il ne s’est
pas écarté des mœurs littéraires de son temps. Cette opinion
paraît difficile à soutenir quand on voit le soin, signalé par
M. de Maulde lui-même, avec lequel Saint-Gelais s'est cru
obligé de démarquer les noms propres. A la ligne 2 de la ballade
58, Duc de Bourbon est remplacé par Gentil honneur. et, à la fin,
Guillaume Cadier par Desir treschier. Dans la ballade de la page
428, qui est de Garencières, au v. 3 Garencieres est remplacé
par Amant parfait, et au lieu du titre : Responce de Garencieres,
Saint-Gelais donne : Ballade de l'Amant parfait au dieu d'amours.
Dans le titre de la ballade 74, qui est adressée par Charles
d'Orléans au mème Garencières, Saint-Gclais imprime de même :
De Cupido dieu d'amours.
Relevons encore dans la note de M. de Maulde les dates qu'il
indique pour différents membres de la famille de Saint-Gclais.
Le fils ainé d’Octavien, Jean, auteur d’une Histoire de Louis XII,
était né en 1457; Octavien, lui-mème (ou plutôt Octovien
comme il s'est toujours appelé suivant l'usage de son temps),
était né, non en 1466, comme les biographes le répètent d’après
Colletet, mais en 1468. Ces deux dates sont établies par des
enquêtes judiciaires publiées par M. de Maulde (Procédures
politiques de Louis XII, p. v'et 368). — Réd.
MÉLANGES
MASTIN
Diez tire le mot it. mastino, pr. fr. esp. mastin, d’un dérivé
de mansionem : mansionätinum (canem), le chien qui
appartient à la maisnie, le chien de garde, par opposition au
chien de chasse, de berger, etc. Le sens serait bon, mais la
forme est bien difficile à accepter. L'it. masnada << mansio-
nata, sur lequel Diez s'appuie, appellerait masnadino comme
dérivé (masnada lui-même est emprunté d'après M. Grôber,
Arch. f. lat. Lexik., NII, 526, mais ce n’est nullement assuré) ;
le fr. maisnada, l'a. fr. maisniede, appelleraient maisnadin, mais-
medin (plus tard maisneîn ; mesnin). Ou bien il faut supposer
déjà en latin vulgaire un mansiotinum avec chute de l’a et
de l’n précédente, ce qui est plus qu’invraisemblable. Le roman
s'explique très bien par un dérivé de mansuetum, man-
süétinum, le groupe ü& tombant comme dans costume de
consüétüdinem. Le sens convient également : un canis
mansuetinus est un chien familier, qui vit d'habitude avec
son maître, et par suite naturellement un chien de garde.
G. P.
ANTENOIS
L’anc. fr. anfenois, encore usité aujourd’hui dans plusieurs
provinces, signifie « agneau de l’année précédente ». Littré, qui
enregistre ce mot, y voit un dérivé d'antan, ante annum',
mais on aurait anfanois, forme qui ne se rencontre jamais.
1. M. Bos propose dubitativement ante annum ipsum; mais outre que
cette composition est bien peu vraisemblable, ipsum en français a donné es
et non eis ois.
LE GALLUS CALUMNIATOR DE PÉTRARQUE 6or
Le titre du f. 144 n'apporte sur le nom du Gallus qu’une
variante orthographique assez commune (Sequitur epistola
magistri Tohannis de Hisdino contra superiores epistolas), mais nous
y apprenons exactement quelles lettres de Pétrarque il avait en
vue en prenant la plume. Ce sont, dans l'ordre chronologique,
les lettres Fam. V, 19 (à Clément VI), Sen. VIL 1 (à
Urbain V, f. 132 du ms.) et Sen. IX, 1 (au même, f. 125),
C'est-à-dire les principales lettres par lesquelles Pétrarque a
traité devant les papes la question du retour en Italie. Deux de
ces lettres, celles qui sont adressées à Urbain V, ont une éten-
due exceptionnelle dans l’œuvre épistolaire de Pétrarque et sont
de véritables dissertations politiques. C’est à la dernière surtout,
celle qui a été écrite vers la fin de 1367 pour féliciter Urbain V
d’être rentré à Rome, que s'attaque l’auteur de l’Inwectiua.
Bien qu’il reprenne, par suite de l'analogie du sujet, quelques-
uns des arguments de Nicole Oresme dans la célèbre harangue
prononcée à Avignon au nom de Charles V, avant le départ
d'Urbain V, c’est Pétrarque et sa lettre qu’il vise personnelle-
ment. Le contexte ne renseigne pas sur la date exacte de la
composition. Pétrarque voudrait faire croire dans sa réponse
que son adversaire a mis quatre ans pour compiler son pam-
phlet?; il ne l’a reçu, en tout cas, qu’en 1371, année où il a
écrit l’Apologia.
Le nom de Jean de Hesdin attribué au Gallus par les
manuscrits de Paris est celui d’un écrivain scolastique connu
par d’autres ouvrages et sur lequel on a réuni quelques rensei-
gnements biographiques3. Ce nom est-il appuyé par les détails
qu’on peut recueillir dans l’Inuectiua et dans lApologia ? Le petit
parallèle suivant répond à cette question :
1. Le titre d'Inuectiua paraît de l'invention de P. ou de ses éditeurs. Je le
maintiens pour la commodité de la lecture.
2. Epistolc enim mea, quam hic Galliæ propugnator et appugnator Italie lace-
randam sibi dificilem certe prouinciam elegit, ad félicis sanctaque memoriae
Urbanum V Romanum fontificem ante hoc, ni fallor, quadriennium missa erat (Op.
1068) ; texte corrigé sur le Par. lat. 16232, f. 85.
3. La dernière notice sur J. de Hesdin est dans la Bioyr. nat. de Belgique,
IX, 311-312. Elle ne dispense pas de recourir au P. Lelong, Bi. sacra, Il,
796, à Oudin, Seript. eccles., Il, 1225-26, et Suppl. Belg., 506, et à Paquot,
Mém. lits, Il, 344.
LE GALLUS CALUMNIATOR DE PÉTRARQUE 603
Maxime (1063, 1066), d’après lequel il semble instruit de
plusieurs épisodes de la vie des héros romains (1067), Ovide
(1063, 1064)', Térence (1064), Justin (1064, 1065), Solin
(ro65, 1066), S. Augustin (1066, 1067)?.
Ces extraits, entassés à la façon scolastique, semblent indi-
quer l’œuvre d’un lettré de profession. Nous savons précisé-
ment que Jean de Hesdin a un bagage littéraire considérable.
Six ouvrages sont mis sous son nom par les biographes. Le plus
intéressant pour notre sujet est un recueil de Postilles sur Job,
qui est dédié au cardinal de Boulogne, patron de l’auteur,
mort en 1373. Un bel exemplaire en existe à la Bibliothèque
Mazarine, Max. 2003. Il ÿ a à la fin trois distiques adressés au
cardinal, qui ont été imprimés par M. Molinier. La dédicace
porte en titre : Reuerendo in Christo patri ac domino Guidoni de
Bononia Dei prouïdentia episcopo Portuensi ac sacrosancte Romane
ecclesie cardinali frater Johannes de Hysdinio sancte domus Hospitalis
sancti Jobannis Therosolimitant ordinem professus, vester bumilis et
deuotus orator. Cette dédicace débute par des citations accumu-
lées de Cassiodore, d’Aristote et des tragédies de Sénèque ; elle
ne renferme d'autre élément biographique qu’une allusion au
doctorat récemment obtenu par l’auteur. L'explicit ajoute au
nom de Jean de Hesdin la mention Doctor in sacra theologia et la
date : Et fuit completa anno Domini millesimo cc luij in uigilia
Jestiuitatis omnium sanctorum.
Puisqu’il n’y a aucune raison pour refuser à Jean de Hesdin
la paternité de l’ouvrage que lui attribuent nos manuscrits, on
doit remarquer tout particulièrement sa présence dans la mai-
1. La seconde citation vient du De uetula.
2. Mention finale de Salluste : Hir igitur sisto manum.… ne sipli insipidi
satictas fastidium ingerat audienti ; omnisque bonus ciuis Halicus seu Romanus ,
si placet, mibi parcat quia, ctsi iniuria pulsus, scripsi non tamen Salustio et suis
aucloribus grauiora (1067).
3: Aug. Molinier, Catal. des mss. de la Bibl. Magarine, 1, 73. Le même
catalogue décrit deux mss. d'un commentaire de J. de Hesdin sur S. Paul
(Max. 271, 272, 273), dont deux portent un explicit daté, l'un de 1354,
l'autre de 1364. La dédicace, vraisemblablement postérieure à la composition
de l'ouvrage, est adressée à Philippe d'Alençon (Molinier, I, 98, 99). Les Pos-
tilles sur S. Marc de la Bibl. nationale, Lat. 17287, portent la date de 1367
et n'ont pas de dédicace. Je n'ai pas eu en mains d'autres manuscrits.
LE GALLUS CALUMNIATOR DE PÊTRARQUE 605
dans l'Apolgia contre l'humble porte-parole du parti français
vient peut-être de la colère d’une amitié trahie.
Ce n’est pas ici le lieu d'examiner le détail de l’argumenta-
tion des deux adversaires. Les sophismes patriotiques se ren-
contrent chez Pétrarque aussi bien que chez Jean de Hesdin.
Celui-ci cherche du moins à ménager la personne mème du
poète et à mettre également hors du débat, dans ses violences
pédantesques contre la ville de Rome, l'amour-propre de la
nation italienne : Fateor enim, et uerum est, Italiam magnam par-
tem et bonam orbis esse, nec intentio cuiusquam es! uel fuit, ut credo,
sic eam déprimere ut isti ueritati contradicat *. Pétrarque ne garde
point cette mesure; outre qu’il abuse de l’injure personnelle,
ses invectives exhalent par endroits toute la haine du Misogallo
d’Alfieri*. Mais là s'arrètent les avantages de l’auteur français;
sa plume n’est jamais servie par la flamme et l'éloquence
souvent puissante de Pétrarque. Le maitre réputé de l'Univer-
sité de Paris n'est pas de taille à se mesurer avec le premier
humaniste. Le mépris dont Pétrarque accable son œuvre est
trop justifié pour qui veut la lire. Toutefois, elle assure à Jean
de Hesdin dans l’histoire littéraire une place particulière que
ses autres travaux ne suffraient point à lui mériter. Il n’est pas
1. Op. 1065. Cf. la conclusion de l'opuscule citée p. 587, n° 2.
2. Voici quelques exemples de son style polémique :
Op. 1069 : ste autem delamalor multiplicibus uerbis bacrentem ossibus
Barbariem lentat executer. 1070 : Gallus nosler nollet esse non barbarus et libenter
incoeno ubi educatus est residet, 1073 : dudiamus nunc Gallum seu uerius coruum
nostrum.… rauco strepitu suas amentias repeleutem. 1074 : Potor egregius.… Os
impurum aperire ausus, 1075 : Concrelum puluerem erroris e cauda gallicae
leuitatis excutiat. 4078 : Impudentia reluctantem barbarum.… Quoniam in uno
codemque homin: galli cristam atque anseris linguam, monstri genus, et contentiosae
gentis peruicaciam.… Quis non dicam Gallus sed asellus hoc nescial.… Sin autem
saltatrices suas <laudas ac potrices Romanis matronis comparare uoluerint
1079 : Galli paruis et friuolis ex causis soliti gaudere… 1075 : Jungo Graccis
Gallos, qui, licet inferiores ingenio, iactantia et loquacitate superiores sunt. 1080 :
Nunguam quod audierim Parisiensis quisquam ibi uir clarus fuit. Omnis Gallus
Gt barbarus. 108$ : Amicum Gallis es mendacium.… Etc. On connait les
plaisanteries sur le vin de Beaune, le jeu continuel sur le mot Gallus, le
dénigrement de l'Université de Paris (1080), etc. À côté de cela, des mots
d'une fierté toute romaine ; 1070 : Muri et platia ceciderunt, gloria nominis
immor lis est ; 1076 : Quid est aliud omnis bistoria quam Romana laus ? Jean de
Hesdin n'a pas les mêmes ressources à son service.
LE THÉATRE À PARIS À LA FIN DU XIV* SIÈCLE 609
au moins au temps de Charles V qu'il faut faire remonter les
origines du théâtre parisien. Comme à Aunay, quatre ans plus
tard, un fâcheux accident troubla le spectacle. Guillaume Lan-
glois, qui avait été « requis, prié et ordené de ceulx qui es diz
jeux faisoient les personnages des figures des ennemis et deables,
de estre aux diz jeux pour getter des canons », fut brûlé par une
décharge survenue à l’improviste et « en grant doubte et en aven-
ture d’estre mort ou affolé »; un garçon d’étuves, son ami, qui
s'était offert bénévolement à lui servir d'aide, fut plus malheu-
reux encore, car il mourut de ses brûlures tout juste un mois
plus tard. La connaissance de ces « faits divers » des années
1380 et 1384 — et qui sait combien d’analogues, avant et
après! — n’est peut-être pas inutile pour interpréter sainement
l'ordonnance du prévôt de Paris de 1398. « Ce n’est probable-
ment pas, comme on l'a cru quelquefois, dit M. Petit de
Julleville*, le fait d’avoir osé représenter pour la première fois
le mystère de la Passion qui attira sur la Confrérie l'attention
des magistrats et provoqua leur sévérité... Le fait nouveau,
inouï, qui scandalisa et effraya les magistrats, quand s’éta-
blirent les représentations de Saint-Maur, ce fut la permanence
du théâtre où elles avaient lieu. » Au fond, l’ordonnance est
une mesure de simple police, et j'imagine que le louable souci
de protéger la vie des spectateurs, voire des acteurs, y fut bien
pour quelque chose.
En terminant, nous constaterons avec regret que es lettres
de 1380 se taisent sur un détail que nous aimerions à connaître :
l'emplacement où avait lieu la représentation de la Passion. Si
l’on peut retrouver l’acte du 3 avril, reçu par deux notaires du
Châtelet, dont il est question dans ces lettres, on sera sans
doute renseigné quelque jour sur ce point intéressant.
A. Tomas.
I
iril 1380. Lettres de rémission accordées par Charles V à Guillaume Langlois,
cause involontaire d'un accident mortel survenu pendant une représentation de la
Passion à Paris, le 27 mars 1380.
Charles, etc. Savoir faisons a touz presens et avenir a nous avoir est
exposé de la partie de Guillaume Langlois que comme, le mardi apres Pasques
1. Les mystères, 1, 415.
Romans, XXL 39
LE THÉATRE À PARIS A LA FIN DU XIV* SIÈCLE 611
Donné a Paris l'an de grace mil ccc et iiiex au mois d'avril et le xvne de
nostre regne.
Es requestes de l'ostel.
N. GaïGnarT. Roonv.
CArch. nat. J} 116, n° 254.)
ll
1384. Lettres de rémission accordées par Charles VI à Fremin Severin, cause
involontaire d'un accident mortel survenu pendant une répétition de Théophile
à Aunay-lès-Bondy, le 19 juin 1384.
Charles, etc. Savoir faisons a touz presens et avenir de la partie des amis
charnelz de Fremin Severin, demeurant a Aunay pres de Livry! nous avoir
esté signifié que comme les habitans de la dite ville d'Aunay et du pays
d'environ eussent entrepris que le dimenche apres la nativité saint Jehan
Baptiste il: feroient uns jeux ou commemoracion du miracle qui a la
requeste de la Virge Marie fust fait a Theophile, ou quel jeu avoit un person
nage de un qui devoit getter d'un canon, et il soit avenu que le dimenche
devant la dite feste saint Jehan derr. passé lesdiz habitans fussent en l'eglise
de la dicte ville d’Aunay pour recorder leurs personnages, ledit Fremin qui
devoit jouer du dit canon eust emplie de papier seulement la bouete du dit
canon senz ce que fer ne boys y eust, et au temps qu'il devoit lachier ledit
canon icellui Fremin eust dit aus gens qui la estoient « Traiez vous arriere ;
vous n'avez que faire de estre si prez pour touz perilz », néentmoins feu
Perrin Le Roux se mist d'aventure au devant dudit canon quant vint à lachier
et si que en lachant ledit canon le papier qui en la boite d'icellui canon
estoit le frappa en l'eul, lequel feu Perrin Leroux est alé de vie a trespas-
sement le vendredi apres ensuivant, pour laquelle chose nous ont supplié
lesdiz amis que considéré que ledit Fremin a tousjours esté de bonne fame et
renommee.. nous lui vueillons faire nostre grace, mesmement que ledit feu
Perrin 2 dit qu'il estoit en coulpe dudit coup et non pas le dit Frein. Nous,
considerans les choses dessus dictes, audit Fremin Severin au cas dessus dit +
avons quitté et remis... le fait dessus dit... satisfaction faite a partie. Si
donnons en mandement au prevost de Pari
Donné a Paris l'an de grace mil cec
quart?
s et quatre, et de nostre regne le
Es requestes de l'ostel.
J. Gswai. T. D'Esroufrevils.
CArch. nat, JJ 125, n° 17.)
1. Le ms. porte plutôt Juny que liury.
2. Le scribe a oublié la mention du mois qui est de rigueur dans les pièces
de ce genre.
612 MÉLANGES
JEAN DE SY ET JEAN DE CIS
Le nom de Jean de Sy est attaché à une traduction de la Bible,
avec commentaire, entreprise à la requête du roi Jean le Bon,
mais restée inachevée, par suite sans doute du désastre de
Poitiers. M. Samuel Berger a étudié l'important fragment qui
nous en est parvenu dans le:ms. 15397 de la Bibliothèque
nationale : non seulement il déclare que le traducteur-commen-
tateur « a fait preuve de beaucoup de goût et d’un véritable
esprit scientifique », mais il n’hésite pas à écrire que, si cette
œuvre eût été achevée, « le moyen âge n’en aurait pas produit
qui lui fût comparable’ ». Voilà qui est fait pour nous
inspirer le désir de connaître la personnalité de Jean de Sy, ou
du moins ce qu’on en peut savoir. Après nous avoir appris
qu'un passage du commentaire de Jean de Sy mentionne « la
rivière de Gènes » et paraît être « d'un voyageur qui n’a pas
oublié ce qu’il a vu », M. S. Berger poursuit : « Mais nous
« avons un autre ouvrage de Jean de Sy. M. Delisle lui attribue
avec beaucoup de justesse 2, après M. Paulin Paris, la traduc-
tion en vers de la Consolation de Boëce qui se lit dans le ms.
576, et c’est à cet ouvrage qu'il faut sans doute appliquer les
vers suivants, contenus dans une autre traduction :
nanas
Mais, puis que je euz tout parfait,
Je trouvay que l'avoit extrait
Moult tres bien maistre Jehan de Cis...
« Ce serait, en ce cas, notre Jean de Sy qui parlerait de lui
« dans ces vers :
Si m'excuse de mon langage
Rude, malostru et sauvage.
Mais me raporte et me compere
Au parler que m'aprist n
A Meun, quand je l'alaitoie.
1. La Bible française au moyen-ige, p. 238 et 241.
2. Nous devons faire remarquer que M. L. Delisle s'exprime à ce sujet
d'une façon beaucoup plus réservée que ne le feraient croire les termes dont se
sert M. Berger. Voici, en effet, ce qu'il dit : « D'après une conjecture de
M. Paulin Paris, cette traduction serait l'œuvre de maître Jean de Sy. »
Gnvent. des mss. fr, 1, 328.)
JEAN DE SY ET JEAN DE CIS 613
Ces quelques mots contiennent tout ce que nous savons sur
le traducteur du roi Jean.
Ce n’est pas beaucoup assurément, et pourtant je crains bien
que, sauf « la rivière de Gènes », il ne faille tout jeter au
panier. Dans le Chartularium universitatis Parisiensis publié par
le Père Denifle, avec le concours de M. Émile Chatelain, œuvre
admirable, et qui serait parfaite si les auteurs étaient un peu plus
imprégnés de philologie romane, j'ai trouvé à trois reprises la
mention d’un frère Johannes de Siaco, sur lequel dès l'abord j'ai
jeté mon dévolu. Il figure dans trois extraits des Assignationes bac-
calareorum ordinis prædicatorum pro studio Parisiensi, Au mois de
juin 1348, on y lit : « Ad legendum Sententias Parisius isto
anno assignamus fr. Bartholomeum de Anisyaco, de provin-
cia Francie, et quantum nostra interest ad legendum Senten-
tias ibidem substituimus eidem fr. Johannem de Syaco, de
eadem provincia’. » Au mois de mai 1349 : « Assignamus
ad legendum Sententias ibidem pro anno sequenti fr. Johan-
nem de Siaco, de provincia Francic?. » Enfin au mois de
mai 1350 : Assignamus ad legendum Sententias isto anno
fr. Johannem de Siaco, de provincia Francie3. » Le Père
Denifle a accompagné la seconde de ces mentions d’une pré-
cieuse note ainsi conçue :
aRasane»
a
Cum Johannes de Siaco pro anno sequenti assignetur ut lector Sententia-
rum, et minime ut magister intheologia designetur, libellus supplex Garini de
Gyaco, mag. gen. Ord. Præd., ad papam anno 1346, quo petit « quatenus fr.
Johannem de Siaco, dioc. Remens., qui Bibliim duobus annis solenniter legit
Parisius et est valde famosus clericus » licentiare in thcologica facultate
dignetur, quod papa Andegavis ficri Decemb. 8 permisit (Reg. Supplic. Cle-
ment VI, an. $, p. 3, fol. 139), effectu caruit.
Je ne crois pas qu'on puisse hésiter à identifier le « valde
famosus clericus » de 1346 avec le traducteur de la Bible pro-
tégé par Jean le Bon. Si en 1350 il n’était pas encore maître en *
. théologie, il le devint un peu plus tard, puisqu'il figure dans le
Catalogus magistrorum de l'ordre des Dominicainst. Le nom
1. Ne 1154 (tome II, 1re partie, p. 619).
4. rchiv für Litteralur und Kirchmgeschichle, I, 224, n° 139.
JEAN DE SY ET JEAN DE CIS 61s
par quelques manuscrits), ce qui est bien probable, vu la rime
avec précis. Dans ce cas, maître Jean de Cis emprunterait sans
doute son surnom à la petite localité de Cis-la-Commune dans
l'Aisne, seule localité éponyme que je lui connaisse, et pas
plus que Jean de Sy, il ne saurait être l’auteur de la traduction
de Boèce du ms. 576. Quant à supposer que l'anonyme de 1380
ait écrit Jehan de Cis pour Jehan de Sy, à cause de la rime, je ne
crois pas qu’on puisse y songer sérieusement. Il faut se
demander enfin ce qu'est devenue la traduction de Boëce par
Jean de Cis, et voir si l’on peut la reconnaitre dans l’une de
celles qu'a étudiées M. L. Delisle. On sait que M. P. Meyer
(Rom. Il, 271-3) a réduit à six les huit traductions distinguées
par M. L. Delisle : les traductions de Jean de Meung, de
Renaut de Louhans, de l’anonyme de Meung, de l’anonyme ita-
lien et de l’anonyme de 1380 étant naturellement hors de
cause, la sixième seule pourrait ètre prise en considération.
Mais il y a doute sur l'identité de cette sixième traduction,
parce que les manuscrits attribuent concurremment à Jean de
Meung les n°* I et IT de la liste de M. L. Delisle, ce qui embar-
rasse fort les érudits. M. L. Delisle estime que c’est le n° I
(en prose) qui est authentiquement de Jean de Meung, tandis
que M. P. Meyer attribue cet honneur au n° II (vers et prose).
En acceptant le système de M. P. Meyer, on pourrait songer à
attribuer à Jean de Cis le n° I, qui est un mot À mot très serré
auquel s'appliquerait assez bien le reproche de l’anonyme de
1380 : l'attribution fautive des manuscrits et la transcription en
tête de cette traduction de la dédicace authentique de Jean de
Meung à Philippe le Bel, dont M. P. Meyer déclare ne pas
s'expliquer la présence, trouveraient une ombre d'explication
dans une confusion entre « maistre Jehan de Meun » et « maistre
Jchan de Cis ». Je donne l'hypothèse pour ce qu’elle vaut.
A. Thomas.
« l'heure sous le n° 7072. » Cette phrase est doublement malheureuse, car,
sans parler de ce qui concerne Jean de Sy, elle attribue à Renaut de Louhans
ce qui appartient à l'anonÿme de 1 380, que Paulin Paris appelle ailleurs « le
soldat de Charles VII. »
ESTALER 617
contient une allusion à Guillaume de Machaut, fournit un
autre exemple, Le nom de ce poète est estropié dans presque
tous les manuscrits. Arsenal 3521 et Turin L. IV. 3 ont Michault;
Arsenal 3523 et Bibl. Nat. fr. 24440 Marcault; Bibl. Nat. fr. 1642
Marsault ; Bibl. Nat. fr. 924 et 2236 Mahault. Dans les anciennes
éditions, on trouve Martault.
Arthur PIAGET.
ESTALER
The question of the connection between estaler, « uriner »,
Eng. « to stale' », and estaler, « s'arrêter », has been several
times discussed in the Romania (XVIII, 131, 4723 XIX, 593).
It seems quite possible that both may come from Germ.
stal, Anglo-saxon steal, stel, Eng. stall, meaning « standing-
place for cattle, horses (étable, écurie) », and « stand to expose
wares for sale (éral) ».
1° Estaler, « uriner » : a horse « stales » when it comes
into the stall (for the connection between siale and stall see
Skeat, Etym, Dict., s. v. sale). Scaliger (apud Richardson,
Eng. Dict. s! v. stale) derives ltal. stallare, « pisciare », from
stabulum ; « quia, quum recenter veniunt[equi] in stabulum,
quod stallam vocant Germani, tunc urinam solent emittere. »
This view is supported by the supposition of M. Loth (Rom.,
XIX, 593) that the Breton salt, staot, « urine, » may be
borrowed from the Danish stald, meaning « stall, stable
(table) ».
2° Estaler, « s’arrèter » : to come to the stall, to come to a
stand; cf. O. Fr. « prendre estal » (Ch. de Roland, v. 2139 :
« Pur vostre amur ici prendrai estal »).
From the same source come estalon, Eng. stallion (« equus
ad stallum) », a horse kept in a stal] and not made to work;
and estaker, to display wares upon a stall (estal) whence Eng.
slale, « vieux, rassis, éventé ».
Paget Toynsee.
1. An Eng. substantive « stale » also exists, corresponding to the
French esfal, « urine. »
PÉRIODIQUES 621
pages de notes sur les pièces uniques et de trois tables (auteurs, ragos et pre
miers vers). Je regrette que pour cette publication, comme pour celle du chan-
sonnier Vat. 5222 (cf. Rom., XIX, 621), on ait cru devoir imprimer les vers
À lignes pleines. Il eût été bien préférable de mettre chaque vers à la ligne.
Fasc. 15 (t. VI), 1891. — [A. Restori, La collegione CC. IV. 28033 della
Bibliolheca Palaina-Parmense. Description raisonnée d’une collection de comé-
dies espagnoles des xvne et xvine siècles, en quatre-vingt-sept volumes, con-
servée dans la bibliothèque de Parme et qui provient très probablement de
linfant Don Philippe. Nous en avons annoncé naguère la découverte
QIX, 151). Cette collection se compose de morceaux des recueils généraux
et particuliers imprimés au xvire siècle, de sueltas et de pièces manuscrites.
M. Restori dans son commentaire bibliographique ne renvoie guère qu'à
La Barrera et la Coleccion de aulores españoles de Rivadeneira ; il aurait dù
se servir aussi des catalogues de Salva et de Ticknor. A. M-F.] —
P. 157-9. V. Crescini. Note provenzal. L. Sur un passage de la pièce Anc
nom parti, de G. Faidit, où M. Crescini restitue le nom de Montmélian, en
Savoie. — IL. Interprétation d'une strophe de Lanfranco Cigala mal comprise
par M. Schultz. P. M.
624 CHRONIQUE
mie des Inscriptions et Belles-Lettres une médaille dans le concours annuel
des Antiquités de la France. Une autre médaille a été attribuée à M. E. Lôseth
pour son livre sur le Roman en prose de Tristan.
— L'Alifrangæsische Bibliothek, qui se publie à Leipzig, et dont le douzième
tome (Floris et Liriope) a été récemment l'objet d'un compte rendu dans la
Romania (ci-dessus, p. 109), vient de s'augmenter de deux volumes, et à peu
de frais. Ces deux volumes sont les Provengalische inedita de M. Appel (voir
Rom., XX, 167) et le Bestiaire de Guillaume, édition de M. Reinsch, l'un et
l'autre publiés en 1890. Il ne s'agit pas ici d'une nouvelle édition : on a sim-
plement changé le titre et la couverture, en substituant 1892 à 1890.
— La Bibliothèque nationale a récemment acquis le ms. d'après lequel
M. AL. Sardou a publié, en 1875, la vie de saint Honorat, par Raimon
Féraut (voy. Romania, V, 237). Ce ms., incomplet de la fin, avait appartenu
successivement à Raynouard et à feu Guessard. C'est de l'un des héritiers de
cœ dernier que la Bibliothèque l'a acquis. Il est maintenant classé dans le fonds
des Nouvelles acquisitions françaises, sous le n° 4597.
— Livres annoncés sommairement :
Bibliollèque nationale. Manuscrits latins et français ajoutés aux fonds des nou-
velles acquisitions pendant les années 1874-1891. Inventaire alphabétique par
Léopold DeuisLe. Paris, Champion, 1891. In-8e, deux volumes à pagina-
tion continue, Ixexviij-855 pages. — En 1880, à la fin de ses Mélanges de
Paléographie et de Bibliographie, M. Delisle a publié le catalogue des manu-
scrits (moins les grecs et les orientaux) acquis par la Bibliothèque natio-
male en 1876, 1877, 1878. Les ms. étaient rangés sous un certain
nombre de rubriques disposées par ordre alphabétique (Aix, Albericus,
Aléimie, Ambassadeurs, etc.). La même disposition est adoptée dans le
très précieux inventaire que nous annonçons, et qui reprend, comme on
le voit par les dates (1875-1891), les acquisitions déjà enregistrées dans les
Mélanges de paléographie. Ce classement par rubriques rangées en ordre
alphabétique facilite en une certaine mesure les recherches : toutefois,
comme les rubriques sont nécessairement très compréhensives, elles ne
dispensent pas le lecteur d'avoir recours à Ia table alphabétique très détaillée
qui termine l'ouvrage. Il ÿ a par exemple une rubrique CHARTES, qui
embrasse un grand nombre de recueils ; mais des chartes sont indiquées
sous bien d'autres rubriques, par ex. sous Bcunvais, Bourgogne, Bretagne,
Cluni, Compiègne, Dauphiné, etc. J'aurais donc préféré un inventaire suivant
l'ordre d'entrée comme est conçu le catalogue des additional mss. du Musée
britannique, disposition qui fait mieux voir l'accroissement progressif des
fonds et se prête plus facilement à la publication périodique de l'inventaire
des nouvelles acquisitions. Mon observation n'a d'ailleurs qu'une impor-
tance secondaire, surtout si l'on se place au point de vue spécial de nos
études. Nous ne pouvons rendre ici un compte détaillé d'une publication très
importante en elle-même, mais qui n'a avec les études romanes qu'un rap-
CHRONIQUE 629
dénué. » Nous avons parlé de ces trois écrits lors de leur première publica-
tion ; nous reviendrons à cet intéressant recueil quand aura paru le second
des deux volumes qui doivent le composer.
Ucber Ostenglische Geschichisquellen des 12, 13, 14 Jabrbunderis, besonders
den falschen Ingulf, von F. Liesermann. Hannover, Hahn, 1892. In-8,
43 p. (extrait dut. XVIII du Neues Archiv für âllere deutsche Geschichiskunde,
dédié à W. Wattenbach pour son 50e anniversaire de doctorat). — La
prétendue chronique d'Ingulf a une telle importance pour l'histoire des
idées et des mœurs au moyen âge, que depuis longtemps on en désirait
une analyse rigoureusement critique. Elle nous est donnée ici par un des
savants qui connaissent le mieux l'historiographie anglaise du moyen âge
il conclut que ce roman pseudo-historique, censé du xre siècle, a été fabri-
qué à Crowland peu avant 1360, et qu'il ne contient, en dehors des sources
que l'on possède encore, aucun élément authentique. En dehors de cette
importante démonstration, le mémoire de M. L. contient plusieurs obser-
vationsqui ont de l'intérêt même au point de vue de l'histoire littéraire anglo
normande, par exemple sur la traduction en vers (fragmentaire) de la chro-
nique de Hugues Xe Blanc de Peterborough et sur certaines sources de
Geffrei Gaimar.
Le Lai, le Virelai, le Rondeau, par Gaëtan Hecx. Bruxelles, A. Vromant,
1892. In-8e, 33 pages (Extrait des annales de la Socidté d'archologie de
Bruxells, vol. VI). — Ce travail, comme celui du même auteur sur la
Ballade que nous avons annoncé ci-dessus, p. 138, est d'une extrême fai-
blesse. M. H. ne connait rien de ce qui a été écrit avant lui sur le sujet
qu'il traite.
La Divina Commedia, con commenti secondo la scolastica, del P. Gioachino Ber-
mer, Vol. 1, fasc. 1, Freiburg, Universitætsbuchhandlung, 1892. Gr.
in-4, xv1-32 pages. — Certe édition, dédiée au pape Léon XIII et chau-
dement annoncée dans la presse, tiendra honorablement sa place sur la
table d'uu salon littéraire. Elle est ornée d'un grand nombre de clichés
phototypiques de provenances diverses qui, s'ils contribuent peu à l'inter-
prétation du texte, servent du moins À récréer agréablement les yeux.
Ainsi, à la première page de l'introduction (dont cette première livraison
ne contient encore que le commencement), nous trouvons la réduction
d'un plan de Florence en 1716. Deux pages plus loin, à propos de la nais-
sance de Dante, un bois, emprunté à la Chruakerie de M. L. Gautier, repré
sentant un enfant emmailloté, dessin du xie siècle; p. 11, une vue du
tombeau de Virgile, d'après un ancien guide de Naples; p. 14, à propos du
célèbre veltro, la reproduction d'une des fresques de la chapelle des Espa-
gnols, à Santa Maria Novella, avec cette rubrique : « Benederto XI adopra
« veltri per custodire gli agnelli », pour servir de confirmation à l'idée que
le veltro figure Benoît XI. Quant au commentaire, il montre surtout chez
son auteur, qui est professeur de théologie l'Université de Fribourg en
Suisse, un esprit décidé qu'aucun doute ne vient troubler. Ainsi le vers sur
CHRONIQUE 631
(le ms. est du xive siècie). Il est curieux qu'à côté de cela le même poète
tolère l'e fm. en hiatus, et écrive par exemple : En la terre de Orient 10,
De teule cuite et alraile 19, Plus eschaufe el a ardure 34, et mème Est
drscendue au ruissel 98. On remarque aussi de singuliers manques d'accord
entre le nom et l'adjectif ou le nom et le verbe. — La publication de M. B.
est faite avec soin : après 43, il faut une virgule au lieu d’un point, et
Encor au v. 129 appartient déjà au discours de Pyramus; j'ai dit bien des
fois qu'il ne fallait pas imprimer povoit (203), mais pouoit (et de même
peueut et non pevent), mais je n'arrive pas à l'obtenir. — G. P.
Giovanantonio Campano, detlo l'Episcopus Aprutinus. Saggio biografico e cri-
tico del dott.-profess. Giusseppe LEsca. Pontedera, Ristori, 1892. In-8o,
x11-208 pages. — Campano, « l'évêque des Abruzzes, » fut un humaniste
célèbre en son temps (1429-1477), disciple de Valla, ami de Pie Il; il joua
en outre un certain rôle politique. M. Lesca a retracé sa vie dans un premier
livre et étudié ses œuvres dans un second. Les lettres de Campano, sa Vie
du condottierre Braccio, ses élégies et épigrammes ne sont pas sans intérêt
pour l'histoire du xve siècle et ne manquent pas de mérite ; M. L. signale
cet intérêt et ce mérite sans les exagérer. On regrettera les innombrables
fautes d'impression qui rendent souvent les citations latines presque inintel-
ligibles et défigurent notamment les vers.
La « Navigatio sancti Brandani » in anlico veneziano, edit ed illustrata da
Francesco Novari. Bergamo, Catraneo, 1892. In-Be, LVHI-110 pages. —
Cet élégant volume, outre l'édition du texte et une étude biographique,
contient une intéressante introduction où l'auteur, après avoir indiqué sur
l'origine et les plus anciennes formes de la légende de saint Brendan
quelques idées assez neuves et dignes d'attention, fait remarquer que la
version italienne (il n'y en a qu'une malgré les variantes des quatre récen-
sions qu'on en connait), ou plutôt vénitienne, présente une particularité
qu'on n'a pas notée jusqu'ici : c'est une longue description du paradis ter-
restre et d'une ile de délices qui le précède, description qui, chose assez
étrange, fait absolument défaut dans la légende latine, consacrée tout
entière à un voyage vers ce but qui, une fois atteint, est à peine signalé.
On a cru que cette addition était du fait du traducteur italien; M. L. pense
au contraire et rend très vraisemblable qu'elle a d'abord été écrite en
latin, et rien ne prouve que ce soit en Italie; mais le traducteur vénitien et
les copistes l'ont sans doute successivement embellie à leur façon. « Ils ne
s'apercevaient pas, les malheureux, que le fantastique séjour des élus»
entrevu dans l'extase d'une vision ascétique, se déformait ainsi tout douce”
ment, grâce eux, jusqu'à devenirle songe vulgaire du pays de Cocagne. »
Supplément au Viandier de Taillevent. Le manuscrit de la Bibliothèque Vati-
cane, publié ave: Avant-Propos, Notes et Table, par le baron J. PicHON et
G. Vicate. In-@e, paginé 181-300. — Nous avons annoncé ci-dessus,
p- 323, que M. le baron Pichon et M. Vicaire avaient l'intention de publier
le texte du Viandier de Taillevent que renferme le ms. du Vatican, n° 776
CHRONIQUE 633
traits des poèmes qui ont été imités ou traduits par d'anciens écrivains
anglais. Il est surprenant que M. T., qui pourtant paraît avoir dépouillé
avec soin la Romania, n'ait pas fait figurer parmi ses Specimens la Vie de
saint Grégoire par frère Anger, de Sainte Fridewide (Romania, XII, 145),
dont le texte est daté et se présente en des conditions d'authenticité et de
pureté tout à fait exceptionnelles, Le classement est chronologique. J'ai
montré ailleurs (Revue critique, 1892, art. 413) que l’ordre adopté est sou-
vent contestable. Les textes sont en général empruntés aux meilleures édi-
tions. Plusieurs sont tirés de mon Recueil d'anciens textes. Le commentaire,
qui tend à élucider les Specimens à tous les points de vue, a le caractère élé-
mentaire que comporte l'ouvrage, mais tout n'y est pas également exact. L'in-
troduction grammaticale est assez faible. Le glossaire, très étendu, est rédigé
avec soin. Toutefois, on y trouverait la matière de bien des observations
critiques. Abhes est écrit à tort abhé au cas suj. du sing.; acoveler ÿ est
expliqué par le très hypothétique acclapitare, aerdre par adherere;
araire, rattaché à araier, est purement imaginaire; car le passage auquel
renvoie le glossaire (L, 18), est ce vers de Philippe Mousket (qui n'était
nullement évêque de Tournai) Si que li sans en est ARAIS; c'est la leçon de
Reiflenberg (v. 17433), où il faut évidemment lire À RAIS. Awel n'a rien
de commun avec avouer (cf. G. Paris, Chansons du XVe sick, p. 6), etc
Si, comme nous l'espérons, une seconde édition devient bientôt nécessaire,
M. T. fera bien de soumettre cette partie de son travail à une révision
minutieuse. — P. M.
Wolfram d’Eschenbach. Perceval, traduit par Alphonse GRANDMONT. Liège,
Grandmont-Donders, 1892. In-12°, 530 p. — Nous n'avons pas comparé
cette traduction avec l'original ; mais, en la parcourant, elle nous a paru faite
avec intelligence, et le court avant-propos donne une bonne idée de la
conscience que M. Grandmont a apportée à son travail. Ce travail rendra
un vrai service à ceux qui ne lisent pas l'allemand, et il sera commode
même aux autres; il l'eût été plus si le traducteur avait muni son livre
d'un index; en revanche, le soin qu'il a pris de marquer en marge les
numéros des divisions du poème allemand facilitera l'emploi et la compa-
raison occasionnelle de sa version avec l'original. Traduire le Parzival était
assurément un rude labeur, assez ingrat de toutes façons, malgré l'intérêt
qui s'y rattache, et on doit savoir gré à celui qui l'a courageusement entre-
pris et mené à fin.
Germaniska och Romaniska Spräkstudier. En blick pà deras historia, metoder,
hjälpmedel, af Werner SŒDERHJELM. Helsingfors, Otava, 1892. In-12°, six-
138 p. — Ce petit guide, rédigé à l'usage des étudiants finlandais, est
sobre, clair et bien conçu; il est accompagné d'une bibliographie som-
maire. Dans la partie romane, le français occupe une place prépondérante.
Le chapitre sur la « méthode » n’est pas un simple résumé de ce qu'on a
dit avant l'auteur, c'est le fruit de réflexions et d'études personnelles. Il
n'est pas exempt d'erreurs (ainsi p. 98, l'explication de craindre —* trendre
TABLE DES MATIÈRES
À NOS LECTEURS
A. Tomas. La loi de Darmesteter en provençal. 7
H. Morr. Notes pour servir à l'histoire de la
Italie et en Espagne 18
P. Maven. Maitre Pierr
Ga22-1431)..… 39
P. Mever. Ballade contre les Anglais Gad. 50
G. RarwauD. La chastelaine de Veryi. 145
A: Neurauer et P. Mever. Le roman provençal d'Esthe 2 194
P. Tovnsee. Christine de Pisan and sir John de Maundeville. 228
E. Weican. Nouvelles recherches sur fe roumain de l'Istrit 240
W. Meven-Lüoke et G. Paris. La première personne du pluriel en
français se 337
G. Huer. Les fragments de la traduction néerlandaise des Lorrains.…… 361
P. Meen. L'Image du monde, rédaction du ms. Harley 4333 ï
A. Tomas. Aire, essai étymologi
F. Novar. Le livre de raisons de B. Boy
taires d'Arles, actuellement conservé
P. Meyer. Les manuscrits de Baiset (premier are) 557
A. PiaGer. Une édition gothique de Charles d'Orléans. s8
MÉLANGES
À cosa si deva la conservazione testuale dei giuramenti di Strasburgo
. Rajna). 53
Le mythe des 6
Le chavalier au lion, comparaison ave ü 67
La novella della donna e dei tre papagalli (E. FGors) 71
Un' awventura di Peire Vidal (F. Novati). : 7
rès Jacques de Vitri (P. Meyer)....: Bi
Lui D. Meyer). 8
: &
86
ÿ
Valbeton dans Girart de Roussilon (L. Mirot). : 257
La chanson à boire anglo-normande parodiée du Lelabundus (G. Paris). 260
La traduction de la légende latine du voyage de Charlemagne à Con-
stantinople, par Picre de Beauvais (G, Paris).
Nouvelles recherches sur Villon (A. Longnon)
Jean Castel (A. Thomas).
a (Gr). 406
raigne 4
Ferro pr
get)
Li Qu tie d'anore de Caro del Nero (A. Piaget
Matin (Ge Pdrereeesranes de Nero A age).
‘636 TABLE DES MATIÈRES
Antenois (G. P.
Le Gallus calumnialor de Pétrarque (P. de Nolhac).
Le théâtre à Paris et aux environs à la fin du xive siècle (À. Thomas).
fean de Sy et Jean de Ck É Thomas)
Miciau pour Macbaut (A. Piage).
Toynbee). .
COMPTES-RENDUS
Ademsil (Da), anglonormannisches Gedieht des 2
I Jabrhundents,
. von K, Grass 280
Ex DE “rates Gi) Text
Yoain, hgg. von W. me Fansten ( h 276
Let Year
ELISLE (L.), Nofice sur un psautier latin-françair jo!
= Nofice sur la Bone pers de Béthune. $2
— Anciennes fraductions françaises du traité de Péirarque sur
Les remddes de l'une &f l'autre fortune. … 302
Era, tete ctique publié par J. Sauvenbà DE GRAVE (G. P. 281
Floris et Lyriope, roman de Roserr DE BLois, hgg. von W. von
Zen (MD je ; … 109
Færsrer (W.), Romanische Bibliothel. (G. P. : 275
Fœærster, voy. CHRÉTIEN DE Trovus, JIle et Galeron, W'islasse.
Fousrit ES, P. de Lunel, dit Cavalier Lunel de Montech @. M) . 304
brestomathie roumaine (E. Picot) 113
Cire D Ans, . Île und Galeron.
GœrLicH, vo (Die).
Gorra (E.), Na inediti di sloria Trojana (H, MORF)............... 88
Grass, voy. 4
Hauréau, Nofice sur le ms. 14877 des mss, Talin de La D, mat. 298
Ille und Galeron, von WALTER D'ARRAS, hgg. von W 297
Karel ende Elegast, uitgegeven door E. ie. G: 296
KUIPER, voy. Karel.
Laberinlo amoroso, éin altspanisches Liederbuch hgg. von K. VOLUŒL-
LER (A. Morel-Fatio) nt
LanGLois (E.), Origines el sources du roman de la Rose (| 434
Lunel, voy. FORESTIÉ.
Mais (Die beiden ersten Bücher der), hgg. von E. Gœnucu
27:
Mever (P.), Nofices sur quelques manuscrits français de là bibliothèque à
Phillipps à Cheltenham. 29
Mever (P.), Notice sur un recueil d'exempla de la Bibliothèque capillaire
de Durbam 303
Noces el extraiis des mss. de la Bibl. nai., t. XXXIV, premiere parte.
Voir Deustz, Haunèau, MExER.
ORPEN, vo
PHILIPPE
J. Ulri
PICHON, on res
RauscHen (G.), Die Legende Karls des Grossen (G. P.)..….. 295
Roëërr DE BLOIS, voy. Floris el Lyriope.
RousseLor, Le molifralions phonique du langage Audits dans le patois
d'une famille de Cellefrouin — De vocabulorum congruentia in rustico
Celle-Fruini sermone (A. THOMAS). + 457
SALVERDA DE GRAVE, VOy. Emtas.
TABLE DES MATIÈRES 637
Sor core and the Earl, an old french Poem, edited by G. H.
M).
RPEN (P. 444
Tèbes (Le roman de), publié par L. Consrans (P. M 1
Taruuevenr, Le Viandier, publié par Pichon et Vicaire (S. Luce 3
Trosr, voy. Wislasse le Moine.
VicaiRe, vOy. TAILLEVEN
VOLMŒLLER, voy. Laberinto,
Wistasse le Moine, altfranzæsischer Abenteuerroman des XIII. Jahrhun-
dents, hgg. von W. Færsrer und J. Trosr (G. P.)..
ZiNGERLE, Voy. Floris et Lyriope.
LIVRES ANNONCÉS SOMMAIREMENT
literatury.
BEDROSS
français
BERTHIER, VOÿ. DATE.
Besliarius (Ein tosco-venezianischer) hgg. von GoLbsrauR u. WENDRI-
NE... ass 477
Byvancx, Un poète inconnu de la société de Fr. Villoi 136
Biner, Le style de la lyrique courtoise en France. 142
BonNarD, Une traduction de Pyrame et Thisbé en vers français 60
Bos, Glossaire de la langue d'oil.….....
BRAGA, Historia da Universitade de Coimbra
Carlo Mainetto, frammento d'un cantare toscano
CaRsALADE DU Powr, voy. Comptes.
Cæevauier, Repertorium hymnologicum
CHRISTINE DE PISAN, vOy. HEUCKENKAMP.
CLogrra, Die Anfinge d. Renaissancetragôdie ..
Comptes” consulaires de la ville de Riscle p. p. PARFOURU ct CAR-
SALADE DU PONT. d He
CoNoN DE BÉrHUNE (Chansons de), texte critique par WALLENSKÔLD. 324
Coroier, Jean de Mandeville. 331
Cosauy, L'origine des cont 635
Crescmi, Per gli studi romanzi 479
DaGwer, Le patois manceau tel qu'il se parle entre Le Mans ét Laval.
Daxre, La Divina Commedia, con commenti del P. G. BERTHIER... 629
DeLisue, Mss. latins ct français ajoutés aux fonds des nouvelles acqui-
sitions . see
Doxceux, Le cycle de sainte Marie Mad
.
Doureronr (G.), Etude linguistique sur Jacques de Hemricourt
Dourreronr (G.), Tableau de la conjugaison dans le wallon liégeois. 330
FerkAl, Le cronache di Galvano Fiamma € li fonti della Galvagnana.… 135
Festschrift zur Begrüssung d. fünften allgemeinen deutschen Neuphi
lologentages zu Berlin. .… 68
TABLE DES MATIÈRES 639
Novar et LAravE, L'anthologie d'un humaniste italien au xve 480
Nyror, Nej. Et Motivs Historie. 3
Œuerr, Alt-Veroneser Passion. 32
Para, voy. Frammento.
PARFOURU, voy. Comptes consulaires
Passio sauclae Catherinae Alexandrinae metric 136
Passion (Le mystère de la) PB RICHARD. 140
Paruc, Zur Geschichte d. Herzmäre 140
Percgrinaggio di re giovant figliuoli
GASSNER. + 327
Perir, Histoire des ducs rgogne, t. 625
PICHON, VOy. TAILLEVENT.
Prrré, Di uno stratagemma leggendario di città assediata in Sicilia. 478
Pa, Le somiglianze tra la poesia persiana e la nostra. 634
Prou, Manuel de paléographie. Recueil de fac-similés. 144
RAJNA, L'etimologia e la storia arcaica del nome « Napoleone ». 327
— "La genesi della Divina Commedia 477
Rauscmaier, Ueber d. figürlichen Gebrauch d. Zahlen im Altfranzôsi-
chen . 336
Remier, Ricerche sulla leggenda di Uggeri il Danese in Francia. ...:: 138
Resront, Il Carlo magno, poema inedito. …
— Note fonetche sui parti del ale vale d Magra
— Palais.
— Per un serventese di Guilhem de la Tor.
Richard, voy. l'assion.
Risop, Studien zur Geschichte d, franzæsischen Conjugation auf ir.… 329
ROZÈRE, voy. Assise.
ScuAfer, Ueber d. Pariser hss. 145 1 u. 22555 d. Huon de Bordeaux-Sage.
ScueniLLo, La morte di Beatrice. 4
ScHnscans, Die Quellen d. soge:
ScHucuaror, Kreolische Studien.
SoberHJELM, Das Martinsleben d.
— Germaniska och Romaniska Sprokstudier.
Srewarr, Boethius, an essaÿ.
SucHiEr, Quielus im Romanischen
Svepeuis, Etude sur la semantique
Taiuzevenr (Supplément au Viandier de), p. p. PICHON et VICAIRE.
Tioeerans, L'argot parisien
Tosuer, Vom Gebrauche d. Imperfectums Futuri im Romanischen 13
— Kieine Beitrâge zur franzsischen Grammatik.. 142
Tovwues, Specimens of old french. 632
VaLoïs, Ouvrage inédit d'Honoré Bonet 330
VARNHAGEN, voy. Passio sanclae Calharinae.
VILLON, Œuvres complètes, p. p. LONGNON.
VixoLs, Vocabulaires patois vellavien-français et français-patois vella-
î .: 326
Visic, Fransk Sprklära. 328
Voicr, Das Ideal d. Schônheit u. Hässlichkeit in d. Altfranzôsischen
Chansons de geste. s 474
Vouri, Gli antipodi nel Morganke, 473
Vonsrzcu, Ueber d, Sage von Ggier d. Däner.s.se 137
WALLENSKOLD, voy. CONON DE BÉTHUNE,
WicanD, Wlacho-Meglen. ” 480
WENDRINER, voy. Bestiarius.
640 TABLE DES MATIÈRES
Nasa, Ucber d. Sprache 4. Alprovenuliséhen Hs. og. nouv. 6.
n° 4138 d. Bibl. nat. zu 47:
Wizuaus, Die franzôsischen Ortsnamen keltischer Abkunf : 47
WoLFrAM D'EscuEnBAcH, Perceual, trad, p. Grandmont. .….. 633
PÉRIODIQUES Ë
Bulletin archéologique du Comité des Travaux historiques, 1890, 1... 462
Bulletin de la Sose des anciens textes français, XVII, 2 D 462
1
Bulletin de la Soc. de l'hist. de Panseï de ll de Francs, X sg. 320
lische Studien, I-XV (1878-91)...
Crée ones della Hnrgature Mana, Ba 45-54 Gp). #1
Lierarisches Centralblatt (1889 et 1890). 46
Literaturblatt für germ. u. rom. Phi
juin 1892) . 465
M S de
186 L
PrSpa à). HA
Revue des langues romanes (act. 1890, juin sig 10
— juildéc. 1891.. 18
Revue mensuelle de l'Ecole d'anthropologie, 1, n° v (mai 1891 319
Revue de philologie française et proven "Bot ra
Studj di Filologia romänza, fasc. 14-$5 te
Zeisehrf fr romanisehe Biologie, XV, 3- Gi 120
_ VI, 22
CHRONIQUE
Nécrologie : L. Holland, D. Hinard, Fr. Zarncke, Sicber-Bischof, 126; LL
L. Bonaparte, R. Reinsch, 127; À. Gaspary, 321; G. Flechia, 471; Ed.
Mall, R. Kœhler, 622; E. Renan, 623. — Nominations de
chargés de cours, ete. : MM Bédièr, L. Muret, C. de Lollis, Voretsch,
127; A. Stürzinger, G. Doutrepont, 321. — Prix décernés à MM. Meyer-
Lübke, P. Passy, E. Langlois, E: Loscih, 623:4.— Publications nouvelles:
l'Histoire de Guillaume le Maréchal, +. 1, p. par P. Meyer ; baron d'Avril, Nou-
elle bibliothèque bleue; Sôderhjelm, sur les Cours d'amour, 128; Almanac
pains de l'Ariejo, 129; E. Dümmier, Rhythmes sur saint Nicolas, 323 ;
auf, Darmeseuer ec Thomas, Di. gér. de 1 lançue français, 324,
471, 623 ; Alfransosische Bibliollek, 624. — Publications annoncées : Piat,
Dictionnaire français-ocitanien; Thibaut, Glossaire du patois blaisois, 129;
Stürzinger, inages de "Guillaume de Digulleville, 321:
C. Morel, édition de l'ancienne traduction de l'Enfer de Dante, conservée
dans un ms. de Turin; Fitting La Sumna cadics en provençal
Krumbacher, publication d’une ii Zi, 32 x Siege, Si
tion des Lolkrem; Van Hamel, édition du poème latin de Matheolus:
G. Paris, édition des Gestes des Chiprois, 323; Sôderhjelm, édition de la
ie de saint Marlin, en vers français, 622; P. de Nolhac, Pétrarque et
L'Humanisme, 324. — G. Paris, de l'emploi des signes > et <, 471: —
Observations. de M, Nizicr du Puitspelu en réponse À La ctitique de son
Dictionnaire du patois Bomnais, par M. Philipon, ct réplique de M. Phili-
on, 129. Manuxerit de la Vie provençale de saint Honorat acquis par la
Bibliothèque nationale, 624. Manuscrit de Spalding, acquis par le Musée
britannique, 473.
SOMMAIRE DU PRI
Pages
G, Ravkacp, La Chasteliine de Vergi 145
AvrR et P. M Le Roman proven 194
istine de Pisan and sir John 228
G. Wicaxn. Nouvelles recherches sur le roumain de l'stric 240
MÉLANGES
Valbeton dans Gris de Ronssillen CL. Mirot). 57
La chanson à boire ne parodiée du Lundi (G. Paris. 260
age de Charlemagne à Con-
“pe pe SU VER De Gr
. Ritscex, DL
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SOMMAIRE DU PRÉSENT NUMÉRO :
ever, L'Ange duc mo
. rédaction du ms. Harley 4533.
A. Tnoas, His ii
Nov.
528
P. Mivuk 557
A. PiaGur, Une édition gothique de Charles d'Orléans. s8r
MÉLANGES
Mastin (G. P.) 597
antenois (6, P.) 597
Le Galles calummiator, de Pétrarque (P. de Nolhac) 598
Le théttre à Paris et aux environs à la fin du (A. Thomas). 606
Jean de Sy er Jean de Cis (A, Thomas).… siissss 61
Michaut pour M
Estaker CB. T'oynbec).
PÉRIODIQUES .…
CHRONIQUE
TABLE DES MATIËI
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